Si l’on ne trouvait au Spectacle Moderne du Sublime & de grandes beautés, irait-on quarante fois à la même Pièce ? […] Pourquoi ne mettrions-nous pas sur le Théâtre des Artisans, des Manœuvres, puisqu’il nous est permis d’y placer des Domestiques, qui sont souvent le plus bel ornement des Pièces ? […] Ce que dit Horace dans un endroit de sa fameuse Épitre à Mécène, qu’on qualifie du nom de Poètique, achevera de montrer qu’une Pièce de Théâtre n’est point toujours méprisable, quoique son stile soit très souvent bas & commun. […] « Une pièce de Théâtre, dit Aristote, doit pour être bonne remporter les suffrages des savans & des ignorans6. » Les Drames du Spectacle dont je parle, ont le bonheur de satisfaire à ces conditions. […] Il fait perdre insensiblement le goût que nous avions pour les Pièces de Corneille & de Molière ; les Comédiens ne s’en appercoivent que trop.
Les plus belles pièces le trouvent froid et insensible, si le piquant assaisonnement du burlesque, des équivoques, des lazzi, ne viennent le réveiller. […] La Basoche ne joua d’abord que des pièces innocentes, et se fit supprimer par ses excès. […] De plus de trente pièces qu’il a données, à peine y en a-t-il cinq ou six de raisonnables, tout le reste n’est que farce. […] C’est lui dont le mauvais goût refroidit les talents, défigure les Acteurs, fait souvent au gré du caprice tomber les meilleures pièces et réussir les plus mauvaises. […] N’est-ce pas encore le peuple qui fait tout le désordre au parterre, qui excite les querelles, interrompt les Acteurs, siffle les pièces, contre lequel il a fallu tant de punitions et de règlements de police ?
Cette façade avait à ses extrémités, deux petites aîles en retour, qui terminaient cette partie ; de l’une à l’autre de ces aîles s’étendait une grande toile, à-peu-près semblable à celle de nos Théâtres, & destinée au même usage, mais dont le mouvement était différent ; car au lieu que la nôtre se lève au commencement de la Pièce, & s’abaisse à la fin de la Représentation, parce qu’elle se plie sur le ceintre, celle des Anciens s’abaissait pour ouvrir la Scène, & se levait dans les Entr’actes, pour préparer le Spectacle suivant, parce qu’elle se pliait sur le Théâtre ; de manière que lever & baisser la toile, signifiaient précisément le contraire de ce que nous entendons aujourd’hui par ces termes. […] C’était un grand espace vide au devant de la Scène, où les Acteurs, venaient jouer la Pièce ; & qui par le moyen des Décorations, représentait une Place publique, un simple carrefour, ou quelqu’endroit champêtre, mais toujours un lieu à découvert ; car toutes les Pièces des Anciens se passaient au dehors, & non dans l’intérieur des maisons, comme la plupart des nôtres. […] Si nous remontons aux Grecs mêmes, nous trouverons d’abord que jusqu’à Cratinus, leurs Théâtres, ainsi que leurs Amphithéâtres, n’étaient que de charpente ; mais un jour que ce Poète fesait jouer une de ses Pièces, l’Amphithéâtre trop chargé se rompit & fondit tout-à-coup. […] Ceux qui servaient d’ornement, étaient les plus riches ; & ceux qui spécifiaient la Scène, présentaient toujours quelque chose de la Pièce qu’on jouait. […] Ce qui était autrefois l’objet des premiers Magistrats ; ce qui fesait la gloire d’un Archonte Grec, & d’un Edile Romain, j’entens de présider à des Pièces Dramatiques avec l’Assemblée de tous les Ordres de l’Etat, n’est plus que l’occupation lucrative de quelques Citoyens oisifs.
Boursault, ceux qui ne les auront pas vu représenter, n’auront qu’à dire la même chose de leurs Pièces, que vous dites de celles des anciens. […] J’avoue avec vous que les Pièces de Théâtre sont présentement aussi épurées qu’elles l’aient été dans un autre temps. […] Mais si je conviens avec vous que les Pièces de Théâtre sont présentement plus châtiées qu’elles n’étaient autrefois, il faut que vous demeuriez d’accord avec moi, que plus une Pièce est modeste et honnête dans la Poésie, plus on la gâte et plus on la corrompt dans la représentation par les gestes et les postures. […] Quelle instruction, à votre avis, peut-on tirer de ces sortes de Pièces ? […] Mais tant qu’on ne représentera sur le Théâtre que des Pièces pleines de sentiments d’amour impur, de haine, de vengeance et d’ambition, etc. la fin de ces Pièces sera d’inspirer ces mêmes sentiments à ceux qui les verront représenter ; et ce ne sera pas par hasard que leurs passions seront excitées.
« Que les tragédies et les comédies qui ne doivent être faites qu’en latin, et dont l’usage doit être très rare, aient un sujet saint et pieux : que les intermèdes des actes soient tous latins et n’aient rien qui s’éloigne de la bienséance, et qu’on n’y introduise aucun personnage de femme ni jamais l’habit de ce sexe. » En passant, on trouve cent traits de cette sagesse dans les règlements de ce vénérable institut : et on voit en particulier sur le sujet des pièces de théâtre qu’avec toutes les précautions qu’on y apporte pour éloigner tous les abus de semblables représentations, le meilleur est, après tout, qu’elles soient très rares. […] Ils savaient trop, que qui veut plaire, le veut à quelque prix que ce soit : de deux sortes de pièces de théâtre, dont les unes sont graves, mais passionnées, et les autres simplement plaisantes ou même bouffonnes, il n’y en a point qu’on ait trouvé dignes des chrétiens, et on a cru qu’il serait plus court de les rejeter tout à fait, que de se travailler vainement à les réduire contre leur nature aux règles sévères de la vertu. Le génie des pièces comiques est de chercher la bouffonnerie : César même ne trouvait pas que Térence fût assez plaisant : on veut plus d’emportement dans le risible ; et le goût qu’on avait pour Aristophane et pour Plaute, montre assez à quelle licence dégénère naturellement la plaisanterie. […] Le licencieux grossier et manifeste est demeuré dans les farces, dont les pièces comiques tiennent beaucoup : on ne peut goûter sans amour les pièces sérieuses : et tout le fruit des précautions d’un grand ministre qui a daigné employer ses soins à purger le théâtre, c’est qu’on y présente aux âmes infirmes des appâts plus cachés et plus dangereux.
