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52. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VII. Est-il de la bonne politique de favoriser le Théâtre ? » pp. 109-129

Ce Prince sentait vivement les désordres d’un spectacle auquel il avait souvent assisté, et quoique époux de la nièce du Cardinal Mazarin, qui avait toujours favorisé le théâtre, il eut le courage de le combattre au milieu d’une Cour qui le goûtait avec le plus de passion. […] ), après avoir décrit au long la frivolité, les désordres, les passions, les fureurs des hommes de qualité, prétend que le théâtre en est la cause et le fruit. […] Trajan en supprimait autant qu’il pouvait ; Alexandre retrancha les libéralités des Empereurs aux Comédiens ; Marc-Aurèle n’écoutait pas même quand il y était, il y lisait ses lettres, et écrivait ses dépêches : ils regardaient les spectacles, comme les académies de jeux, des lieux de prostitution, qu’on est quelquefois obligé de tolérer, malgré leur infamie et leur désordre. […] Quoique l’art du théâtre soit opposé aux bonnes mœurs, et que la vie licencieuse des Comédiens soit incapable de réforme, la sage antiquité a cru devoir leur donner un modérateur, pour empêcher qu’ils ne tombent dans un entier désordre. […] Un Praticien et un Consul petits-maîtres avaient fait du désordre au spectacle (ce qui n’est pas rare).

53. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE VI. De l’indécence du Théatre. » pp. 114-137

On sent bien que les théatre des provinces, moins rafinés, moins polis, plus mal composés, doivent être plus grossiers ; il est inutile d’insister sur leurs désordres, personne ne prend leur défense. […] Non seulement il avoue, mais il prouve par le détail le plus circonstancié des faits & des personnages, qu’il y règne un très-grand désordre. […] Distinguons avec eux l’idolâtrie, qui déshonoroit les théatres Payens, des autres désordres inséparables de ces jeux pernicieux, donnés par des ames basses, corrompues & mercenaires, qui font métier de la licence, & fréquentés par des libertins & des impies qui y apportent, y pratiquent, y enseignent le vice, & convenons avec tous les Pères qu’il doit être proscrit sans réserve. […] Avant même les Empereurs Romains, c’est-à-dire avant le regne de la licence théatrale, tandis que la République avoit encore des mœurs & de la décence, sous les yeux de ces sages Consuls qui en soûtenoient la majesté, de ces austères Censeurs qui en prévenoient & punissoient si sévèrement le désordre, on tenoit le même langage. […] Ces vieillards trompés, ces jeunes gens amoureux, ces filles séduites, ces valets si lestes pour servir les amours de leurs maîtres, cet amas de toute sorte de désordres, étalés sur la scène pour l’éducation publique, avec tout l’agrément dont on peut s’aviser, faut-il pour le trouver, remonter au temps de ce Poëte astronome ?

54. (1772) Réflexions sur le théâtre, vol 9 « Réflexions sur le théâtre, vol 9 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE NEUVIEME. — CHAPITRE I. Réformation de Moliere. » pp. 4-28

Ce ne sont ni les Femmes savantes, ni les Précieuses ridicules, ni le Malade imaginaire, qui nuisent ; ce sont les fripons, les libertins, les gens durs, injustes, violens, dont il faudroit purger la terre ; ce sont ces femmes hardies qui par leurs désordres enseignent à leur sexe que la pudeur est ignoble & puérile ; ces brillantes débauchées, à qui l’on pardonneroit peut-être de ruiner les fortunes, si elles ne détruisoient pas les sentimens ; ces Actrices corruptrices de la jeunesse, ces mères étrangères à leur famille, ces marâtres qui dépouillent leurs premiers enfans, ces intrigantes qui trafiquent de leurs charmes pour faire monter l’ignorance & le vice aux grandes places. […] Si Moliere devoit être étonné de quelque chose, c’est de l’immense progrès que la comédie a fait faire aux désordres publics. […] Voilà des désordres dont les comédies de Moliere ont un peu arrêté le cours, car pour la galanterie, les fourberies, l’envie, l’avarice, la vanité, & autres crimes semblables, il ne faut pas croire qu’elles leur ayent fait grand mal. […] La jeunesse, effrayante par ses excès & la bassesse des sentimens, qui ne fait rougir de ses petitesses ni de ses désordres, ne peut pas plus supporter la pedanterie de la scene que celle des gens de bien qu’elle fuit. […] Le siecle d’Horace permettoit la gaieté de la satyre ; les désordres étoient moins sérieux.

55. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE IV. Traité de la Danse de Cahusac. » pp. 76-104

Il est une ressemblance plus déplorable, le désordre qui y règne, les crimes qui s’y commettent, la liberté, ou plutôt la licence de faire sous le masque tout ce que la passion inspire. […] L’Eglise voyant les désordres & les crimes de la danse sacrée, fut obligée, pour extirper le mal, d’oser avec outrage la défendre absolument. […] Des danses profanes seront-elles plus exemptes de désordre que ne l’ont été les danses sacrées ? […] Ces désordres furent si grands que Tibère fit fermer les théatres, & chassa les danseurs. […] A son tour la bonne chère, le vin, la gaieté, le désordre aimable du repas, échauffoit la danse & la tendoit plus vive, plus folle, plus licencieuse.

56. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE PREMIER. Peinture & Sculpture. » pp. 4-40

Ce seroit arrêter un désordre par un autre désordre, mais moins funeste & moins criminel. […] Une Reine de Pegu pour arrêter le désordre des hommes, ordonna aux femmes de paroître devant eux dans l’état où l’on présente les statues. […]  155 regarde l’indécence des peintures comme un des plus grands désordres qui soient dans le monde, formata adulteria, titulata incesta, simulucra fornicationis in imaginibus & picturis. […] Au lieu de punir un si grand désordre, qui ne choque pas moins la nature que la vertu, les Dieux, dit-on, écouterent la priere de Pigmalion, & animant la statue en firent une vraie femme, qu’il épousa. […] Chaque actrice est une nouvelle Flore, qui s’en donne les couleurs, en étale l’indécence, & en imite les désordres.

57. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — LETTRE V. » pp. 82-97

C’est surtout à l’occasion du Théâtre que l’on voit régner aujourd’hui le désordre prédit par Saint Paul : la saine doctrine devient importune, on la rejette avec mépris, & l’on choisit en sa place des maximes agréables ; on prend pour guides des maîtres dont les idées sont plus assorties au penchant de la nature. […] L’harmonie des Vers, les agrémens de la Poesie concourent à faire goûter les hommes vicieux que l’on produit sur la Scéne, à ennoblir leurs désordres & leurs excès, à les imprimer plus fortement dans la mémoire.

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