Voilà l’erreur : d’un exercice académique, qui doit être renfermé dans l’enceinte d’un collège, on veut faire un spectacle, et d’un Ecolier un Comédien.
Ajoutons à cela que la coutume n’est autre chose qu’une ancienne erreur, si elle n’est fondée sur la justice et sur la vérité. « Consuetudo sine veritate vetustas erroris est », dit Saint Cyprien.
Ce trait de l’imagination de Corneille est admirable ; parce que le Spectateur est instruit qu’ils sont tous les deux dans l’erreur, et qu’ils pourraient s’aimer et s’épouser sans scrupule.
Il savait qu’une erreur ancienne devient sacrée ; qu’avec de l’esprit, on peut faire goûter aux hommes quelques vérités ; mais qu’avec plus d’esprit encore, on s’abstiendrait de les leur découvrir toutes : il savait que ces préjugés de naissance, que cette chimère, plus ridicule que celle des Fables, née de l’orgueil, nourrie par la flatterie, défendue par l’opinion, et couverte du voile épais des siècles, ne pouvait être attaquée impunément : il savait que les Grands lui pardonneraient de peindre leurs vices et leurs ridicules, et non de les dépouiller d’un éclat étranger, mais imposant, qui leur tient lieu du mérite qu’ils n’ont pas : il savait enfin qu’on aimait le merveilleux au théâtre, et c’est peut-être ce qui l’a déterminé à donner au vertueux Dom Sanche un père couronné.
Ces Princes, entêtés de l’erreur des Iconoclastes,2 permettoient que des Bouffons, revêtus d’habits Episcopaux, fissent mille indécences.
Le beau moyen d’éviter l’impureté, que d’exposer des actions sales ; & d’enseigner la vérité, que d’embellir l’erreur & faire valoir des sophismes !