Les Docteurs en Théologie de Paris qui ont vu l’exposé ci-dessus, sont d’avis qu’on ne peut accorder les Sacrements à ceux qui jouent, ou qui font jouer la Comédie intitulée le Festin de Pierre, ils les en croient indignes, comme gens qui servent à entretenir le crime ; car ç’a toujours été une doctrine constante dans l’Eglise, que nul Chrétien ne peut ni représenter, ni même assister comme simple spectateur à la représentation des Pièces de Théâtre qui sont remplies d’intrigues amoureuses et d’impiété. […] 5. « Si la Pièce renferme, dit-il, des choses déshonnêtes et lascives, les Acteurs et les spectateurs pèchent mortellement, parce que c’est prendre plaisir dans les choses déshonnêtes, et s’exposer volontairement à une chose très dangereuse. […] Cette Pièce ne saurait donc être trop censurée, et il est indubitable qu’on ne peut sans un très grand péché jouer en public pour divertir les spectateurs une Pièce qui afflige tous ceux qui ont de la piété et qui aiment Dieu. […] Ajoutons, dans le cas dont il s’agit, dans l’interdiction de l’impiété de cette Pièce, qui semble n’avoir été composée que pour déshonorer la Religion.
Nous avons vu dans le premier livre combien la religion alarmée lançait d’anathèmes sur le théâtre, jusques dans les pièces où il semble que par respect la scène ait emprunté d’elle la matière. […] Les jeux publics étaient chez eux des actes de religion que leur superstition leur rendait aussi nécessaires que la sainteté de notre morale nous les fait regarder comme dangereux ; car pour les pièces dramatiques qui n’étaient que de pur amusement, elles furent toujours, comme remarque Tertullien, blâmées par les Censeurs et par le Sénat. […] Lorsque les Italiens et les Anglais apprennent que nous flétrissons de la plus grande infamie un art dans lequel nous excellons, qu’on excommunie des personnes gagées par le Roi, que l’on condamne comme impie un spectacle représenté dans des couvents, qu’on déshonore des pièces où Louis XIV et Louis XV ont été acteurs, qu’on déclare œuvre du démon des pièces reçues par des Magistrats et représentées devant une Reine vertueuse, quand des étrangers apprennent cette insolence et ce manque de respect à l’autorité royale, cette barbarie gothique, qu’on ose nommer sévérité chrétienne, peuvent-ils concevoir que nos lois autorisent un art déclaré infâme, ou qu’on ose couvrir d’infamie un art autorisé par les lois, récompensé par les Souverains, cultivé par les plus grands hommes, et qu’on trouve chez le même Libraire l’impertinent libelle du Père le Brun à côté des ouvrages immortels de Corneille, Racine, Molière ?
Une de nos espèces d’Automates, sans aucun fonds propre, Dogmatistes, Formalistes, Compilateurs et Dissertateurs, qu’on nomme Savants, se sont arrogés le droit de donner des préceptes sur un Art qui n’a de loi que la nature : ils ont jeté les Auteurs dans un labyrinthe de règles embarrassantes et ridicules : ils leur ont mis des entraves jusqu’à la façon de rendre leurs idées ; continuellement resserrés et contraints dans la froide et pénible méthode, le but leur échappe : cette méthode, si étrangère aux passions, produit quantité de petites beautés de détail, mais qui ne sortant pas essentiellement du sujet, forment un ensemble de pièces de rapport, sans force, et incapable de causer de grandes émotions. Après avoir fini l’ouvrage, il faut l’aller présenter à l’assemblée des Acteurs, avoir le talent de leur plaire, se soumettre à tous leur caprices, refondre les rôles principaux à leurs volontés, chacun exigeant le sien suivant son talent, n’importe le caractère total de la Pièce. […] Je crois que le but digne de la Tragédie, est d’élever notre âme par des vertus mâles, de la rendre amoureuse du beau, de lui donner de l’émulation par des exemples d’un aimable héroïsme, et de la tirer enfin d’un certain engourdissement qui n’est à présent que trop général ; je voudrais qu’une Pièce de Théâtre engageât par amour-propre chaque Auditeur à être aussi honnête homme que Scipion, à être aussi constant qu’Hannibal. […] Son Brutus est une Pièce qui marquera à jamais le génie admirable de l’Auteur.
Quoique Plaute soit celui des deux qui ait le plus donné dans le vice des Atellanes, il y a deux de ses Pièces toutes entières dans le goût de la bonne Comédie : Les Captifs et le Trinummus : on n’a qu’à les examiner, et les mettre vis-à-vis de la plus modeste Comédie du Théâtre moderne ; et l’on verra, à notre honte, combien le Poète Payen l’emporte sur nous : tout y respire la censure du vice, et il n’y a rien qui favorise la corruption des mœurs. […] Si la Pièce de Molière, où ce caractère est représenté, ne corrige pas les Avares, qui, de peur de se reconnaître, éviteront sans doute d’aller au Spectacle lorsqu’on la jouera ; du moins on peut espérer qu’elle jettera dans le cœur des jeunes gens des semences d’horreur et d’aversion pour l’avarice qui les disposeront à se garantir de ce vice : et c’est là le grand bien que l’on doit attendre de cette Comédie. […] Quand même l’effet de cette Pièce serait assuré par rapport au vice de l’avarice ; quand même on supposerait qu’elle doit faire une égale impression sur l’esprit de tous les jeunes gens, (et il pourra s’en trouver plusieurs pour qui l’avarice aura de l’attrait, malgré le tableau affreux qu’on leur en aura présenté) il n’en est pas moins incontestable que le mauvais exemple des deux enfants de l’Avare est un poison mortel pour la jeunesse, devant qui cette Pièce est représentée : les jeunes personnes de l’un et de l’autre sexe n’effaceront jamais de leur esprit ni de leur cœur les idées et les sentiments que les enfants de l’Avare y auront gravés ; et ils s’en souviendront jusqu’à ce qu’ils aient fait l’essai d’une leçon si pernicieuse.
