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87. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE II. Le Théâtre purge-t-il les passions ? » pp. 33-54

Je plains les Auteurs et les Acteurs des tragédies pleines d'horreur qui font agir et parler des gens qu'on ne peut écouter ni voir sans souffrir. […] Qui les écouterait, s'ils venaient à visage découvert annoncer leurs mauvais desseins ? […] Un Comédien qui ne dirait que des obscénités et des impiétés, serait-il écouté ?

88. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE IV. Suite des effets des Passions. » pp. 84-107

Elles ont leurs Prêtres et leurs Prêtresses qui entretiennent leur culte avec le plus grand zèle, des Prédicateurs pleins d'esprit et de talents qui en débitent la morale et lui gagnent une foule de prosélytes, des Dévots innombrables qui viennent assidûment l'écouter et la mettent fidèlement en pratique, et dans leur sainte impatience vont dans des chambres pratiquées à dessein autour du Temple en faire dévotement les exercices. […] du moins n'est-il pas permis d'écouter celle-ci, même par jeu. […] De là tant de gens s'ennuient au spectacle, courent sur le théâtre, voltigent dans les loges et les coulisses, n'écoutent pas, s'en vont à la moitié de la pièce ; les aliments simples à peine les effleurent, il faut piquer le palais par des liqueurs fortes.

89. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XXX. Profanation du dimanche : étrange explication du précepte de la sanctification des fêtes. » pp. 109-116

Après tout, que sert aux comédiens et à ceux qui les écoutent, qu’on leur laisse libre le temps de l’office ?

90. (1698) Mandement de Monseigneur l’Illustrissime et Révérendissime Evêque d’Arras au sujet des Tragédies qui se représentent dans les Collèges de son Diocèse [25 septembre 1698] « Mandement  » pp. 37-43

Ce sont les règles de l’Evangile et les Saints Canons que l’Eglise nous a donnés, qu’il faut écouter et qu’il faut suivre.

91. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre IV. Le Peuple doit-il aller à la Comédie ? » pp. 60-74

« C’est par là que Molière illustrant ses écrits, Peut-être de son art eût emporté le prix ; Si moins ami du peuple en ses doctes peintures, Il n’eût point fait souvent grimacer les figures, Quitté pour le bouffon l’agréable et le fin, Et sans honte à Térence allié Tabarin. » M’écouterait-on, si je représentais que l’esprit d’irréligion, si funeste à tout le monde, et si commun au théâtre, se répand plus facilement dans le peuple, moins en garde contre la séduction, moins en état d’en repousser les traits et d’en démêler les pièges, lui dont la piété moins éclairée et plus simple confond aisément les objets, tient beaucoup plus à l’extérieur, et par conséquent peut être ébranlée à la moindre secousse, surtout quand on lui arraché les appuis nécessaires de l’instruction et des exercices de religion, en substituant le spectacle aux offices, et lui faisant oublier dans ses bouffonneries le peu qu’il sait de catéchisme, qu’on l’éblouit par le faste du spectacle, qu’on l’amollit par les attraits des Actrices, qu’on le dissipe par la science du langage ? […] C’étaient des femmes qui se présentaient au public dans un état indécent : qu’on regarde, ou plutôt qu’on ne regarde pas nos Actrices, qu’on n’écoute pas leurs conversations, qu’on ne suive pas leurs démarches, on rougirait des Majuma Français, célébrés, non au mois de mai, mais toute l’année.

92. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE IV. La Tragédie est-elle utile ? Platon condamne toute Poesie qui excite les Passions. » pp. 63-130

Les Lacédémoniens ne voulurent jamais écouter ni Tragédie ni Comédie, disant qu’il n’étoit pas permis d’entendre même par amusement, ceux qui contredisoient les Loix. […] Ecoutez & vous jugerez si j’ai raison. […] Nous les écouterons très-volontiers, & nous croirons gagner beaucoup, si avec le plaisir, nous trouvons encore en elle cette utilité qu’ils prétendent. […] Mais si elle ne peut nous persuader de cette utilité, nous l’écouterons, mais avec toute la précaution nécessaire, & après nous être fortifiés contre ses enchantemens par toutes les raisons que nous venons de dire, de peur de retomber encore dans cette passion que nous avons eue pour elle dans notre jeunesse, & que le commun des hommes a toujours pour elle. Et nous demeurerons fermes dans l’opinion qu’on ne doit point se livrer à elle, ni l’étudier comme quelque chose de serieux & de conforme à la vérité ; mais qu’il faut au contraire que tout homme qui craint de voir troubler l’œconomie de son ame soit en garde contre elle, & ne l’écoute qu’avec crainte.

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