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2. (1667) Lettre sur la Comédie de l'Imposteur « Lettre sur la Comédie de l’Imposteur » pp. 1-124

Ils allèguent des raisons admirables de ce principe, que je passe sous silence, de peur d’être trop long. […] De quoi tout le monde étant surpris, l’Officier rend raison, et cette raison est le dénouement. […] Pour connaître ce Ridicule il faut connaître la Raison dont il signifie le défaut, et voir en quoi elle consiste. […] De là vient que ce qui sied bien est toujours fondé sur quelque raison de convenance, comme l’indécence sur quelque disconvenance, c’est-à-dire le Ridicule sur quelque manque de Raison. […] Car la connaissance du défaut de Raison d’une chose que nous donne l’apparence de Ridicule, qui est en elle, nous fait la mésestimer nécessairement, parce que nous croyons que la raison doit régler tout.

3. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — TROISIEME PARTIE. — Tragédies à conserver sur le Théâtre de la Réformation. Avant Propos. » pp. 118-127

Les grands Maîtres (ainsi que d’illustres Ecrivains ont remarqué) nous ont donné plusieurs préceptes qui sont contraires à la vérité et à la raison : depuis deux mille ans nous portons le joug sans oser le secouer ; parce que nous ne les approfondissons point ces préceptes, ou parce que nous nous obstinons à les soutenir par prévention. […] Je me suis, il est vrai, conformé à ces règles dans ce que j’ai donné ; mais il est aisé de voir que ce qui m’a déterminé à tenir cette conduite, c’était le désir d’éviter la singularité, et la crainte d’être le seul de notre siècle qui osât opposer une digue à la prévention générale : j’ajoute que je n’ai suivi ces règles que lorsqu’elles m’ont paru conformes aux préceptes de la raison autant qu’à ceux des Maîtres de l’Art ; aussi lorsqu’il m’est arrivé de citer quelque dogme du grand Maître, j’ai toujours dit : Comme le veut Aristote ou plutôt la raison : la nature : le bon sens : le vrai : et autres termes semblables, ainsi qu’on peut le vérifier dans mes Ecrits. Lorsque je commençais, il y a plus de quarante ans, à étudier sérieusement le Théâtre, je trouvais d’abord, dans les Anciens et dans leurs Commentateurs, des règles qui choquèrent ma raison ; je fis bien des réflexions en conséquence ; mais, ne me fiant pas à moi-même et craignant de me tromper, je soumis mes lumières à la grande autorité de ces hommes qui, pendant plusieurs siècles, nous ont servi de guide, et je n’osais même communiquer mes doutes à personne. […] 10 La fameuse querelle que cette Ecrivain eut dans ce temps là avec le Tasse et ceux de son parti, est assez connue des gens de Lettres : avec ce secours je me défiais moins de ma raison, quoique j’ai toujours cru que je devais avoir plus de ménagement qu’un autre en écrivant ; et c’est par ce motif que je n’ai jamais expliqué ouvertement mes idées. […] En un mot je respecte les règles, lorsqu’elles me paraissent dictées par la nature et conformes à la raison ; mais je ne les écoute pas quand elles forcent la nature, et que, contraires au bon sens et à la raison, elles ne tendent qu’à nous mettre aux fers comme des esclaves.

4. (1690) Entretien sur ce qui forme l’honnête homme et le vrai savant « VII. ENTRETIEN. » pp. 193-227

si ce n’est s’accoutumer à juger des choses par raison, et selon ce qu’elles sont en elles-mêmes ? […] Faites lire les Poètes à votre fils, et faites-lui faire usage de la raison en même temps. […] Cette éloquence vide de sens et de raisons ne me plaît pas. […] Les hommes se font des ordres d’étude comme il leur plaît : et ils ne consultent rien moins sur cela que la raison. […] Dans cette disposition le parti qui semble le meilleur, c’est de contenter les sens et l’amour propre ; et de railler ceux qui en appellent à la raison.

5. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre III. L’amour profane est la plus dangereuse de toutes les passions. » pp. 29-31

Lorsque ce sentiment n’a d’autre objet que ce qui peut flatter les sens, on perd souvent de vue les principes qui doivent assujettir la conduite à la raison. […] Si la raison et la religion n’opposent point de digue à l’impétuosité de ce penchant, il n’est point d’excès où l’on ne puisse être entraîné. […] Il faut réfléchir avant d’aimer, de peur que le cœur ne subjugue la raison en lui déclarant qu’il ne peut échapper au feu qui le consume. […] Il réfléchit, et peut apercevoir ses extravagances : mais, lorsque le cœur est enflammé par l’enchantement des sens, la raison ne tarde pas à être séduite, et l’esprit trouve son poison dans ce qui charme le cœur. […] Dès lors que l’amour exclut de son commerce la prudence et la raison, il est plus propre à former un engagement indécent qu’à produire un mariage heureux q » ; il jette le trouble dans l’âme et dans les sens, il enlève la fleur de l’innocence, il étonne et détruit la vertu, il avilit et dégrade l’homme, il le met au-dessous de lui-même, il ternit sa réputation, la honte marchant presque toujours à sa suite.

6. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XXI. Les spectacles condamnés par les auteurs profanes anciens et modernes. » pp. 179-182

si les dieux avaient eu une volonté malfaisante pour les hommes, quel don plus conforme à ce dessein auraient-ils pu leur faire que celui d’une foule de passions, l’injustice, l’intempérance, la luxure, dont la raison n’eût pas été la maîtresse ? […] nous représentons sur nos théâtres les fureurs de Médée, les vices d’un grand nombre de personnes que l’on métamorphose en héroïnes et en héros, sans aucun égard pour la raison qu’elles n’ont jamais respectée ! […] Il est bien rare que la raison se rencontre avec elles. […] Si la décision de ces auteurs n’emporte pas une interdiction juridique, elle sert du moins à prouver, suivant les lumières de la raison, le danger des spectacles. […] Ce grand roi demandait un jour à Bossuet son avis sur les spectacles : « Sire, répondit l’illustre prélat, s’il y a de grands exemples pour, il y a des raisons invincibles contre. » 40.

7. (1634) Apologie de Guillot-Gorju. Adressée à tous les beaux Esprits « Chapitre » pp. 3-16

Mais qui pénétrera plus avant dans l’intention de la loi, on verra que c’est par un intérêt public, et une raison d’État qu’on a été contraint de coucher en tels et tels termes cette loi. […] Ceux qui considèreront et pèseront mûrement ces raisons pourront supposer aussi que comme plusieurs lois dans la suite des siècles ont été abrogées et ont perdu leur vigueur, celle que les adversaires de GUILLOT-GORJU objectent, peut avoir perdu sa vertu et sa force. […] La raison est une chose fort excellente, mais elle devient mauvaise quand les hommes en abusent aussi bien que de la volupté. […] Mais quand on considérera les personnes à qui les Comédiens s’étudient davantage de donner du plaisir : je m’assure que le respect emportera sur l’esprit de ces Critiques ce que la raison n’y aura pu gagner. […] Cette objection aurait pu être faite voirement avec plus de raison que maintenant, quand elle serait de valeur.

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