Montausier étoit trop grand & trop vertueux pour aimer le théatre, il le méprisoit souverainement : un jour que Louis XIV lui demandoit son sentiment sur une pièce où ce Prince étoit fort loué. […] toute intrigue n’est-elle pas une comédie, & qu’est-ce qu’une pièce sur la scène ? Que la représentation de la pièce jouée dans le monde ? […] Cyr, & delà dans toutes les Communautés de Filles du Royaume, & même leur en fournir la matière par les pièces qu’elle a fait composer & celles qu’elle y a fait représenter sous ses yeux ; la fête de Namur en fut le prologue, elle étoit infiniment moins dangereuse que les pièces données à St. […] C’est une critique ingénieuse de bien des pièces où l’amant vient en effet je ne sais comment.
Quoique la Lettre fut anonyme, le nom de l’Auteur des Pièces de Théâtre, fit jeter les yeux sur les Théatins, et le titre de Théologien illustre par sa qualité et par son mérite, annonça le P. […] Boursault, et la même personne qui l’a publiée, y a joint une courte Préface, où il fait l’éloge de cette Pièce, quoiqu’elle fournisse de grandes preuves de l’ignorance de son Auteur ; et il parle avec mépris des réponses à cette Lettre. […] Le troisième Discours sur les Pièces de Théâtre tirées de l’Ecriture Sainte, qui paraît ici pour la première fois, fut prononcé en 1695. à Saint Magloire à l’occasion de la Judith, Tragédie de M.
Rousseau, que dans ces pièces le crime est toujours puni, et la vertu récompensée. […] Jourdain. « Ce personnage , dit-il, est l’honnête homme de la pièce. […] » Que penser de cette pièce ? […] Quelles sont les pièces morales qui nous ennuient ? […] Rousseau : et c’est là surtout ce qui cause son déchaînement contre les pièces de théâtre où l’amour domine.
Après ce beau galimatias qui ne conclut rien, ce charitable donneur d’avis veut, par un grand discours fort utile à la religion et fort nécessaire à son sujet, prouver que les pièces de Molière ne valent rien, pource qu’elles sont trop bien jouées et qu’il sait leur donner de la grâce et en faire remarquer toutes les beautés. […] Vous voyez par là que je ne dois pas seulement défendre la pièce de Molière, mais encore le plus grand, le plus estimé et le plus religieux monarque du monde. […] Il dit, par une adresse aussi malicieuse qu’elle est injurieuse et à la qualité et au caractère de Monsieur le Légat, qu’« il semble qu’il ne soit venu en France que pour approuver les pièces de Molière h ». […] Enfin Molière est un impie, cet Observateur l’a dit : il faut bien le croire, puisqu’il a vu une femme qui secouait la tête, et sa pièce ne doit rien valoir, puisqu’il l’a connu dans le cœur de tous ceux qui avaient mine d’honnêtes gens. […] Cette pièce comi-tragique finit presque par ces belles remarques, après avoir commencé par la farce et par les noms de ceux qui ont réussi en ce genre d’écrire et de ceux qui ont bien représenté ces ouvrages.
Les pièces comiques et risibles rejetées par les principes du même Platon. […] D’ailleurs les pièces comiques étant occupées des folies et des passions de la jeunesse, il y avait une raison particulière de les rejeter ; « de peur, disait-il, qu’on ne tombât dans l’amour vulgaire »De Rep. 10.
Les Conférences ne sont-elles pas des dialogues comme nos Pièces ? […] Les Collèges, une fois l’année, donnent des pièces. […] Il composa plusieurs Pièces de Comédie qui lui acquirent une grande réputation. […] C’est ce qui a commencé les Pièces de Caractère, même sect. p. 175. […] Cette Pièce mérita à l’Auteur une Pension du Roi, de mille liv.
Les Ecoliers qui jouent des pièces dans les collèges, ne sont pas à la rigueur dans le cas de l’irrégularité ; c’est un genre de spectacle fort différent, quoique dangereux, et qui devrait être supprimé. […] Mais les jeunes gens et les compositeurs des pièces ont plus étudié Molière que les canons. […] Cette loi au contraire paraît dire qu’il faut en faire métier ou habitude : question superflue ; qui peut compter les pièces que joue un Acteur, et les péchés qu’il fait commettre ? […] C’est moins le théâtre d’une pièce dramatique que le théâtre des plus dangereuses pompes du monde, des plus redoutables tentations du démon, des plus grandes faiblesses de la chair. […] Cette pièce, en constatant le fait, découvre l’irréligion de l’Auteur, et celle que le théâtre inspire.
Le châtiment est l'affaire d'un moment, c'est le dénouement de la pièce, dont l'idée à peine saisie est effacée dans l'instant par la farce qui suit. Celle de l'intrigue a duré toute la pièce, et a eu tout le temps de se graver profondément. […] que l'origine de la division des pièces de théâtre en cinq actes vient des cinq sens, et la division en trois actes des trois puissances de l'âme. […] Toute la pièce est un conflit de vice et de vertu, jusqu'au dénouement, toujours incertain, où quelque crime est enfin puni. […] Mais qui viendrait à des pièces où on ne verrait que des vertus ?
Or, que leur apprend la pièce ? […] Que leur montre-t-elle encore, cette pièce si courue ? […] Il s'agit ici de la pièce de François de Neufchâteau. […] NDE Pièce de Diderot de 1758. […] NDE Ce sont des pièces de L.
Ils récitaient et représentaient des pièces de théâtre, la plupart tragiques et imaginaires, dans lesquelles ils peignaient de grandes actions ; ils en composaient des tableaux frappants, capables d’émouvoir leurs spectateurs. […] Ils s’étaient constitués vrais comédiens, en obtenant la permission de jouer leurs ouvrages, qui étaient déjà connus sous le nom de pièces de moralité. Dans ces pièces, ils y personnifiaient les vertus et les vices. Ils y joignirent des farces, qui étaient des pièces satiriques contre des personnages respectables par le rang et la naissance.
L’action de la Pièce était un Vieillard amoureux : le Courtisan s’y trouva peint d’une manière à ne pouvoir se méconnaître ; et, surtout lorsqu’il entendit, sur la Scène, la lecture des Lettres qu’il avait lui-même écrites à sa Maîtresse, il en fut si honteux, qu’il renonça dans le moment, et pour toujours, à sa passion. […] [NDA] On pourrait répondre que ces avantages se trouvent, pour la plus grande partie, dans les Pièces comiques du Théâtre Français, surtout dans les Pièces de caractère ; mais, en supposant même que ces caractères soient traités d’une manière propre à la correction des mœurs, il sera toujours vrai de dire, par les raisons que nous avons déjà expliquées dans le premier Chapitre de cet ouvrage, que ces mêmes Pièces sont ternies et en quelque sorte dégradées par mille traits de licence et de corruption ; en sorte que, si elles contiennent quelque instruction, elles renferment infiniment plus de mauvais principes et de dangereux exemples.
