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64. (1760) Lettre à M. Fréron pp. 3-54

La prédiction du nouveau Converti est effrayante ; mais j’ose moi prédire le contraire, quand l’Eglise aura vu l’exécution de ce que je conseille dans ma lettre à Mr.  […] Moi je dis qu’en consultant le décret de l’Eglise je ne fais rien de contraire à ce qu’elle m’impose, elle s’est expliquée sur les motifs qui l’ont engagée à proscrire la scene. […] Vous n’avouerez donc pas, me dira-t on, qu’on peint sur le Théâtre la passion de l’amour comme une vertu et que par conséquent, loin d’apprendre à régler cette passion, on l’encourage par des peintures agréables et flatteuses, ce qui est absolument contraire à la Religion. […] La peinture des avantages qui résultent d’un pareil choix, l’exposition des motifs qui doivent déterminer à le faire, n’a sans doute rien de criminel ; et si l’on rend amoureux à l’excès deux personnes qui reconnaissent réciproquement ces avantages en elles ; que le mérite et la vertu soient toujours les motifs qui déterminent les deux partis à s’unir, que l’on prouve maintenant ce qu’il y a en cela de contraire à l’Ecriture. […] L’orgueil est un amour propre excessif qui nous fait croire que nous sommes toujours supérieurs aux autres, ou qui, malgré notre persuasion intérieure du contraire, nous porte à ne pas avouer notre infériorité et à faire tous les efforts dont nous sommes capables pour humilier les autres.

65. (1675) Traité de la comédie « XXV.  » pp. 314-316

 » Mais le moins que l'on puisse faire, est de n'y mettre pas d'obstacle et d'empêchement en faisant volontairement ce qui est directement contraire à cet esprit.

66. (1772) Sermon sur les spectacles. Pour le Jeudi de la III. Semaine de Caresme [Sermons pour le Carême] « Sermon sur les spectacles » pp. 174-217

Or ces raisons les voici : rien en général de plus contraire que les spectacles à l’esprit du Christianisme, à la profession du Christianisme, aux exercice du Christianisme. […] Avouez donc du moins que ce sont tous les spectacles en général, ceux de nos jours comme ceux de leur siecle, que condamnent les saints Docteurs ; puisque les mêmes raisons, qui les ont engagés à condamner les uns, conviennent également aux autres : & puisqu’ils ont trouvé ceux de leur siecle contraires à l’esprit, à la profession, aux exercices du Christianisme, convenez que ceux-ci le sont encore. […] Précisément, parce que rien, dit-il, n’est plus contraire à l’honnêteté publique & particuliere que d’imiter, soit par représentation, soit par fiction, ce qu’il ne peut jamais être permis de faire. […] Enfin, quand par mille sentiments divers & mille mouvements contraires, qu’on aura eu l’art d’exciter ; même malgré vous, dans votre cœur, on aura su vous intéresser pour le héros le plus passionné ; sous prétexte de punir le vice & de récompenser la vertu, quand vous verrez enfin couronner à vos yeux la passion la plus ardente & la plus vive, rien de puni que l’insensibilité & le défaut d’ardeur ! […] Je le souhaite, je souhaite que tous les saints Peres se soient trompés ; car tous les saints Peres assurent tous le contraire ; mais laissez-nous cependant déplorer la corruption de leurs cœurs, le déshonneur de la Religion & de l’Etat, & peut-être le déshonneur prochain de vos propres familles.

67. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XV. La tragédie ancienne, quoique plus grave que la nôtre, condamnée par les principes de ce philosophe.  » pp. 61-63

 : et les chrétiens ne comprendront pas combien ces émotions sont contraires à la vertu ?

68. (1744) Dissertation épistolaire sur la Comedie « Dissertation Epistolaire sur la Comedie. — Reponse à la Lettre précedente. » pp. 19-42

