Tous les objets qui se présentent à nos yeux peuvent exciter nos passions : donc on peut se préparer des objets exquis et recherchés avec soin, pour les exciter et les rendre plus agréables en les déguisant : on peut conseiller de tels périls ; et les comédies qui en sont d’autant plus remplies qu’elles sont mieux composées et mieux jouées, ne doivent pas être mises « parmi ces mauvais entretiens, par lesquels les bonnes mœurs sont corrompues ».
C'est pourquoi les Chrétiens ne pouvant passer toute leur vie dans l'acte de la prière, sont obligés au moins de se renouveler de temps en temps devant Dieu : et comme c'est par ces prières actuelles qu'ils entretiennent celle qui doit être toujours dans le fond de leur cœur; ils doivent éviter avec un grand soin tout ce qui peut rendre ces prières indignes d'être présentées devant la Majesté divine, ce qui les oblige non seulement d'éviter les distractions qui leur surviennent dans la prière, mais beaucoup plus les sources de distractions qui remplissant l'âme de folles pensées, la rendent incapable de s'appliquer à Dieu.
J’oserais dire que l’établissement d’un Théâtre en Langue Russe, mais d’un Théâtre tel que celui dont je présente le Plan à Votre Majesté Impériale, est une entreprise digne de l’Illustre Fille de Pierre le Grand ; puisque par là elle ferait goûter de bonne heure à la jeunesse une morale sensée, propre à former de sages Politiques, d’intrépides Soldats, de bons Citoyens, des Magistrats intègres et zélés pour l’Etat.
Le polithéisme est aboli, on n’adore plus le bois & la pierre ; mais on adore les passions, on adore les actrices, on se livre à toutes les impudicités que le théatre enseigne, réalise, présente, fait commettre par ses suppots & ses amateurs. […] Cette offre, qui présente des plaisirs en échangent d’une aumône, a été accueillie (& affichée à tous les carrefours). […] Quoique la Reine fut présente, on s’apperçut que c’étoient les doubles qui jouoient, & non les premiers acteurs : cette négligence, regardée comme un manque de respect, méritoit l’animadversion. […] Comme si ceux qui sont destinés aux lettres & aux sciences, l’ecclésiastique, l’avocat, le magistrat n’avoient pas autant & plus de besoin de bien parler, de se bien présenter, de bien sentir ce qu’ils disent, qu’un marchand, un soldat, un bourgeois. […] La fable dans le sens où on le présente aux enfans, est une action, un discours d’animaux, ou des choses inanimées, à qui on prête une raison, une langue qu’ils n’ont pas.
Peut-on après cela s’étonner assez de la sécurité de ces hommes qui se présentent aux Spectacles aussi hardiment que s’ils etoient de bronze & d’airain.
Quand ce Philosophe recommande aux Poètes, que les Héros de leurs Pièces ayent des mœurs, il ne veut point recommander qu’on ait soin de les rendre sages, vertueux ; mais qu’on les fasse parler selon l’Histoire, ou de la manière qu’ils se présentent d’abord dans un Poème.