Les deux Pièces de Corneille èxceptées, ses prémiers Drames sont remplies d’un comique, tirant beaucoup sur le burlesque. […] La Pièce intitulée le Triomphe de l’Amour 50, jouée en 1681, est un époque remarquable dans l’histoire du grand-Opéra. […] La Pièce lyrique où l’on voit agir des Hèros & des Dieux, n’emporte pas moins le nom de Pastorale ; il suffit que le lieu de la Scène soit champêtre, ou que quelques-uns de ses Acteurs soient d’un rang subalterne. […] Dans une année on voyait sur son Théâtre jusques à trois & quatre Pièces nouvelles : une pareille attention à réveiller la curiosité du Public, ne contribua pas peu à ses succès. […] La Scène lyrique n’a point tout-à-fait cette èxcuse à alléguer ; & pourtant les Pièces qu’on lui destine ne sont rendues publiques qu’après des longueurs infinies.
— 145, ligne 2, après le mot Comédie, mettez un (*), & au bas de page, ajoutez en note : (*) Il vient de paraître un second Volume du Nouveau Théâtre Anglais, par madame Riccoboni, contenant trois Pièces, la Fausse-délicatesse, la Femme-jalouse, & l’Il-est-possédé : les deux premières sont des chefs-d’œuvres dignes de notre Théâtre. […] Quant à la Femme-jalouse, on ne peut se lasser de la relire : quel effet cette Pièce n’aurait-elle pas, si la Représentation l’animait ?
Mais, en supposant que les gouvernements ne puissent pas sans danger supprimer les théâtres, ni en diminuer le nombre, chose qui ne paraît pas croyable, ne courent-ils pas des dangers infiniment plus grands en s’exposant aux atteintes mortelles que leur portent chaque jour des pièces vraiment immorales, qui, à la faveur du plaisir qu’elles procurent, font couler dans l’âme des spectateurs le poison des plus désolantes doctrines, et qui, par des allusions perfides et adroitement ménagées auxquelles l’art des acteurs ajoute encore un merveilleux relief, ne sont propres qu’à nourrir et à fortifier cet esprit d’insubordination qui de nos jours a fait tant de ravages, et qui est encore bien éloigné d’être entièrement anéanti ? […] Quand même ces pièces de théâtre ne contiendraient rien de formellement séditieux, ne suffit-il pas, pour nuire au bonheur et à la stabilité des gouvernements, qu’elles aient une teinte irréligieuse et libertine, et qu’elles insinuent dans les cœurs la mollesse et la volupté ? S’il est vrai, comme on ne peut en douter, que tout ce qui concourt à l’abolition des principes religieux et moraux, concourt également à la destruction des empires, ne s’ensuit-il pas évidemment que ces pièces de théâtre, en établissant le règne des sens sur les débris de la morale, minent et corrodent les fondements de l’édifice social, lui creusent un abîme profond vers lequel elles le poussent insensiblement, et qui finira par l’engloutir, si la main puissante de Dieu ne vient à son secours ?
Ce n’est pas qu’on y jouât alors comme parmi nous, les passions des jeunes gens : nous avons vu à quel rang on les reléguait ; mais c’est en général, que des pièces d’un si grand mouvement remuaient trop les passions, et qu’elles représentaient des meurtres, des vengeances, des trahisons, et d’autres grands crimes dont ce philosophe ne voulait pas que la jeunesse entendît seulement parler, bien loin de les voir si vivement représentés et comme réalisés sur le théâtre. […] , que « l’action suit de près le discours, et qu’on se laisse aisément gagner aux choses dont on aime l’expression »: maxime importante dans la vie, et qui donne l’exclusion aux sentiments agréables qui font maintenant le fond et le sujet favori de nos pièces de théâtre.
On n’est pas tout d’un coup en état de composer des Pièces pour le plus fameux de nos Spectacles. […] Lisez attentivement les Auteurs qui ont parlé avec succès de ce qu’il faut observer dans les Pièces de Théâtre ; ne vous éfforcez pas de les suivre à la lettre : le nouveau Spectacle auquel vous déstinez vos talens, permet à ses Poètes de prendre quelques libértés, c’est du moins ce que nous montre la plus-part de ses Drames. […] Quoi, s’attachera-t-il à des Pièces dénuées de graces, & dont la composition ne lui paraît plus qu’un jeu d’enfant ! […] « Voulez-vous copier la Nature, (dit Horace dans son Art Poétique,) étudiez-là dans le cœur & dans les mœurs mêmes des hommes de différens états ; tous les traits que vous tirerez alors d’après elle, seront des traits vifs & animés8. » Ces paroles semblent avoir été faites en faveur des Poètes qui se destinent à la composition des Pièces du nouveau genre. […] Il éxige des compositeurs de Drames, qu’ils s’imaginent être les personnages mêmes de leurs Pièces.
J’ai répété quelques endroits des Rôles du matin ; j’y ai ajouté les meilleurs scènes de ma troisième Pièce : je m’enhardissais : tous les sentimens que je rendais étaient dans mon cœur, & je les rendais bien. […] On devait donner dans quelques jours, une des Pièces que j’avais apprises : Mademoiselle *** proposa de m’y faire débuter, de l’annoncer au Public le jour même ; & ce fut une chose décidée. […] … Après la Pièce, Mademoiselle *** prévint mes desirs, par le soin qu’elle prit de me dérober aux empressemens de mes admirateurs. […] Un jour, qu’elle est au Théâtre, où l’on doit représenter une Pièce qu’elle avait apprise, il se répand que la *** ne jouera pas ; qu’une indisposition subite l’en empêche. […] Elle lui dit qu’une curiosité fort naturelle à son âge, lui avait fait desirer de voir les Pièces qu’on donnait, & dont elle avait entendu parler avec éloge.
