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6. (1662) Pédagogue des familles chrétiennes « Instruction chrétienne sur la Comédie. » pp. 443-453

Apprenez m’en seulement quelques-unes en passant, puisque assurément ce ne sont pas là vos meilleurs Auteurs ? […] Ils divertissent très peu de gens sages du monde, qui en font la meilleur partie, et qui sont peu curieux de telles fadaises et impertinences : Mais seulement quelques jeunes gens, certaines femmes incapables de tout bon et sérieux entretien, et qui dès là, sont insuffisants de faire la loi aux autres. […] Néanmoins il y a toujours meilleure compagnie aux uns qu’aux autres ? Dites plus apparente, mais non pas meilleure : car tous les assistants font un pareil mal, comme étant pareillement défendu, et le nombre des fous étant infini selon l’Ecriture, principalement en semblables lieux.

7. (1726) Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat « Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat » pp. 176-194

Je sais bien qu’un nouvel Auteur peut traiter le même sujet que l’ancien, mais de peur de passer pour plagiaire, il évitera de copier les plus belles scènes et de se servir des plus beaux vers ; il fera peut-être mieux à tout prendre que l’ancien Auteur, qui a traité le même sujet, mais sa pièce aurait été beaucoup meilleure, s’il avait pu sans scrupule et sans rien diminuer de sa réputation se servir de tout ce qu’il a trouvé d’excellent dans l’ancienne pièce ; or pour cela il faudrait qu’il lui fût imposé par un prix proposé de perfectionner telle pièce, alors il ne perdrait rien des beautés de telle pièce de Corneille, de Racine, de Molière et de leurs successeurs, ou s’il se trouvait forcé de perdre quelques-unes de ces beautés, il leur en substituerait de plus grandes et y en ajouterait de nouvelles. […] Cette pièce réformée porterait le nom du Réformateur jusqu’à ce qu’elle fût elle-même un jour réformée quelques années après sa mort ; il est aisé de voir que les ouvrages excellents ne périraient pas faute de quelques retranchements et de quelques additions nécessaires pour les rendre aussi beaux et plus utiles dans le siècle suivant qu’ils l’étaient dans le siècle précédant ; car il faut toujours faire en sorte que les spectacles se perfectionnent à mesure que la raison humaine se perfectionne, et la meilleure manière d’avancer beaucoup en peu de temps vers la perfection, c’est de se servir de ce qu’il y a de bon dans les ouvrages des morts, en diminuant ou corrigeant ce qu’il y a de défectueux, et en embellissant ce qu’il y a de beau. […] C’était un grand Peintre ; mais comme il ne visait qu’à faire sa réputation et sa fortune à force de plaire aux spectateurs, et comme il ne se souciait point du tout du but de la politique qui est d’inspirer aux citoyens par des traits de ridicule le mépris et l’indignation que méritent les vices et les défauts, il négligeait fort l’utilité publique pour ne songer qu’à son utilité particulière, aussi nous ne voyons pas que nos mœurs soient devenues beaucoup meilleures dans le fond depuis la représentation de ses comédies, je ne sais même si à tout peser on ne trouverait pas le contraire. […] Si dès à présent on établit dans un grand Etat un Bureau pour diriger les spectacles vers les mœurs désirables de la société, si par les prix qu’elle distribuera aux Poètes qui plairont le plus et qui dirigeront le mieux leurs ouvrages vers la bonne morale, il arrivera avant trente ans que les pères et les mères les plus sages mèneront leurs enfants à la Comédie comme au meilleur Sermon, pour leur inspirer des sentiments raisonnables et vertueux, il arrivera que dans toutes les villes, de trente mille habitants il y aura aux dépens du public des théâtres et des Comédiens, afin qu’avec peu de dépense les habitants médiocrement riches puissent assister au spectacle, et l’on verra ainsi le plaisir contribuer au bon gouvernement, ce qui est le sublime de la politique ; car qu’y a-t-il de plus estimable que de mener les hommes par le chemin des plaisirs innocents et actuels, à une diminution de peines, et même à d’autres plaisirs futurs, la nation se polirait de plus en plus jusques parmi le peuple, les sentiments de vertu entreraient avec le plaisir dans les cœurs des Citoyens, et par le perfectionnement de nos mœurs, la société deviendrait tous les jours plus douce, plus tranquille et plus heureuse, et c’est le but que je m’étais proposé dans ce Mémoire.

