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220. (1731) Discours sur la comédie « TROISIEME DISCOURS » pp. 304-351

Quand on considère de quelle manière les Pères ont toujours parlé de l’Ecriture, on voit qu’ils se servent des mêmes expressions, qui conviennent au Corps de Jésus-Christ ; ils appellent indifféremment la Sainte Ecriture, ou l’Eucharistie les divins Mystères, les saints et sacrés symboles, le Corps de Dieu ; car comme le Verbe s’est incarné en se revêtant de notre chair, Dieu s’était déjà comme incorporé, en se communiquant aux hommes sous les symboles de l’Ecriture ou de la parole.

221. (1674) Le Theâtre François pp. -284

Leurs Decrets, ie l’auoüe, sont des armes sacrées, deuant lesquelles les Defenseurs de la Comedie doiuent humblement baisser les leurs ; & bien loin d’auoir la temerité de leur contredire, il nous faut croire qu’ils n’ont eu que de bonnes intentions. […] Aussi voyons nous qu’ils ne sont pas tous bannis de nos Colleges, où i’ay veu representer des ouurages de Plaute, & de Terence aussi bien que de Seneque ; ni méme des Communautez Religieuses, où l’on dresse tous les ans de superbes Theatres pour des Tragedies, dans lesquelles par vn meslange ingenieux du sacré & du profane toutes les passions sont poussées jusqu’au bout. […] I’aurois pû dire que le méme Aristophane duquel ie viens de parler, le plus hardi dans ses railleries de tous les Comiques de l’Antiquité, & qui joüa publiquement tous les principaux d’Athenes, sans épargner ny Cleon, ny Demosthene, ny Alcibiade, fut par vn decret public honoré d’vn chapeau fait d’vne branche de l’Oliuier sacré qui estoit en la citadelle de cette Ville ; que cette gloire qu’il merita fut vne marque éclatante de la reconnoissance des Atheniens, qui luy sceurent bon gré du soin & de l’affection qu’il auoit pour la liberté de la Republique ; ce qui paroist dans toutes ses Comedies, où il leur donne des conseils tres salutaires, en leur reprochant leurs fautes, & les exhortant à leur deuoir.

222. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [A] » pp. 297-379

Molière a fait des Pièces où les mœurs sont blessées ; Regnard l’a imité dans ce défaut, & la foule de Comiques qui les ont suivis, les Montfleuri, les Dancourt, &c. ne les ont pas ménagées ; c’est une vérité : mais, prenons la plus mauvaise de toutes les Pièces en ce genre, & choisissons-la nouvelle ; le Tuteur-Dupé, par exemple : j’y vois une suite de mensonges, de fourberies, non-seulement de la part d’un Valet, & d’une Soubrette, mais de celle d’une Jeune-personne honnête, à qui l’on fait faire un Rôle indécent, qui marque une tête tournée par la passion ; j’y vois une vieille Folle, dont l’impudence révolte & dégoûte ; ce tableau n’est pas édifiant : mais j’y vois aussi, un Vieillard qui cherche le bonheur, où il n’est pas pour les gens de son âge ; je vois que son aveugle passion le fait seule donner dans tous les piéges d’un vil intriguant, & rejetter les sages conseils d’un homme simple & droit : j’y découvre, qu’on ne peut jamais violer impunément cette loi de la nature, toujours sainte, toujours sacrée, qui veut que la jeunesse s’unisse à la jeunesse, pour former un lien, où toutes les convenances doivent se rencontrer ; j’y trouve le mordant ridicule jeté sur la passion insensée, qui veut associer à l’hiver de l’âge, les fleurs du printemps ; assemblage bizarre, dont il ne peut résulter que le discord & l’infécondité. […] Les premiers Acteurs furent nos Prêtres ; nos premiers Théâtres, les Temples sacrés ; c’est au culte de la Divinité que les hommes doivent tous les divertissemens où il y a Représentation : la plupart des pratiques qui parurent, dans la succession des temps, si contraires à l’esprit de la Religion, eurent leur principe dans les Cérémonies religieuses elles-mêmes. […] « Tous les sujets des Pièces Grecques, dit monsieur Rousseau, n’étant tirés que des antiquités nationales, dont les Grecs étaient idolâtres, ils voyaient dans leurs Acteurs, moins des gens qui jouaient des Fables, que des Citoyens instruits, qui représentaient aux yeux de leurs Compatriotes l’histoire de leur Pays. » Et plus haut : « Comme la Tragédie avait quelque chose de sacré dans son origine, d’abord les Acteurs furent plutôt regardés comme des Prêtres, que comme des Baladins. » Mais chez les Romains, l’on ne donna que quelques chétives Tragédies, qui ne pouvaient faire une impression bien vive, parce qu’elles n’offraient que des Fables étrangères à la Nation ; telles étaient le Thyeste de Gracchus ; l’Alcméon de Catulle ; l’Adraste & l’Œdipe de Jules César ; l’Ajax d’Auguste, dont il fut si peu content lui-même, que ses amis lui ayant demandé un jour, ce que fesait Ajax, il leur répondu en riant, qu’il était sous l’éponge * ; la Médée d’Ovide.

223. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre II.  » pp. 37-67

Ce mêlange de sacré & de profane, ce choix du tems & des piéces sont aussi sans doute le fruit de la charité.

224. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre IV.  » pp. 97-128

La Réligion de Léon n’étoit point austere, il s’attiroit le respect (non par des vertus, mais) par des cérémonies pompeuses, ses secretaires sembloient professer la philosophie, sceptique, (ce trait est faux) les comédies de l’Arioste & de Machiavel quoiquelles ne respectent pas la pudeur & la piété, furent souvent jouées dans sa Cour, en sa presence, & celle du sacré Collége, par des jeunes gens des plus qualifiés  ; (on pouvoit ajouter celles du Cardinal Bibiana qui ne valent pas mieux pour les mœurs) Ce qui offençoit la Réligion n’étoit pas apperçu dans une cour occupée d’intrigues & de plaisirs ; les affaires les plus graves ne deroboient rien à ses plaisirs.

225. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre V.  » pp. 129-160

ton aîle fugitive, Tantôt couvre la sombre rive Du triste séjour de la, mort, Tantôt elle plane avec gloire Sur les lieux sacrés de l’histoire, Force la demeure du sort.

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