On fit retomber sur lui l’excommunication lancée contre les Farceurs et les auteurs de leurs Pièces. […] A l’égard des Pièces qu’on devrait représenter, je voudrais que l’on soumît à une exacte censure tous les Ouvrages de Théâtre, tant anciens que modernes. […] On ferait une édition de toutes les Pièces telle qu’il serait permis de les jouer ; et les Troupes de Province, seraient obligées de s’y conformer sans réserve. […] Je voudrais qu’à l’avenir, ce même Corps fut chargé de l’approbation des Pièces nouvelles, auxquelles depuis longtemps les Examinateurs ordinaires ne font pas une assez grande attention. […] L’un des deux Théâtres de Comédie, ne pourrait jamais jouer que des Pièces en Vers, l’autre serait uniquement destiné à la Prose.
» Thespis lui répondit qu’il était permis de mentir pour le divertissement des autres : « Nous verrons, répliqua Solon, si nos lois jugeront de pareils jeux dignes de récompense et d’honneur. » Solon lui défendit en effet de jouer ses pièces à Athènes. […] Il ne leur donna ni or ni argent, mais seulement quelques pièces de monnaie de cuivre : il ne souffrit jamais à sa table les jeux scéniques. […] Le principal personnage de cette pièce est un nommé Patelin ; ses fourberies, ses impostures et ses intrigues étaient si connues, qu’on en fit le sujet d’une pièce de théâtre. […] « Le luxe, dit Mézerai, qui cherchait partout des divertissements, appela du fond de l’Italie une bande de comédiens dont les pièces, toutes d’intrigues, d’amourettes et d’inventions agréables pour exciter et chatouiller les douces passions, étaient de pernicieuses leçons d’impudicité.
Et c’est ici, concluent enfin ces Messieurs, où il faut remarquer l’injustice de la grande objection qu’on a toujours faite contre cette pièce ; qui est que décriant les apparences de la vertu, on rend suspects ceux qui outre cela en ont le fond aussi bien que ceux qui ne l’ont pas ; comme si ces apparences étaient les mêmes dans les uns que dans les autres ; que les véritables dévots fussent capables des affectations que cette pièce reprend dans les hypocrites, et que la vertu n’eût pas un dehors reconnaissable de même que le vice. […] Il examine mûrement les choses, et conclut à la désolation commune, que « le fourbe étant armé de toutes ces différentes pièces régulièrement, peut les perdre de toute manière », et que c’est une affaire sans ressource. […] Achevons notre pièce en deux mots, et voyons comme les caractères y sont produits dans toutes leurs faces. […] Cela est si vrai, et telle est la force de la prévention, que je croirais prouver suffisamment ce que je prétends, en vous faisant simplement remarquer que les raisonnements de Panulphe, qui sont les moyens qu’il emploie pour venir à son but, étant imprimés dans l’esprit de quiconque a vu cette pièce, comme ridicules, ainsi que je l’ai prouvé, et par conséquent comme mauvais moyens ; naturellement parlant, toute femme près de qui on voudra les employer après cela, les rendra inutiles en y résistant, par la seule prévention où cette pièce l’aura mise qu’ils sont inutiles en eux-mêmes. […] En fait, l’auteur de la Lettre aborde « le fond de la question » dans la relation de la pièce, où il rend compte des arguments des « intelligents », des détracteurs et des défenseurs, à l’occasion de passages précis.
les Pièces de Racine. […] C’est une de ces Pièces qui ne peuvent que déranger des têtes foibles, & troubler de jeunes cœurs. […] Les beautés de détail sont dans cette Pièce d’un ordre supérieur. […] Ne seroit-ce point la Pièce que Racine s’est attaché à versifier avec le plus de force & de correction ? […] On a dit plus haut tout ce qu’il y avoit à dire sur ces deux Pièces.
S’ils avaient une autre fin, choisiraient-ils pour héros de leurs pièces, pour leurs personnages favoris des libertins et des Athées ? […] Dans L’Amour sans Intérêt, Valentin est le héros de la pièce ; s’il est permis de lui donner un si beau nom. […] De ces règles qu’il prescrit au Chœur nous pouvons conclure son opinion touchant la pièce même. […] Le Mufti badine dans cette Pièce sur sa Religion et fait à des canailles une pointilleuse harangue. […] Milord Salisbury achète certes à bon compte l’Epître Dédicatoire de cette Pièce.
Je n’ignore point combien le prémier est estimable par la délicatesse, l’élégance de son stile, & les beautés qu’il répand dans ses productions ; l’autre par l’art avec lequel il peint la Nature ; le troisième par plusieurs pièces charmantes, sur-tout par l’Ecole de la jeunesse, où l’on voit des Scènes dignes de la bonne Comédie, remplies de sublime & de pathétique. […] Je me suis attaché particulièrement aux Pièces qu’ils nous ont donné, parce que la réputation dont elles jouissent, les beautés qu’on y admirait, en rendaient les défauts plus dangereux, & mettaient ces mêmes défauts dans le cas de trop séduire les jeunes Poètes.
Déclaration de Louis XIII, Concernant les pièces jouées par les Comédiens, Du 4 Avril 1641. […] J’ai remarqué au Titre du respect dû aux Eglises, que l’Ordonnance du 24 Juillet 1728 défend d’afficher aux portes des Eglises des pièces de théâtre, à peine de destitution. […] Valère Maxime ne vouloit pas que les femmes assistassent à la représentation des Pièces galantes. […] « du côté de la politique, à se rendre de plus en plus sevère sur le choix des Sujets ; 2°. du côté de la conscience, à maintenir les Règlemens déja établis, lesquels consistent à ne point permettre de Pièces tirées des Ecritures-Saintesa, ainsi que plusieurs Magistrats s’en sont déja déclaré ; 3°. à mettre ordre à la conduite des Acteurs & des Actrices, qui éclateroit trop, comme on en a vû plusieurs exemples ; à recommander enfin aux Censeurs de redoubler d’exactitude, pour ne souffrir dans les Pièces, ni impiétés, ni satyres personnelles, ni obscénités.
