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66. (1686) Sermon sur les spectacles pp. 42-84

Quelle profession en effet que celle d’apprendre à tromper les hommes, à séduire la jeunesse, à mépriser des parents, à vivre dans le crime, à flatter les passions, à honorer les vices, à accréditer les erreurs ! […] Les personnes qui les donnent, presque toutes débauchées, ou prêtes à le devenir, emploient jusqu’à l’indécence la plus outrée, soit dans leurs gestes, soit dans leur manière de se présenter, pour s’associer des complices de leurs crimes et de leurs impudicités. […] Je sais, avec le grand Apôtre, qu’il y a des choses qu’on ne doit pas même nommer parmi le peuple de Dieu, nec nominetur in vobis ; que le portrait même du vice est un objet dangereux ; et que c’est en quelque sorte participer au crime, que de le représenter avec des couleurs capables de le faire aimer. […] parce que vous êtes tellement corrompus que rien n’est plus capable de vous pervertir ; parce que vous êtes tellement familiarisés avec le crime, que rien ne peut plus vous séduire ; parce que vous êtes rassasiés de ses infâmes voluptés dont l’habitude conduit à l’endurcissement ; parce que le péché qui règne en vous, vous rend insensibles aux plus terribles vérités. […] On ne se familiarise point impunément avec les Spectacles, selon l’expression de Saint Bonaventure ; ils conduisent à l’impiété comme au crime, et la chose ne doit pas nous paraître extraordinaire, attendu que la foi s’éteint presque toujours là où les passions dominent.

67. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre I. Continuation des Mêlanges. » pp. 7-31

Les poëtes bucoliques font moins de dépense en embrassemens que lui dans ses idylles, où non-seulement ce sont des marques d’amitié, mais des effusions d’amour, des préludes, des commencemens du crime : ce qui est d’une indécence révoltante. […] Qui croiroit cependant qu’il ne parle pas des Vies des Saints, où on ne voit que de bonnes œuvres, à l’exceptions des crimes de leurs persecuteurs, qui font leur grande sainteté, & les égaremens de leur jeunesse, dont ils ont fait penitence. […] Une pareille idée ne m’est jamais venue, & je ne saurois l’adopter : le vice couronné familiarise avec l’idée du crime, & l’exemple persuade bien plus éloquemment & avec plus de force, que les exhortations ne portent à la vertu : elles arrivent toujours trop tard, quand le mal est fait. […] Il pense autrement des hommes ordinaires, dont l’histoire n’est que le tableau de leurs miseres & de leurs vices, le registre de quelques vertus & de beaucoup de crimes. […] Il montre, il répand cette fleur d’esprit avec tant d’abondance, que plusieurs écrivains lui en ont fait un crime : l’indigence le blâme d’être trop riche.

68. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE VI. Du sérieux et de la gaieté. » pp. 128-149

 » Faire une nécessité de l'ennui, et un crime au théâtre de le chasser, voilà des paradoxes de la morale sévère. […] Il prête à l'imagination les objets, les couleurs, le pinceau de la frivolité et du crime. […] Le monde fournit abondamment à l'un et à l'autre ; ses sottises méritent tous nos ris, ses crimes toutes nos larmes. Que devaient penser du théâtre ces deux Philosophes, où ils voyaient qu'on avait la sottise de représenter des sottises, la cruauté de peindre des cruautés, le crime de s'occuper des crimes ? […] par quel enchantement peut-on dans les loges se livrer innocemment à ce qui ailleurs serait un crime ?

69. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — LETTRE IV. » pp. 68-81

un crime involontaire Devoit-il attirer toute votre colere ? […] Vous même dans mes bras vous l’avez amené, C’est vous dont dont la rigueur m’ouvrit ce précipice ; Voilà de ces grands Dieux la suprême justice ; Jusques au bord du crime ils conduisent nos pas, Ils nous font le commettre, & ne l’excusent pas. […] Saint Thomas prétend2 qu’il a expié ce double crime par une exacte pénitence.

70. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « VIII. Crimes publics et cachés dans la comédie. Dispositions dangereuses et imperceptibles : la concupiscence répandue dans tous les sens.  » pp. 30-40

Crimes publics et cachés dans la comédie. […] De cette sorte, si nous l’en croyons la confession même où tous les péchés se découvrent, n’en découvre point dans les théâtres ; et il assure avec une confiance qui fait trembler, « qu’il n’a jamais pu entrevoir cette prétendue malignité de la comédie, ni les crimes dont on veut qu’elle soit la source »page 40. [« Lettre d’un théologien », page 40]. […] Vous ne trouvez-pas, dites-vous, par les confessions, que les riches qui vont à la comédie soient plus sujets aux grands crimes que les pauvres qui n’y vont pasPage 40. [« Lettre d’un théologien », page 40].

71. (1783) La vraie philosophie « La vraie philosophie » pp. 229-251

Les partisans des spectacles manqueront toujours de la possession de bonne foi ; le Christianisme foudroiera toujours contre un amusement dont l’effet est de nuire aux mœurs, en donnant des idées de crimes, opposées à celles que donnent la raison & la Religion. […] D’ailleurs notre Religion nous présente cette action de désespoir comme le plus grand & le plus funeste des crimes. […] est-il possible que dans une République Chrétienne on n’arrête le crime que par un autre crime ? […] Les Comédies & les Tragédies ne sont donc qu’un recueil de stratagêmes pour faire réussir tous les crimes, favoriser toutes les passions, ménager toutes les intrigues, traverser & inquiéter tous les peres, les maris, les maîtres, & goûter librement tous les plaisirs. […] On ne peut disconvenir que l’oubli de Dieu, le libertinage, la fornication, l’adultere, la jalousie, la vengeance, l’homicide, en un mot, tous les crimes qui déshonorent l’humanité, y sont représentés : désobéissance des enfans, dépenses inutiles & ruineuses, esprit de dissipation & d’irréligion qui y regnent ; tout d’une voix unanime dit anathême aux Théatres.

72. (1715) La critique du théâtre anglais « CHAPITRE II. L’Impiété du Théâtre Anglais. » pp. 93-168

Au quatrième Acte, il est parlé de l’adultère aussi cavalièrement que si ce n’était qu’un crime imaginaire, et qui n’a d’autres fondements que l’ignorance et la bigoterie. […] Il va d’un crime à un autre ; de la censure des ouvrages de Dieu à la profanation de sa sainte parole. […] maintenant, prends ton essor, crime impie, crime impuni : il paraît que l’éternelle Providence s’est assoupie de lassitude, et qu’elle a opiné pour le meurtre par un signe de tête qu’elle a fait en sommeillant. […] « Parce que la sentence ne se prononce pas si tôt contre les méchants, les enfants des hommes commettent le crime sans crainte. […] C’est un crime, que de violer les lois du Prince ; mais quel outrage n’est-ce pas lui faire que de les tourner en plaisanteries et les mettre en chansons ?

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