Toutes ont leur beauté, & un empire presque égal sur les hommes, Elles ont un rapport si intime avec l’esprit, généralement répandu dans tous les êtres capables de réflexion, qu’elles les réveillent, les attachent en quelques lieux, & en quelqu’état qu’elles les trouvent. […] Les uns & les autres font assurément les trois quarts de la Nation, il ne reste donc plus que la quatrieme partie sur laquelle la Poësie de style puisse avoir quelque empire. […] Qu’on imagine la phrase, où ces qualités se trouvent dans le dégré le plus éminent ; qu’on en sépare les idées des mots, & qu’on cherche ensuite, dans ces derniers, ces qualités qui nous subjuguoient avec tant d’empire.
On a juré de porter la coignée à la racine de l’arbre ; d’ôter à la concupiscence l’empire, puisqu’on ne peut lui ôter la vie ; de l’attaquer jusques dans ses retranchemens ; de la poursuivre dans tous les endroits qui lui servent de retraite ; de réduire en servitude son propre corps, qui paroît être son complice & d’intelligence avec elle ; & de le forcer de lui désobéir & de lui refuser son ministére : voilà ce qu’on a promis.
Contenant l’Histoire des Jeux de Théâtre, et autres divertissements Comiques soufferts ou condamnés, depuis l’extinction de l’Idolâtrie dans l’Empire, jusqu’à la naissance des Scholastiques.
Guerres, incendies, martyrs sans nombre, destruction des Eglises, abolition des Communautés, déposition des Evêques, translation de l’Empire, Conciliabules pour l’erreur, mépris des Conciles Œcuméniques ; il n’est point d’espece de mal qu’ils n’ayent faits. […] Le second Concile de Constantinople avoit fait les mêmes défenses, c’étoit dans la Grece, dans le centre des arts, l’empire des Appelles & des Praxitelles. […] Le vice ne triomphe pas moins sous l’empire de Morphée, que sous celui de Thalie, & Thalie le fait triompher. […] Hérode craignant l’indignation du peuple, crut l’appaiser en ôtant du temple ces sacrileges ornements ; mais il laissa sur la porte du Temple les aigles Romaines qu’il y avoit arborées, pour marquer sa soumission à l’Empire.
Mais ces Infâmes abusant de l’autorité publique, se laissèrent emporter à toutes sortes de dissolutions et débauches, ce qui fit que plusieurs graves Sénateurs, ne pouvant supporter leurs insolences, les firent bannir avec les Astrologues, devins, et magiciens ; Voyez sur ce sujet les Centuries de Galterius, la chronologie d’ Onuphriuset de Génébrard sur l’état de l’Empire Romain. […] Jean Chrysostome, Patriarche de Constantinople, en son étude du droit, défend d’admettre aucunsj plaisanteurs dans les Villes, pour le scandale qu’ils causaient, et en une Epitre à l’Empereur Honorius, se réjouit de ce qu’il les avait chassés de l’Empire, pour leurs dépravations. […] Mais pour parler du malheur qu’a causé la médisance ; Voyons le fond de l’antiquité, nous trouverons un Moïse quitter la Cour de Pharaon pour aller aux déserts de Madian, l’emprisonnement d’un Joseph, un Prophète David chassé de la présence de Saül, un Daniel jeté dans la fosse aux lions, un peuple Hébreu à la veille de sa perte, une Suzanne sur le point d’être lapidée ; Bref il n’y a peste plus dangereuse que celle de la calomnie, c’est pourquoi le Prophète royal, au Psaume septante et deux, dit que le Détracteur échellev le Ciel pour y vomir le venin de sa médisance, « posuit in coelum os suum et lingua ejus transivit in terra » : Je ne trouve pas étrange de quoi les Calomniateurs dressent des assauts continuels, contre ceux qui sont accusés de quelques imperfections, puisque la pointe de leur langue s’attaque aux plus justes du monde ; plût à Dieu que ce vice n’eût aucune racine dans nos cœurs afin que la charité se trouvant en son lustre, l’amitié pût avoir son règne, et la paix entrant en son Empire, la concorde y trouvât le trône de sa félicité. […] Je vous puis assurer que si le Philosophe Zénon eut autrefois le sceptre d’or des Illyriens pour s’être exercé à la louange d’un chacun, que notre bon Père Augustin ne peut attendre qu’une couronne de chardon et un sceptre de foin, pour régir l’Empire des Gymnosophistesy.
Octave, à qui la flatterie avait décerné le nom d’Auguste, malgré tant d’odieuses proscriptions : Octave-Auguste, échappé à dix conspirations tramées et conduites par les plus illustres Romains contre le second de leurs usurpateurs, et couvert du sang de tant de citoyens, découvre un conjuré, plus coupable qu’eux tous, dans l’ingrat Cinna, dans ce même Cinna auquel il a sauvé la vie, accordé les plus grands honneurs, sa confiance et la main d’Emilie ; auquel il vient de dire : « Cinna, par vos conseils, je retiendrai l’Empire ; Mais je le retiendrai pour vous en faire part… » Auguste, instruit de tout, mande Cinna, le convainc de la plus noire des trahisons, et ne l’en punit que par ces deux mots accablants…. […] Ce n’est point ici le vice forcé à reconnaître l’empire de la vertu ; c’est la vertu mise aux épreuves les plus cruelles, luttant contre elle-même, triomphante par ses propres forces, et supérieure à l’infortune : il faut lire la scène même, pour en bien concevoir tout le mérite. […] Mais quand il serait vrai que la raison seule pût tenir lieu de vertu, la tragédie dont je parle n’enseigne-t-elle pas aux Rois, que leur intérêt personnel, celui de leur gloire et de leurs plaisirs ne peut jamais se séparer de l’intérêt général des peuples soumis à leur empire ? […] [NDA] Est-ce donc un mal que les femmes dominent au Théâtre comme dans le monde, si elles ne se servent de leur empire que pour ramener les hommes à la vertu ?
Quand on veut copier le langage de la Religion, il faut la connoître plus à fond que les Auteurs dramatiques, il faut sécouer le joug d’une imagination frivole, & ne reconnoître d’autre empire que celui de la vérité. […] Dans l’empire amoureux Le devoir n’a point de puissance, L’amour dispense, Il faut souvent pour devenir heureux Qu’il en coute un peu d’innocence : Laissez mon cœur en paix impuissante vertu, N’ai-je pas assez combattu Quand l’amour malgré moi me contraint de me rendre ?