Mais ne m’avouera-t-on point qu’il s’y prend bien mal pour nous persuader que la véritable dévotion le fait agir, lorsqu’il traite Monsieur de Molière de démon incarné, parce qu’il a fait des pièces galantes et qu’il n’emploie pas ce beau talent que la nature lui a donné à traduire la vie des saints Pères ? […] Car quelle apparence y a-t-il qu’il paraisse à ses yeux un diable vêtu de chair humaine, parce qu’il a fait une pièce intitulée le Festin de Pierre ? […] Notre auteur trouve que la morale en aurait été bien plus belle et les sentiments plus chrétiens, si ce jeune éventé se fût retiré de ses débauches et qu’il eût été touché de ce que Dieu lui disait par la bouche de son père ; et si on lui montre qu’il est de l’essence de la pièce que le foudre écrase quelqu’un, et que par conséquent il nous faut supposer un homme d’une vie déréglée et qui soit toujours insensible aux bons mouvements, lui dont les soins ne butent qu’àb la conversion universelle nous répliquera sans doute que l’exemple n’en aurait été que plus touchant si, malgré cet amendement de vie, il n’avait pas laissé de recevoir le châtiment de ses anciennes impudicités. […] Voilà l’endroit de la pièce où vous pouviez vous étendre le plus. […] Dans toute autre matière que celle dont j’ai traité, j’aurais eu lieu d’appréhender que, comme le sentiment des ignorants est toujours différent de celui des gens d’esprit, on eût cru que Monsieur de Molière n’avait point eu l’approbation de ceux-ci, puisque je lui donnais la mienne ; mais le Festin de Pierre a si peu de conformité avec toutes les autres comédies, que les raisons qu’on peut apporter pour montrer que la pièce n’est point honnête sont aussi bien imaginaires et chimériques que l’impiété de son athée foudroyé.
Sinon un vain plaisir qui sera d’autant plus vif que la pièce tracera plus fidèlement le portrait de nos maladies secrètes, dont elle est l’attrait et la pâture, « plena, comme dit saint Augustin, fomitibus miseriarum mearum », j’avoue que l’histoire intéresse de même le lecteur dans les actions qu’elle représente, et qu’il est malaisé de lire la Romaine, sans détester les cruautés de Marius et de Sylla, la profonde dissimulation de Tibère, aimer la clémence d’Auguste, sans grossir le parti de Pompée contre César, mais quelle erreur de ne savoir pas distinguer entre l’art de décrire les méchantes actions pour en inspirer de l’horreur, et celui de peindre des passions tendres, agréables, délicates, d’une manière qui en fasse goûter le plaisir, ne doit-on pas avoir quelque honte de confondre deux choses si opposées ? Mais ne voit-on pas que dans la conclusion de la pièce le vice est puni, la vertu récompensée, que dans le corps on y sème d’excellents sentiments et des maximes que la morale Chrétienne ne désavouerait pas qu’elle contribue à bannir les dérèglements et former les mœurs. […] Si la pièce se conclut par le mariage, elle n’en est pas pour cela moins dangereuse, car quoiqu’il soit bon et louable en soi, la concupiscence qui s’y trouve jointe est sans contredit une chose blâmable et déréglée, c’est le honteux effet du péché. […] Quant aux indécences et aux libertés de l’ancien théâtre contre lesquelles on ne trouve pas étrange que les Saints Pères se soient récriés, je dirai encore à notre confusion que les tragédies des anciens Païens surpassent les nôtres en gravité et en sagesse, ils n’introduisaient pas de femmes sur la Scène, croyant qu’un sexe consacré à la pudeur ne devait pas ainsi se livrer au public, et que c’était là une espèce de prostitution, j’avoue qu’il y avait souvent de l’idolâtrie mêlée et que leurs pièces comiques poussaient la licence jusqu’aux derniers excès, mais les nôtres sont-elles fort modestes, ce que vous appelez les farces n’a-t-il rien qui alarme les oreilles pudiques ? […] Si le grossier et le scandaleux est retranché des pièces sérieuses, ou s’il y est plus finement enveloppé, elles n’en sont que plus dangereuses, parce que le poison y est mieux déguisé, et que les personnes qui ont naturellement l’honneur en recommandation, ne s’en défiant pas, y ouvrent leur cœur sans résistance.
Ce n’est point, comme était l’ancienne, une école d’impudicité ; on n’y voit ni postures ni actions indécentes, les paroles libres en sont bannies et c’en serait assez pour faire siffler et choir la pièce la plus excellente, s’il y avait, même en petit nombre, des équivoques grossières. […] La magnificence du spectacle, la parure des femmes qui s’y trouvent, la parure des comédiennes, la peinture vive des passions qu’on y représente, nommément celle de l’amour, qui règne dans toutes les pièces, sont autant d’objets dangereux qui laissent dans l’esprit et dans le cœur des spectateurs des sentiments de volupté et des impressions qui les disposent peu à peu d’abord au relâchement, ensuite au libertinage. […] Quoiqu’il ne sût ni grec ni latin, il n’avait pas laissé de faire des pièces fort estimées ; son Ésope à la cour a de grandes beautés.
PREMIER DISCOURS SUR LA LETTRE DU THEOLOGIEN DEFENSEUR DE LA COMEDIE Quel nouveau spectacle que des pièces de Théâtre soient jointes à l’ouvrage d’un Théologien ! qu’un Prêtre se montre à la tête de plusieurs Acteurs : Qu’un Religieux se charge du Prologue de la Comédie, et que ce Théologien, ce Prêtre, et ce Religieux tout ensemble fasse l’Apologie des spectacles pour ne pas priver le Public des pièces Comiques de M. […] Car si sa présence au Théâtre serait un sujet de scandale et de péché mortel, le Livre qu’il vient de mettre à la tête des pièces de Théâtre le rendrait-il moins criminel ? […] Racine ont été loués, comme, les deux Auteurs qui ont donné les pièces de Théâtre les plus chastes ; Qui est-ce néanmoins qui n’a pas loué davantage ces célébrés Auteurs, d’avoir enfin regardé ce travail comme des péchés de la jeunesse ? […] L’on peut même assurer qu’il n’y a rien de plus propre à inspirer la Coquetterie que ces Pièces, parce qu’on y tourne perpétuellement en ridicule les soins que les pères et les mères prennent de s’opposer aux engagements amoureux de leurs enfants.
S’il arrivoit qu’un Comédien, jouant une bonne pièce, ne le contentât pas, & cela arrive, il auroit donc manqué son but. […] C’est donc le goût du public qui fait le sors des pièces & des Acteurs.
