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3. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE IV. La Tragédie est-elle utile ? Platon condamne toute Poesie qui excite les Passions. » pp. 63-130

Platon condamne toute Poesie qui excite les Passions. […] Une Tragédie de cette Nature, excitant en moi la plus grande émotion qu’elle puisse exciter, est plus parfaite que celle qui n’en excite pas une si grande, parce qu’elle va jusqu’au but qu’elle se propose, qui est d’exciter la plus grande émotion. […] Les excite-t-elle pour les purger ? […] Plutôt que de lui faire dire que la Tragédie purge les Passions qu’elle excite, M. […] La Tragédie excite la crainte & la pitié, pour purger en nous toutes nos Passions.

4. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — CONCLUSION, de l’Ouvrage. » pp. 319-328

J’ai toujours pensé que le Théâtre était plus propre à exciter les passions qu’à les corriger, comme ses Protecteurs le prétendent. […] Tout Spectacle public excite quelqu’impression dans l’âme. Un Carrousel excite le courage : une course de Chevaux la curiosité et l’émulation : un Bal fait naître des mouvements différents selon les dispositions des Spectateurs : un Feu d’artifice excite la joie : une Pompe funèbre la tristesse, et ainsi des autres. Le Spectacle du Théâtre est le seul qui embrasse et qui excite toutes les affections et toutes les passions du cœur humain ; il y a telle représentation qui inspire la joie, la tristesse, la colère, l’amour, les larmes et les rires ; et tous ces mouvements s’emparent bien souvent dans un seul jour du cœur des Spectateurs, jusqu’à leur faire sentir toutes ces différentes impressions à la fois. […] Je crois donc qu’il faut convenir que si le Théâtre excite toutes les passions, jamais, ou rarement du moins, il parvient à en déraciner quelqu’une ; et comme la passion de l’amour est la plus dangereuse, parce qu’elle est la plus séduisante, je crois qu’il est absolument nécessaire de réformer le Théâtre en ce point, comme je l’ai dit tant de fois, et comme je me flatte même de l’avoir prouvé.

5. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  TABLE DES CHAPITRES. » pp. 3-4

Platon condamne toute Poësie qui excite les Passions. […] Aristote exhorte les Poëtes à exciter la Crainte & la Pitié qui sont, selon lui, les deux Passions essentielles à la Tragédie. […] Aristote a-t-il pu penser que la Tragédie excite la Crainte & la Pitié, pour purger ces deux Passions ? […] La Tragédie dont la fin est d’exciter deux Passions qui peuvent rendre les Hommes meilleurs, ne devient dangereuse que par la faute des Poëtes, & la nature des Représentations.

6. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — VIII.  » p. 462

Que ceux et celles qui ne sentent point que les Romans et les Comédies excitent dans leur esprit aucune de ces passions que l'on en appréhende d'ordinaire ne se croient donc pas pour cela en sûreté, et qu'ils ne s'imaginent pas que ces lectures et ces spectacles ne leur aient fait aucun mal. […] Dieu attache quelquefois le salut de certaines personnes à des paroles de vérité qu'il a semées dans leur âme vingt ans auparavant, et qu'il réveille quand il lui plaît, pour leur faire produire des fruits de vie; et le diable de même se contente quelquefois de remplir la mémoire de ces images sans passer plus avant, et sans en former encore aucune tentation sensible ; et ensuite, après un long temps, il les excite et les réveille sans même qu'on se souvienne comment elles y sont entrées, afin de leur faire porter les fruits de la mort, « ut fructificent morti », qui est l'unique but qu'il se propose en tout ce qu'il fait à l'égard des hommes. L'on peut donc dire à ceux qui se vantent que la Comédie et les Romans n'excitent pas en eux la moindre mauvaise pensée, qu'ils attendent un peu, que le diable saura bien prendre son temps quand il en trouvera l'occasion favorable.

7. (1675) Traité de la comédie « IX.  » pp. 284-285

Que ceux donc qui ne sentent point que les Romans et les Comédies excitent dans leur esprit aucune de ces passions que l'on appréhende d'ordinaire, ne se croient pas pour cela en sûreté, et qu'ils ne s'imaginent pas que ces lectures et ces spectacles ne leur aient fait aucun mal. […] Dieu attache quelquefois le salut de certaines personnes à des paroles de vérité qu'il a semées dans leur âme vingt ans auparavant, et qu'il réveille quand il lui plaît, pour leur faire produire des fruits de vie: et le Diable se contente aussi quelquefois de remplir la mémoire de ces images, sans passer plus avant, et sans en former encore aucune tentation sensible ; mais ensuite, après un long temps, il les excite et les réveille sans même qu'on se souvienne comment elles y sont entrées, afin de leur faire porter des fruits de mort, « ut fructificent morti », qui est l'unique but qu'il se propose en tout ce qu'il fait à l'égard des hommes. L'on peut donc dire à ceux qui se vantent que la Comédie et les Romans n'excitent pas en eux la moindre mauvaise pensée, qu'ils attendent un peu ; que le Diable saura bien prendre son temps quand il en trouvera l'occasion favorable.

8. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XIV. La fréquentation des spectacles ne peut se concilier avec la vie et les sentiments d’un véritable chrétien. » pp. 118-132

N’est-ce pas là que, par des peintures vives qu’on y fait, les passions s’excitent dans notre âme, et que le cœur, bientôt capable de tous les sentiments qu’un acteur exprime, passe tour à tour de la tristesse à la joie, de l’espérance à la crainte, de la pitié à l’indignation ? […] N’admire-t-on pas un auteur, qui, employant toute la force de son génie à représenter quelque grande passion, sait vous amener insensiblement et par degrés jusqu’à exciter en vous cette passion qu’il a voulu dépeindre ? […] Il ferma constamment les yeux pendant le spectacle ; mais tout à coup, sur la fin, un cri extraordinaire frappa ses oreilles et excita sa curiosité : il ouvrit les yeux. […] Il est donc manifeste que la représentation de ces passions agréables les excite naturellement, ne fût-ce qu’en nourrissant la concupiscence qui en est la source ; ce n’est pas tout, elle apprend encore à les satisfaire. […] Un chrétien, dont le principal soin doit être de triompher des penchants qu’il a promis solennellement de combattre, et qui ne peut être chrétien qu’à ce prix, peut-il, non-seulement les exciter et les nourrir, mais appeler à son secours des maîtres également entendus à les exciter et à les faire naître ?

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