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23. (1772) Spectacles [article du Dictionnaire des sciences ecclésiastiques] « Spectacles. » pp. 150-153

Quoi qu’il en soit, le but, le propre objet des spectacles, n’est autre que d’exciter, de nourrir & d’enflammer les passions, l’orgueil, l’ambition, la haine, la colere, la vengeance, & sur-tout l’amour profane qui paroît sur le théâtre comme une noble foiblesse, & avec tous les agrémens les plus capables de l’inspirer. […] Voilà ce qui se voit sur le théâtre, & ce qui l’a fait condamner comme une source de mille désordres, non-seulement par les Conciles & les Peres de l’Eglise, mais aussi par les Payens, & par ses propres partisans revenus à eux-mêmes. […] conviennent que le premier l’emporte sur le dernier pour le danger, & le trouvent plus propre à corrompre le cœur. […] On n’ose découvrir ses propres sentimens ; on n’ose montrer ses plaies, mais on affecte une indifférence extrême ; on cherche divers prétextes pour s’éloigner de ce qui est permis ; on prête une oreille attentive à la voix de la volupté qui semble encore se faire entendre ». […] Il faut conclure de tout ce que nous avons dit, qu’aller aux spectacles est un péché mortel de sa nature, & qu’on peche en effet mortellement lorsqu’on y va de son propre mouvement, & sans nécessité, par goût, par inclination, par choix.

24. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre I. Du Théâtre des Anciens. » pp. 2-24

La plûpart ne pouvant dissiper l’ennui qui les dévore, par aucun moyen qui soit en eux-mêmes, ont été trop heureux de recevoir ceux qu’on leur a présentés, pour se dérober à leur propre foiblesse, & perdre, dans une foule de distractions & d’amusemens, un tems qui étoit devenu pour eux un fardeau insupportable. […] Elles ne manquerent pas de causer sur les Romains les mauvais effets qu’elles avoient produits contre leurs propres Auteurs. […] Combien ne devons-nous pas déplorer l’aveuglement de nos peres, qui ont abandonné le soin de leur propre langue, pour un idiôme étranger ! […] La musique qui produisoit de si grands effets sur le Théâtre Grec, fut fort négligée des Latins, qui lui substituerent la déclamation, comme plus naturelle & plus propre que le chant, selon eux, à ces représentations ; ils ne l’employerent que comme nous, dans les intermédes, sans la lier au sujet. […] Enfin Horace, dit encore, « que les Romains avoient le génie profond, élevé & propre au tragique ; mais qu’ils craignoient le travail, & croyoient qu’il leur étoit honteux d’effacer ce qu’ils avoient une fois écrit ».

25. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — LETTRE VI. » pp. 98-114

Ces sentimens étoient-ils bien propres à disposer cette femme à une conversion miraculeuse, telle que l’Auteur l’a feint au dénouement de la piéce ? […] Les vertus vraiment chrétiennes ne sont nullement assorties au Théâtre, les Auteurs dramatiques ont été forcés de les farder pour s’accommoder au goût du Parterre, cette profanation a fait défendre la représentation des choses saintes, comme étant plus propres à scandaliser, sous ce déguisement, qu’à l’édification des fidéles. […] On pleure des infortunés que l’on ne connoît pas, qui n’existent plus depuis long-tems, que dans la mémoire des hommes, & qui peut-être n’intéresseroient pas, s’ils vivoient encore parmi nous sur la terre : tandis que l’on est tranquille sur sa propre destinée. On pourroit vous adresser, Mademoiselle, ainsi qu’à votre troupe, & à tous ceux qui accourent en foule pour vous entendre, ces paroles de l’Evangile, avec bien plus de raison qu’aux filles de Jerusalem : Ne poussez pas des gémissemens sur les autres, réunissez toute votre compassion sur vous-mêmes, & reservez toutes vos larmes pour pleurer votre propre infortune.

26. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — ESSAI SUR LES MOYENS. De rendre la Comédie utile aux Mœurs. » pp. 7-10

Ce principe nous conduit donc naturellement à reconnoître l’utilité de la Comédie, & à convenir que ce genre d’instruction est plus propre que tout autre à corriger les hommes. L’utilité de la Comédie étant reconnue, ce seroit ici la place d’examiner quelle est la forme qui lui convient le mieux pour parvenir au but qu’elle se propose de corriger les mœurs ; si la Comédie grecque étoit plus proche de la perfection morale que la nôtre, en nommant les personnes vicieuses qu’elle exposoit à la satire publique ; enfin si l’exclusion des Actrices sur les Théâtres Grecs & Romains, n’étoit pas plus propre à laisser dans l’ame des Spectateurs des impressions de vertu dégagées de tout mêlange de volupté qu’on remporte presque nécessairement de nos Spectacles.

27. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — A SA MAJESTÉ IMPERIALE ELISABETH PREMIERE, IMPERATRICE DE TOUTES LES RUSSIES. » pp. -

Parmi tous les beaux Arts que Pierre le Granda introduisit dans son Empire, cet Auguste Prince ne songea pas à y établir un Spectacle : les soins qu’il prit, soins si dignes d’un vrai Monarque, n’eurent pour objet que le bonheur du peuple innombrable qu’il gouvernait ; et sans doute le Théâtre, tel qu’il le voyait, lui parut moins propre à polir ses Sujets, qu’à corrompre l’innocence de leurs cœurs. […] J’oserais dire que l’établissement d’un Théâtre en Langue Russe, mais d’un Théâtre tel que celui dont je présente le Plan à Votre Majesté Impériale, est une entreprise digne de l’Illustre Fille de Pierre le Grand ; puisque par là elle ferait goûter de bonne heure à la jeunesse une morale sensée, propre à former de sages Politiques, d’intrépides Soldats, de bons Citoyens, des Magistrats intègres et zélés pour l’Etat.

28. (1675) Traité de la dévotion « Chapitre III. De la trop grande sensibilité aux plaisirs de la terre ; troisième source de l’indévotion. » pp. 58-65

En vérité ces âmes si remplies de la joie du monde ne sont donc pas propres à recevoir ces consolations spirituelles, et les impressions salutaires de ce divin consolateur. […] De là vient que les jeunes gens sont rarement propres pour les élévations de la dévotion. […] De là vient encore que le tempérament où le sang domine, qui est le tempérament de la joie du monde, est moins propre à la dévotion, que celui dans lequel il entre un peu de terre et de mélancolie.

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