Plaute, comique Latin, suivit la manière d’Aristophane ; comme Térence imita celle de Ménandre, dont il ne fut pas, comme on se l’imagine, le simple traducteur : de même qu’aujourd’hui, un Auteur Anglais qui de deux Pièces Françaises, en compose une dans le goût de sa Nation, ne peut être, sans injustice, privé du mérite de l’invention. […] Socrate, qu’Aristophane déchirait dans cette Pièce, non-seulement y était designé & nommé, mais le Comédien avait un masque qui le rendait parfaitement ressemblant au Philosophe : cet homme vertueux y assista, & se tint debout, pour prouver aux Athéniens, qu’il était impossible qu’il rougît de lui-même]. […] Les Personnages en étaient Romains ; c’était l’opposé des Palliates, ou Pièces à manteau, dont les Personnages étaient Grecs. 10. […] Ne pourrait-on pas conjecturer qu’on les y tournait en ridicule, comme les Marquis & les Petits-maîtres de nos jours le sont dans nos Pièces ? […] Aussi, dans le recueil immense de leurs Pièces, n’en trouve-t-on pas une seule dont un homme de goût soutienne la lecture.
De sorte qu’on appelle Comédien, celui qui monte sur un théâtre et qui par le Rôle, dont il s’est chargé, aide aux autres à y représenter publiquement quelque Pièce dramatique, afin de divertir le peuple, et de gagner par là de quoi subsister. […] La Salle, où ils représentaient ces Pièces, ayant été destinée pour le logement des pauvres, par Arrêt du Parlement en 1545. […] Ils ajoutent tous deux, qu’ils n’y vont que dans le seul dessein de se récréer et de se délasser l’esprit par un divertissement, qui leur paraît innocent : les Comédies d’aujourd’hui étant beaucoup châtiées et beaucoup plus sérieuses et plus honnêtes, que ne l’étaient les pièces de Théâtre des siècles passés : et qu’enfin c’est une coutume reçue dans tous les pays les mieux policés, sans même excepter Rome, où est le premier Siège de la Religion. […] Ces Religieux ont coutume de se donner trois ou quatre fois par chaque année la récréation de représenter par eux-mêmes, et entre eux seuls, dans une Salle particulière quelques pièces de théâtre sur des sujets de piété : et pour cela ils se servent des vêtements, dont on use à la Comédie et à l’Opéra, et qu’ils louent moyennant une somme qu’ils paient à celui qui les a en garde. […] qui défend aux Religieuses de faire représenter des pièces de théâtre dans leurs Monastères, bien que ce soit des sujets de piété.
Dans ce cas, il change de sentiment en apparence, et soutient que le Théâtre est épuré, et qu’il n’y a pas une Pièce qui ne tende à la correction des mœurs. Pour le prouver, il fait un grand étalage de tous les vices qui sont punis, et de toutes les passions qui sont tournées en ridicule sur la Scène ; et en conséquence il décide que de telles Pièces sont nécessaires, parce qu’elles sont instructives.
Car enfin le théâtre ressuscite et perpétue le système depuis longtemps aboli du paganisme ; on y représente les mêmes événements, les mêmes Divinités y règnent, on leur adresse les mêmes vœux, on leur offre le même culte, on leur tient le même langage ; mêmes idées, mêmes sentiments, mêmes tableaux, mêmes cérémonies, tant de pièces, de Proserpine, Amphytrion, Iphigénie, Isis, Bacchus, Atys, Cybèle, etc. […] Si nos pièces avaient été composées de leur temps, qu’aurait-on eu à y changer ou ajouter pour les jouer ? […] Il y a peu de pièces, où quelques Acteurs dans l’excès de leur rage, n’en vomissent grand nombre. Athalie, cette pièce d’ailleurs si belle, a des scènes entières où l’on ne fait que blasphémer. […] Combien même de pièces ne sont que des leçons d’irréligion !
Qu'on parcoure les tables de l'Histoire du théâtre, on verra que la plupart des titres des pièces dont on parle, même dans ces derniers temps, ne sont que des impertinences. […] Que sur mille volumes de pièces de théâtre on fasse un extrait de ce qu'il y a de bon, d'utile, de sensé, j'ose dire que ce recueil fera à peine un volume médiocre, et un millième de la matière du théâtre. On fait beaucoup valoir quelque bonne pièce où l'on parle raison, religion et vertu. […] Dans cette troupe de Comédiens on n'aurait qu'à choisir et combiner les diverses espèces de folie, on ferait aisément une pièce régulière : voilà des Acteurs tout formés qui joueraient d'après nature. Ce serait un spectacle curieux, et digne du grand Corneille et de l'incomparable Molière, qu'une pièce formée de ces divers morceaux, et une troupe composée de ces Acteurs ; on verrait que les petites maisons et l'Hôtel ont une étroite liaison.
Et dans le fait5, Saint Charlesa ayant obtenu du Gouvernement qu’on ne représentât que des Pièces qu’il eût approuvées, il n’en fallut pas davantage pour forcer les Comédiens, effrayés des conséquences de cette loi, à renoncer à tout établissement dans son Diocèse. […] Il n’excepte aucune de ses Pièces, et ne fait pas même grâce au Misanthrope. […] Je me rappelle donc que dans le cours de nos études quelques-uns de mes Camarades trouvèrent le moyen d’assister à une représentation de cette Pièce. […] C’est là cette Pièce que vous nous faites valoir comme une des plus morales et des plus intéressantes qui aient jamais paru sur aucun Théâtre du monde. […] D’après des principes si sensés, quel est mon étonnement de lire dans un Ouvrage aussi répandu que le Mercure, que Corneille, dans sa Pièce du Cid, autorise à la vérité le duel, mais « dans un Fils qui venge son Père, et qui de deux devoirs opposés choisit le plus inviolable » !
De-là il passe aux Pièces de Racine, & sa plume, conduite par le discernement & l’équité, en relève les défauts avec justesse & en fait sentir les beautés avec intérêt. […] On a joint à cette Lettre une Pièce de Vers du même Auteur, composée lorsqu’il n’avoit que dix-neuf ans.
Comme les Anciens avaient trois sortes de Pièces, de Comiques, de Tragiques & de Satyriques, ils avaient aussi de trois sortes de Scènes, c’est-à-dire, des Décorations de ces trois différens genres. […] Mais dans la Pièce Satyrique, il y avait toujours un antre au milieu, quelque méchante cabane à droite & à gauche, un vieux Temple ruiné, ou quelque bout de Paysage.