Saint Charles Borromée, qui vivoit à la fin du seiziéme siécle, eût le même sentiment de celle qu’on représenta alors ; & nous dit : « Qu’entre les entretiens publics de corruption étoient les spectacles de la Comedie, & que tout ceci étoit contraire à la morale chrétienne. » Personne ne nous prouvera, que le Theatre du dixseptiéme, ou du dixhuitiéme siécle soit plus chaste que dans le siécle de ce Saint : je suis donc en droit de pouvoir suivre le commandement du même Saint, qui veut, que ceux qui ont quelque charge des ames, en inspirent de l’horreur à celles que Dieu leur a confiées ; qu’ils leur montrent, que ces spectacles sont les malheureuses sources des calamités publiques, qui accablent le peuple chrétien ; & qu’ils alleguent à cet effét l’autorité des Saints Chrysostome, & Cyprien, & du grand Salvien. […] « Toute représentation est par sa nature criminelle & peché, où les représentans se servent des paroles, ou font des gestes contraires à la pureté, ou des choses, qui puissent nuire au prochain. » Ce seroit ne pas connoître le genie du theatre moderne, que de soûrenir qu’on n’y dit jamais de ces paroles équivoques, qui fassent rougir la pudeur : & qu’on n’y voit jamais des gestes que l’honnéreté chrétienne ne souffre pas, & que cependant l’Ange de l’Ecole veut qu’on bannisse de tout divertissement. […] Je veux la supposer telle, qu’elle se pique d’être : point d’attachemens, point d’intrigues : elle a des amitiés innocentes, liaisons honnêtes : j’en conviens : mais pour cela elle n’est pas dans le chemin du salut : elle s’en peut flâter tant qu’elle voudra ; je suis persuadé du contraire, & je vais le lui montrer. […] J’espere que cette Demoiselle ne prendra pas ce raisonnement comme la prédiction d’un malheur, où je souhaite qu’elle tombe ; mais comme un avertissement de ce qu’elle a à apprehender, & comme le meilleur office que lui puisse rendre un admoniteur prévoiant & zelé, qui s’interesse à son salut, & qui apprehende tout pour elle, & qui ne commencera à esperer, que quand elle commencera elle-même à se défier de sa vie, & à croire que la Comedie est contraire aux maximes de l’Evangile.

69. (1825) Encore des comédiens et du clergé « DISCOURS PRELIMINAIRE. » pp. 13-48

Tous les faux dévots et cette multitude d’esprits faibles ou irréfléchis, répètent sans cesse, d’après les déclamations des dogmatiseurs fanatiques dont ils se laissent séduire, que toutes les bonnes actions des hommes, que toutes leurs vertus, ne sont rien sans la foi, tandis que saint Paul, ce véritable apôtre de la morale chrétienne et évangélique la plus pure, a dit tout le contraire. […] Les ministres des anciens cultes religieux, savaient bien aussi que plus les hommes sont instruits de leurs devoirs et de leurs droits légitimes, plus ils sont civilisés, plus ils sont éclairés, et moins ils sont susceptibles d’être dupés et rançonnés, moins il est facile de soumettre leur esprit aux croyances absurdes de la superstition, si contraires au bon sens et à la raison. […] La science est un bien commun qui appartient à tous les citoyens ; chacun a droit d’y prétendre selon les circonstances dans lesquelles il se trouve : mais l’ignorance est un mal, le mal ne peut produire que du mal, et tous les raisonnements contraires aux principes de philanthropie ne sont que des paradoxes. […] Que le pape chasse les jésuites qui n’offrent qu’une société dangereuse, ou plutôt une secte désorganisatrice qui n’est en harmonie avec aucune autorité sur terre, pas même avec celle du chef de l’église, auquel plus d’une fois elle fit la loi, et dont les éléments tendent à la dissolution de tout ce qui lui résiste, et de tout ce qui lui est contraire.

70. (1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE III » pp. 42-76

Quoiqu’on veuille dire que le Théâtre ne souffre plus rien que de chaste, et que les passions y sont traitées de la manière du monde la plus honnête, je soutiens qu’il n’en est pas moins contraire à la Religion Chrétienne. […] Ils disent qu’il est vrai que la Comédie est une représentation des vertus et des vices, parce qu’il est de la fidélité des portraits de représenter leurs modèles tels qu’ils sont, et que les actions des hommes étant mêlées de bien et de mal, il est par conséquent du devoir du Poème Dramatique de les représenter en cette manière : mais que bien loin qu’il fasse de mauvais effets, il en a de tout contraires, puisque le vice y est repris, et que la vertu y est louée, et souvent même récompensée. […] c’est le jour du Seigneur, il lui appartient tout entier, et si la faiblesse de l’homme ne lui permet pas de le lui donner absolument par une application actuelle, au moins ne doit-on prendre que les divertissements nécessaires ; encore faut-il qu’ils ne soient contraires ni à la sainteté du jour, ni à celle à laquelle les Chrétiens sont obligés. […] Mais il se plaint à la fin de cet Ouvrage par ces paroles : « Il est certain que depuis quelques années notre Théâtre se laisse retomber dans sa vieille corruption, et que les Farces impudentes, et les Comédies libertines, où l’on mêle bien des choses contraires aux sentiments de la piété et aux bonnes mœurs, ranimeront bientôt la Justice de nos Rois. 

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