Le véritable Oreste ; le véritable Ninus auroit-il assisté à une tragédie où l’on auroit représenté son parricide, seroit-il monté sur le théatre, en auroit-il joué le personnage ? […] Ils seroient dans l’erreur : espereroient-ils par là d’intéresser la Noblesse, & d’ennoblir leurs sujets, par la condition des personnages ? […] L’idée puérile de faire des piéces ou des rôles pour certains acteurs ou actrices ; une actrice a plu à l’auteur ; pour faire une galanterie à sa maîtresse, il n’envisage qu’elle, & fait parler son personnage, non selon le caractère qui lui est propre, mais dans le goût de son idôle ; c’est renverser l’ordre. Un acteur doit se transformer dans son personnage, & ne laisser voir que lui, & ici au contraire on transforme le personnage dans l’actrice, on ne voit que l’actrice sous l’habit du personnage. […] Les caracteres de l’action, des personnages, du denouement peuvent être diversifiés à l’infini sans cesser d’être tragiques.
une des raisons de condamner le théâtre en général ; parce que, la coutume régulièrement ne permettant pas d’y produire les femmes, leurs personnages étaient représentés par des hommes, qui devaient par conséquent, non seulement prendre l’habit et la figure, mais encore exprimer les cris, les emportements, et les faiblesses de ce sexe : ce que ce philosophe trouvait si indigne, qu’il ne lui eût fallu que cette raison pour condamner la comédie.
Or en excitant par les Comédies cette passion, on n'imprime pas en même temps l'amour de ce qui la règle: les spectateurs ne reçoivent l'impression que de la passion, et peu ou point de la règle de la passion: l'auteur l'arrête où il veut dans ses personnages par un trait de plume ; mais il ne l'arrête pas de même dans ceux en qui il l'excite.
La Parodie attaque souvent la personne même, en la contrefesant, en l’imitant au naturel ; Aristophane en a plusieurs éxemples dans ses Pièces : les masques ressemblans qu’il fesait porter à ses Personnages, pour désigner les principaux Athèniens, en sont une preuve. […] Les Auteurs se contentent bien souvent d’imiter le sujet & même la marche des Drames qu’ils parodient ; mais ils ne les copient pas si fidèlement qu’on puisse dire que leurs Ouvrages soient trop ressemblans : ils font agir des Personnages différens, qui éprouvent les mêmes situations ; en sorte qu’ils paraissent composer un Poème nouveau, lorsqu’ils ne font que le calquer sur un modèle.
Si on n’y adore plus les faux dieux, on y divinise les vices les plus honteux, on leur donne le coloris des vertus les plus sublimes ; on y avilit, on y dégrade les vertus les plus sublimes en leur faisant jouer des personnages gothiques et ridicules. […] Préférez le sentiment de ces grands personnages, qui vous conduiront dans la voie du salut, à celui de ces imprudents directeurs qui vous en éloigneraient.
L'auteur l'arrête où il veut dans ses personnages par un trait de plume ; mais il ne l'arrête pas de même en ceux en qui il l'excite.