Dans les derniers siecles, froide & languissante, elle ne fut qu’un divertissement sans ame dans les grands ballets, peinture momentanée de quelque caractère. […] Je sais qu’il faut à l’homme une récréation pour délasser l’esprit, comme il faut du sommeil au corps pour réparer ses forces, que le dimanche a été établi de Dieu comme un jour de repos, & que dans cette vue il fait cesser les œuvres serviles ; je fais encore que l’exercice du corps est utile à la santé, mais ce n’est qu’un exercice modéré, un divertissement honnête ; l’excès est toujours pernicieux : Servandi corporis & animi gratia, non opprimendi. […] Les bals ne furent d’abord que des assemblées passagères, destinées à célébrer quelque fête, à donner quelque divertissement, formées au hasard de ceux qui vouloient s’y trouver, où l’on dansoit toute sorte de danses, selon la fantaisie des danseurs.
Un véritable Chrétien a bien d'autres divertissements plus relevés que ceux-là, s'il a de la passion pour les véritables et utiles plaisirs.
L’on commença à s’ennuyer de ces représentations sérieuses, les Joueurs y mêlerent quelques farces tirées de sujets profanes et burlesques : cela fit beaucoup de plaisir au Peuple qui aime ces sortes de divertissements, où il entre plus d’imagination que d’esprit ; ils les nommèrent par un quolibet vulgaire, les jeux des pois pilés : ce fut selon toutes les apparences, quelque scène ridicule qui eut rapport à ce nom, qui leur en fournit la matière.
Un politique usurpateur, se plaît en ces feintes, qui expriment sa conduite au naturel, qui la justifient par un applaudissement public ; ce que les autres prennent pour un divertissement lui est une étude, un secret conseil, où il corrige, retranche, ajoute beaucoup de choses par les promptes ouvertures de l’esprit, et ayant vu le dernier point où peut porter l’autorité dominante, il croit faire une grande miséricorde de n’aller pas à toutes les extrémités.
Plusieurs Evêques lui dirent que les comédies qui ne représentaient que des choses saintes, ne pouvaient être un mal ; que les Courtisans avaient besoin de ces occupations pour en éviter de plus mauvaises ; que la dévotion des Rois devait être différente de celle des particuliers, et qu’ils pouvaient autoriser ces divertissements. […] Germain parla de nouveau ; il prouva à la Reine que ce divertissement était un péché mortel, et lui rapporta son avis, signé de sept Docteurs de Sorbonne qui étaient de son sentiment.
Voilà les oracles de l’écriture, elle fait son portrait en faisant celui des méchans : Il se fait un divertissement de tout, des choses les plus mauvaises comme des meilleures, de la morale de l’Evangile, & de celle du paganisme ; il craint si peu le vice, il respecte si peu la vertu que tout est également un jeu pour lui. […] Dieu nous préserve d’un si misérable divertissement. […] L’homme doit combattre ses passions, & non se faire un criminel divertissement de les exciter, une volupté de les sentir ; la Loi lui défend de s’y complaire ; à plus forte raison des passions, extrêmes, affreuses, inhumaines ; mais le théatre ne vit que de vice, & tout vice lui est bon : c’est chez lui un mérite, une gloire, un talent de l’inventer, le multiplier & le repandre.
Il n’y a guére eu que ce siécle-ci où l’on ait prétendu justifier la comédie, & la faire passer pour un divertissement qui se pouvoit allier avec la dévotion : les autres étoient plus simples dans le bien & dans le mal. […] C’est à quoi on a beaucoup travaillé au sujet de la comédie ; car, comme il n’y a guére de divertissement plus agréable aux gens du monde que celui-là, il leur étoit fort important de s’en assurer avec une jouissance douce & tranquille, afin que rien ne manquât à leur satisfaction. […] La comédie ne peut passer pour un divertissement. […] le divertissement innocent d’une joie pure & simple ne peut-il vous suffire ? […] La comédie ne peut passer pour un divertissement.