Car puisqu’il faut vous dire le vrai, autant que je peux me ressouvenir de votre dernière pièce, vous prenez le change, et vous y confondez la Comédienne avec la Comédie, que dans mes raisonnements avec le Père Massillon j’ai, comme vous savez, exactement séparées. […] Du reste, je vous abandonne le Comédien et la plupart de nos Poètes, et même Monsieur Racine en plusieurs de ses Pièces.
Ils savaient que, quand on veut plaire, on le veut à quelque prix que ce soit, et que de toutes les pièces de théâtre qui sont toujours ou graves et passionnées, ou plaisantes et bouffonnes, on n’en trouverait pas une seule qui fût digne d’un chrétien ; on a cru qu’il valait mieux détruire la comédie que de penser à la réduire, contre sa nature, aux règles sévères de la vertu. […] Les pièces sérieuses ne seraient point goûtées, si l’amour n’y jouait le principal rôle.
Les Anciens rafinoient tellement sur l’usage de la musique & des instrumens, dans les pièces Théâtre, qu’ils y préféroient les flutes, parce qu’il n’est point d’instrument qui approche plus de la parole & des mouvemens du gosier. […] De choses absolument étrangères à la Pièce. […] On entendroit une Pièce avec la chaleur & l’émotion que ces différentes divisions ont produites, & la catastrophe nous intéresseroit d’autant plus, que notre esprit auroit moins été distrait dans le cours de la représentation.
Le Public n’est jamais leur dupe : l’impression met enfin au grand jour les fautes que l’art de l’Acteur dérobait à la vue ; & l’on soutient à peine la lecture d’une Pièce qu’on ne pouvait se lasser d’entendre au Théâtre. […] Il est ridicule, par éxemple, que le même Acteur joue deux roles dans une Pièce. […] Il nous accusera de lui faire passer un simple cannevas de Pièce, ou une Pantomime, pour un Drame dans les règles.
» Il est à remarquer que La Mode cet indigne personnage, est pourtant le Héros de la Pièce. […] A la fin de la Pièce, le Poète qui parle dans le Chœur expose ces aventures tragiques, en montre l’origine, et déclare que c’est Créon même qui a été puni de la sorte pour ses hauteurs et son irréligion. […] Enfin, toute cette Pièce est si misérable qu’Heinsius soutient qu’elle n’a été composée par aucun des Sénèque, mais par quelque Auteur plus récent, et de plus basse classe. […] Mais la fin de cette Pièce est une excellente moralité. […] L’Auteur de la Pièce précédente.
Les Compositeurs de nos Pièces modernes, auraient bien sujet de se rire de leur embarras. […] J’ai senti qu’on devait travailler avec soin les Pièces du nouveau genre, que la précipitation leur nuisait, & qu’on est contraint de se hâter lentement.
En un mot, ce n’est qu’au dénouement qu’on voit avec plaisir un grand nombre d’Acteurs occuper la Scène ; l’art veut même alors qu’on fasse paraître généralement tous ceux qui ont agis dans le cours de la Pièce ; ainsi que je l’ai recommandé plus haut. […] On en voit la preuve dans le Sorcier, dans Tom-Jones, où le Théâtre est long-tems rempli de presque tous les Acteurs nécessaires à l’action de la Pièce.
Les Italiens, qui sont les premiers Comédiens du monde, n'en remplissent-ils pas moins leurs pièces ? […] L'amour est présentement la passion qu'il y faut traiter le plus à fond ; et quelque belle que soit une pièce de Théâtre, si l'amour n'y est conduit d'une manière délicate, tendre et passionnée, elle n'aura d'autre succès que celui de dégoûter les spectateurs, et de ruiner les Comédiens. Les différentes beautés des pièces consistent aujourd'hui aux diverses manières de traiter l'amour, soit qu'on le fasse servir à quelque autre passion, ou bien qu'on le représente comme la passion qui domine dans le cœur. […] Il n'y aurait que les libertins qui pussent voir les pièces déshonnêtes. […] Il faudrait un volume pour tous les exemples qu'on en pourrait donner presque dans toutes les pièces, comme il en faudrait un autre pour combattre cette passion autant qu'elle mérite de l'être.
Les Seigneurs et les Dames, les Princes et les Princesses, le Dauphin, le Roi même, montaient sur le théâtre, pour y jouer des rôles dans les ballets et les pièces qui se représentaient fréquemment. […] Le frivole talent de composer des paroles pour chacun de ces grands Acteurs, qui renfermaient leur portrait et leur éloge, relativement à la pièce, fit à peu de frais la réputation éphémère, aujourd’hui absolument évanouie, de Benserade. […] En 1670 il vit jouer la belle pièce de Britannicus ; il fut frappé du portrait que fait Racine des folies de Néron, parmi lesquelles son amour excessif pour les spectacles lui donnait le plus grand ridicule. […] Elle s’en moqua ouvertement, même en leur présence, et leur dit, que « elle serait fâchée de les avoir pour ennemis, connaissant leurs forces, mais qu’elle ne les choisirait jamais pour la confession ni pour les pièces de théâtre ». […] Tous les prologues, sans exception, ne sont remplis que de louanges les plus outrées, toutes les pièces sont dédiées à quelque Seigneur dont on élève le mérite jusqu’aux nues.
Mettant eux-mêmes en musique leurs Pièces chantantes, ils en rendraient davantage l’esprit ; ils peindraient avec plus d’énergie les sentimens qu’ils veulent donner à leurs Personnages. […] Sa Pièce du Devin de Village doit nous faire toujours désirer qu’un Poème-Lyrique n’ait besoin que d’un seul Auteur : où trouvera-t-on un rapport plus parfait, une harmonie plus complette entre les paroles & le chant ?
On doit convenir, d’après tout ce qui vient d’être dit, que les auteurs dramatiques sont des empoisonneurs publics qui se chargent d’autant de crimes que leurs pièces en font commettre, qui sont coupables d’autant d’homicides qu’il y a d’âmes perdues à leurs spectacles. […] Racine ayant reçu une éducation toute sainte se relâcha bientôt de sa première ferveur : devenu sans peine, mais malheureusement pour lui, le prince des poètes tragiques, il fit longtemps retentir le théâtre des applaudissements que l’on y donnait à ses pièces.