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102. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE I. Du sombre pathétique. » pp. 4-32

« Eût-on pu me l'ôter, sans m'arracher la vie ? […] donne-t-elle la vie à l'âme ? Ne serait-ce pas plutôt l'âme qui anime le corps et lui donne la vie ? la vie fait-elle les fers de l'humanité ? […] Elle ne donne pas une idée plus avantageuse du reste de sa vie dans deux lettres qu'on lui fait écrire à son amant, et par lui précieusement conservées.

103. (1687) Avis aux RR. PP. jésuites « I. » pp. 6-8

Siège s’acquittaient de ce devoir : « Ce n’est pas sans beaucoup de gémissements et de larmes, disaient-ils, que nous faisons connaître à Votre Excellence, que Dieu conserve, qu’il a plu à Dieu qui gouverne le monde par les lois de sa providence, de retirer de cette vie notre très-saint Pontife, dont la mort a causé une douleur si universelle, que tous jusqu’aux pierres mêmes, s’il est permis de le dire, en ont pleuré, "Cujus cuncti verè, et si dicendum est, etiam lapides ipsi fleverunt exitum". […] Pontife, ajoutent-ils, que Dieu a appelé de cette vie à une meilleure, nous avait mis dans un grand accablement nous voyant ainsi destitués de notre Pasteur ; mais la bonté divine n’a pas laissé longtemps en cet état ceux qui espéraient en lui.

104. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XIX. Autre principe de Platon sur cette matière. » pp. 69-71

Par un principe encore plus universel, Platon trouvait tous les arts qui n’ont pour objet que le plaisir, dangereux à la vie humaineDe Rep. […] « Je vous écris, pères, et à vous, vieillards : je vous écris, jeunes gens : je vous écris, enfants ; chrétiens, tant que vous êtes, n’aimez point le monde ; car tout y est ou concupiscence de la chair, ou concupiscence des yeux, ou orgueil de la vie. » Dans ces paroles, et le monde et le théâtre qui en est l’image, sont également réprouvés : c’est le monde avec tous ses charmes et toutes ses pompes, qu’on représente dans les comédies.

105. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre troisiéme. — Chapitre III. But que le Spectacle moderne doit se proposer. » pp. 123-132

« LE Théâtre, dit l’Abbé d’Aubignac, étant peu-à-peu & par dégré monté a sa dernière perfection, devint enfin l’image sensible & mouvante de toute la vie humaine. Or comme il y a trois sortes de vie ; celle des Grands dans la Cour des Rois, celle des Bourgeois dans les Villes, & celle des gens de la Campagne, le Théâtre aussi a reçu trois genres de Poèmes dramatiques, savoir, la Tragédie, la Comédie, la Pastorale ou la Satire. » Cette explication des divers genres de Spectacles pouvait être juste du tems des Grecs, mais elle ne l’est plus actuellement. […] « La source de l’amour qu’on ressent pour lui se trouve peut être dans le goût qu’ont tous les hommes à contempler l’image des moindres actions de la vie.

106. (1643) Les Morales chrétiennes « Des Théâtres. » pp. 511-519

Car les grandes choses ne paraissent ordinairement au monde, que dans des longueurs pour quia la vie d’un seul homme ne suffit pas ; leur suite est souvent interrompue par le silence, ou par le tumulte des affaires : les faux bruits, les feintes, les passions particulières en déguisent la vérité, et sont cause que l’on prend les circonstances pour le principal, mais les théâtres recueillent ce qui sert pour la parfaite intelligence d’un sujet ; en moins de deux heures, il font voir la naissance, le progrès, les difficultés, la fin des aventures qui exercèrent le monde durant plusieurs années et plusieurs siècles. […] Les Grecs le pratiquèrent ainsi, lors qu’ils représentaient sur les théâtres la vie des Héros par des personnes consacrées aux Dieux, et qui par cette action, se donnaient l’entrée aux plus grandes charges de la République D. […] [NDE] Comprendre : des longueurs telles que la vie d'un seul homme ne suffit pas.

107. (1700) IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, etc. [Sermons sur tous les sujets de la morale chrétienne. Cinquiéme partie] « IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, &c. » pp. 95-126

Cette demande, Messieurs, étoit sans doute bien juste ; & si rien ne nous est plus cher dans la vie, que nos yeux, je ne vois pas ce que cet homme, dans l’état où il étoit reduit, pouvoit demander qui luy fût plus necessaire, Domine ut videam. […] On voyoit dans les amphitheâtres, des hommes combattre contre des Lions, des Ours, & des Taureaux, dont ils étoient souvent inhumainement déchirez, pendant que le peuple se recrioit aux tours d’adresse, que ces miserables victimes faisoient, pour se défendre des grifes, & des dens de ces animaux furieux : & l’un des plus ordinaires plaisirs de ce temps-là, étoit de voir des Gladiateurs à outrance, qui exposoient leur vie, ou bien des Esclaves, qu’on sacrifioit à ce divertissement inhumain. […] Mais à la bonne heure, me direz-vous, que ceux qui connoissent leur foible, s’en éloignent, en cherchant dans une vie retirée, un asile à leur innocence, & qu’ils ne chargent point les autres du soin de leur salut ; mais ceux qui n’ont rien à craindre de ce côté là, ne peuvent-ils pas y assister sans s’en faire un point de conscience ? […] Que si ces spectacles nous mettent ainsi en danger de prendre l’esprit du monde, il n’y a pas moins de sujet de craindre qu’il ne nous en imprime les sentimens, & les maximes, sur lesquelles ensuite l’on regle sa vie & sa conduite ; puisque ces spectacles sont comme une école, où l’on enseigne une Morale toute contraire à l’Evangile, & à la Religion. […] Il sçavoit bien que pour s’attacher fortement au service de Dieu, il falloit mépriser les choses de la terre ; & que rien ne nous détourne davantage de penser aux biens solides & éternels, que de s’occuper de ces sortes d’amusemens, qui ne nous laissent qu’un dégoût étrange des veritez chrétiennes, & de toutes les choses de l’autre vie.

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