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17. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre IV. Christine de Suede. » pp. 111-153

A moins qu’on ne dise que par un excès d’humilité, elle chargeoit son portrait comme on l’a dit de plusieurs Saints, mais il est vrai que les œuvres attestent la sincérité du pinceau. […] Voltaire trouve mauvais qu’on s’arrête à l’extérieur, il le répéte dans les mêmes termes sur Jacques II, Roi d’Angleterre qui ne prévenoit pas en sa faveur, mais il est difficile de n’en être pasfrappé, sur-tout dans Christine qui portoit les choses à l’excès. […] Le thème en trois façons, leur excès même les décredite ; d’autres Savans l’ont louée en Grec, en Hébreu, en Espagnol, en Allemand. […] Il y en a cinquante encore pleines de fadeurs, que leur excès même rend ridicule : Pictoribus at que Poetis quidlibet audendi semper suit æqua potestas. […] On cria de tous côtés, la foi du Roi devint suspecte ; pour écarter ces soupçons & prouver son attachement à l’Église Catholique, le Roi attaqua les Huguenots, & signala son zèle contr’eux, l’objet de son zèle étoit très-louable, l’excès de son zèle Christine le trouve déplacé, & croit qu’il est peu efficace.

18. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — TROISIEME PARTIE. — Tragédies à conserver. » pp. 128-178

En effet, rien n’est plus capable de nous inspirer une crainte salutaire de l’amour que les excès et les transports effrénés où cette passion entraîne les trois principaux Acteurs de la Tragédie d’Andromaque ; et leur misérable sort devient une excellente leçon pour nous corriger par les impressions de la terreur. […] Nous ne pourrions pas de nos jours proposer de pareils modèles ; ou, du moins, nous ne devrions jamais le faire, parce qu’ils blesseraient nos mœurs : aussi la Tragédie de Phèdre est elle du nombre de celles que je rejette : mais, dans Andromaque, il ne s’agit que d’un amour tout naturel, et qui, eu égard aux personnes et aux circonstances, n’a rien en soi de criminel ; cependant cette passion, toute simple qu’elle est, se trouve portée à un tel point de violence, dans Pyrrhus et dans Hermione, qu’elle produit tous les excès que nous voyons. […] C’est de dessein prémédité que j’ai gardé la Tragédie de Brutus pour la dernière de celles que j’examine dans l’idée de les conserver sur le Théâtre de la réforme : et je répète que je l’ai fait de dessein prémédité ; ayant voulu terminer cet article par un exemple remarquable des excès de la passion d’amour ; car ces excès fidèlement représentés sont selon moi presque aussi utiles pour corriger les mœurs que la peinture des faiblesses de l’amour me paraît capable de les corrompre. […] Après cette espèce de protestation, je dirais que le Brutus de M. de Voltaire me paraît composé précisément comme il doit l’être, pour nous fournir l’exemple d’un amour capable de corriger et d’instruire En effet, l’amour violent de Titus et de Tiberinus, tous deux fils de Brutus, pour Julie fille de Tarquin, est porté à un tel excès dans cette Pièce, qu’il mérite d’être présenté aux Spectateurs ; afin que chacun d’eux conçoive une juste horreur pour une passion capable d’entraîner après elle tant de crimes et tant de malheurs.

19. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre II. Est-il du bien de l’Etat que les Militaires aillent à la Comédie ? » pp. 20-34

Croira-t-on l’excès du désordre que rapporte Salvien (L. […] Il faudrait, ajoute-t-il, pour représenter ce spectacle, les tragédies d’Echyle et de Sophocle, encore même ne pourraient-elles pas atteindre à l’excès de ces maux : « Quæ Carthaginenses passi sunt Æschilis et Sophoclis tragediis egerent, atque horum quoque linguam vinceret malorum magnitudo. » Cette ville si puissante, si riche, qui a longtemps disputé à Rome l’empire du monde, qui a mis Rome à deux doigts de sa perte, qu’à peine Rome a pu vaincre après trois grandes guerres, est aujourd’hui le jouet des barbares : « Illa a Romanis vix capta, quæ cum maxima Roma de principatu certaverat, eamque in summum discrimen deduxerat, modo facta est ludibrium barbarorum. » Ses célèbres Sénateurs, errants et fugitifs dans toute la terre, attendant pour vivre quelque aumône des gens charitables, arrachent les larmes des yeux, et présentent le plus triste tableau de l’instabilité des choses humaines : « Orbe toto errantes, vitam ex hospitalium manibus sustentantes, cient spectantibus lacrimas, et rerum humanarum instabilitatem declarant. » Cet Auteur ajoute que peu de temps auparavant, les habitants de Trèves, après avoir vu trois fois piller, saccager et brûler leur ville par les Francs, eurent la folie de demander des spectacles pour toute consolation et tout remède à leurs maux : « Quis æstimare hoc genus amentiæ possit qui excidio superfuerant quasi pro summo deletæ urbis remedio, circenses postulabant ?  […] Parmi tant d’autres excès qu’on reproche à Néron, on ne lui pardonne pas d’avoir méprisé les bienséances, jusqu’à faire jouer des comédies par des Chevaliers et des femmes de bonne famille. […] Une ordonnance de nos Rois qui en défendant ces excès, les supposerait, serait peu honorable à nos troupes.

20. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Disseration sur la Condemnation, des Théâtres. — Chapitre XII. Que la représentation des Comédies et Tragédies ne doit point être condamnée tant qu'elle sera modeste et honnête. » pp. 237-250

Il propose comme une grande difficulté dans l'instruction qu'il nous donne touchant la modestie, « Que les Histrions semblent pécher contre cette vertu par l'excès du divertissement, en ce qu'ils n'ont point d'autre pensée en toute leur vie que de jouer. De sorte que si cet excès est un péché, les Histrions devraient être toujours dans un état de péché mortel, comme aussi tous ceux qui se divertiraient par leur entremise, ou qui soutiendraient cet art par leurs libéralités.

21. (1694) Réfutation des Sentiments relâchés d'un nouveau théologien touchant la comédie « Réfutation des sentiments relachés d'un nouveau Théologien touchant la Comédie. » pp. 1-190

Vous prétendez que les Pères n’ont condamné que ces excès, et non pas la Comédie prise en elle même, c’est-à-dire, purgée de ces excès. […] D’ailleurs qu’était-il nécessaire que vous découvrissiez par les moyens dont vous vous êtes servi, les excès que les Pères condamnaient ? […] Ce qui fait voir que Saint Charles ne croyait pas, comme vous, que ces Pères n’eussent déclamé que contre les excès et les infamies des Spectacles des anciens, puisque sans doute ces excès ne duraient plus du temps de Saint Charles. […] Et puisqu’il ne condamnait pas les Spectacles seulement à cause des excès, mais parce qu’il voyait qu’en cela les Chrétiens ne vivaient pas conformément à leur état et à leur vocation ; souffrez que pour la même raison je condamne les vôtres, quoiqu’ils soient exempts des excès des Anciens. […] C'est ce que l’on peut dire en général des Jeux défendus, dans lesquels on doit toujours considérer l’excès et le scandale.

22. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE VIII. Sentiment de S. Thomas. » pp. 178-198

Thomas décide qu’il peut y avoir de l’excès dans les divertissemens même innocens, & qu’alors ils deviennent des péchés. […] Si quelqu’un donne dans l’excès, c’est sans doute les Histrions, qui y passent leur vie. […] Qu’on cherche la moindre preuve de gravité dans ces bouffonneries, ces ris immodérés, cet excès de passion, cette ivresse de plaisir, ce ravissement du chant, cet éblouissement des décorations, cette espèce d’extase où l’homme hors de lui-même, absorbé dans ces objets, n’est occupé que de ce qu’il voit, ce qu’il entend, ce qu’il sent dans ces momens de plaisir : Gravitas totaliter relaxatur. […] Qu’on réunisse toutes ces conditions, qu’il n’y ait rien de mauvais, d’indécent ou de dangereux, jamais d’excès ni dans la chose ni dans l’affection qu’on y a ; que la gravité chrétienne la modestie, la piété s’y conservent ; qu’on ne se le permette que comme un besoin, un soulagement à la foiblesse humaine ; qu’on se traite comme les enfans, à qui on permet des récréations, mais sans excès, sans danger, sans indécence ; qu’on n’y souffre rien que de convenable aux temps, aux lieux, aux caractères des personnes, aux jours de fête & de pénitence, & on verra que si ce Saint paroît, dans la spéculation d’une abstraction métaphysique, avoir quelque légère indulgence pour le spectacle en général dans sa nature, personne n’en est en effet un censeur plus sévère dans la réalité & la pratique, où jamais ne sont ni ne peuvent être observées les sages loix qu’il a prescrites.

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