8. (1665) Réponse aux observations touchant Le Festin de Pierre de M. de Molière « Chapitre » pp. 3-32

On a beau lui dire que, puisqu’il ne doit pas répondre à la candeur publique, il devrait laisser à nos évêques et à nos prélats le soin de sanctifier nos mœurs, il soutient que c’est le devoir d’un chrétien de corriger tous ceux qui manquent, et sans considérer qu’il n’est pas plus blâmable de souffrir les impiétés qu’on pourrait empêcher que d’ambitionner à passer pour le réformateur de la vie humaine, il vient de composer un livre où il se déclare le plus ferme appui et le meilleur soutien de la vertu. […] Car me soutiendrez-vous que c’est par charité que vous l’accusez de piller ses meilleures pensées, de n’avoir point l’esprit inventif et de faire des postures et des contorsions qui sentent plutôt le possédé que l’agréable bouffon ? […] Vous auriez bien plus meilleure grâce de blâmer un sentiment criminel et des lâches transports que vos oreilles avaient entendus, que l’impiété de ce fils, que vous connaissiez pour imaginaire et pour chimérique. […] Car vous m’avouerez, quelque scrupuleux que vous soyez, que vous ne trouvez rien à reprendre dans la réception qu’on fait à Monsieur Dimanche : il n’est pas plus tôt entré dans la maison qu’on lui donne le plus beau fauteuil de la salle, et quand il est près de s’en aller, jamais homme ne fut prié de meilleure grâce à souper dans le logis.

9. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [P] » pp. 441-443

[P] Parade, espèce de Farce, originairement préparée pour amuser le Peuple, & qui souvent fait rire, pour un moment, la meilleure compagnie. […] On pourrait reprocher avec raison aux Italiens, & beaucoup plus encore aux Anglais, d’avoir conservé dans leurs meilleures Comédies trop de Scènes de Parades ; on y voit souvent règner la licence grossière & révoltante des anciennes Comédies, nommées Tabernaires (ou de Taverne).

10. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE VII. Histoire de la Poësie Dramatique moderne. » pp. 176-202

Cette Piéce où l’on trouve du vrai Comique, est peut-être la plus ancienne & la meilleure de toutes. […] Les Hollandois ont traduit aujourd’hui toutes nos meilleures Piéces, qui font l’ornement de leur Théâtre : les Anglois constans à admirer Shakespear, ne nous envient pas nos richesses Poëtiques. […] Le stile ampoullé de Dryden, & le brillant de Delfino devoient écarter de l’Angleterre & de l’Italie le goût de la belle Nature ; mais enfin nos Tragédies mieux connues, forcerent ceux qui les méprisoient, à prendre une route meilleure que celle qu’ils avoient tenue jusqu’alors. On doit placer l’Epoque d’un meilleur goût en Angleterre au Caton d’Addisson, & en Italie à la Mérope de M. […] Le Prologue composé par l’illustre Pope, qui est à la tête du Caton, prouve que cette Piéce (quoique très-éloignée de la perfection) fut l’époque d’un meilleur goût.

11. (1825) Encore des comédiens et du clergé « DISCOURS PRELIMINAIRE. » pp. 13-48

Ce n’est qu’en les démasquant qu’on pourra corriger les abus et les vices, qu’on rendra les hommes meilleurs, et qu’on parviendra à enchaîner l’inexorable intolérance politique et religieuse qui aime à s’abreuver de sang humain. […] Les souverains devenus meilleurs en pratiquant eux-mêmes la morale, auront les yeux ouverts sur leurs véritables intérêts. […] C’est par de telles raisons que la société des jésuites veut à tout prix se charger d’instruire les hommes, non pour les éclairer, mais pour les tromper, sans les rendre meilleurs, et enfin pour les démoraliser. […] N’est-ce pas là la meilleure manière de triompher des arguments irrésistibles auxquels il n’y a pas de réponse ? […] Les lumières ne peuvent que les rendre meilleurs, et les empêcher de tromper les hommes ou d’être la dupe de leur crédulité.

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