» Dans le second de la Cité de Dieu Chapitre 9, Saint Augustin39 parlant des Comédies en général, rapporte ce qui avait été dit autrefois par un Ancien, que jamais on ne les eût approuvées ni les crimes qu’elles représentent, si les mœurs des hommes qui étaient souillées des mêmes vices ne les eussent souffertes. […] » Dans le Concile de Tours troisième de l’année 813, Canon 750. « Les Ecclésiastiques doivent s’abstenir de tous les attraits qui flattent les oreilles et les yeux, et qui en les flattant amollissent la vigueur de l’âme, ce que l’on peut ressentir dans de certains airs de musique et dans quelques autres choses; ils doivent s’en abstenir, parce que par les charmes des oreilles et des yeux le vice entre dans l’âme. […] » Il les avait condamnés auparavant en général, quand dans le même endroit il avait dit72 : « Ces Spectacles publics doivent être abolis, parce qu’ils irritent beaucoup les vices et qu’ils sont très propres à corrompre les esprits, et bien loin de contribuer à nous faire mériter la vie bienheureuse, ils y nuisent beaucoup. […] Le temps que l’on choisit pour la représenter qui est le soir, ne contribue pas peu à favoriser le vice, de sorte que le seul péril où l’on s’expose dans ces assemblées est un motif suffisant pour les éviter. « Que l’amour du plaisir dit Tertullien76, n’ait pas plus de pouvoir sur vous que la crainte du péril qu’il y a dans sa douceur. […] Ignore-t-on que nous avons un très grand penchant au vice ?
Les comédiens ne connoissent point cette sage économie ; ils se sont d’abord chargés du loyer : la folie & le vice sont des fonds inepuisables qui fournissent à tous leurs besoins. […] Nos annales ne fournissent pas un période pareil à celui de nos jours, où le vice & l’impiété se montrent impunément, où la classe la plus vile comme la plus relevée méprisent les Loix divines & humaines. […] On porte aujourd’hui à sa mémoire & à son culte une atteinte aussi injurieuse que profâne, en faisans servir la solemnité de la fête à sa célébrité du théatre ; c’est-à-dire, au triomphe du vice, don son zele le rendit la victime. […] Tous les goûts seront satisfaits, c’est-à-dire, toutes les passions, tous les vices.
Ces trois sources empoisonnées du vice, les trois concupiscences, y jouent continuellement leur rôle, y exercent leur empire sur l’âme. […] quelles cautions de leurs mœurs et de leur religion, que des pécheurs publics, des maîtres publics du vice, qu’elle ne met point au nombre de ses membres, à qui elle ne peut accorder les choses saintes sans les profaner ! […] Que peut-il résulter de ces mariages, qu’une perpétuité de vice dans les enfants qui en naîtront, qui seront élevés dans le désordre de leurs pères ? […] Elle ne sera pas plus déshonorée quand le mariage sera déclaré nul, elle rentrera dans ses fonctions, qui n’ont été que peu de temps interrompues. » Pour répondre au mémoire injurieux qu’elle répandit contre son mari, il lui dit : « Que peut-on attendre d’une Baladine née dans le sein du vice, qui voudrait rendre égal à elle celui qu’elle veut faire passer pour son mari ?
Il faut avoir une envie étrange de se munir du nom des Auteurs graves, & de se donner des garants d’importance, pour vouloir nous persuader par l’autorité de quelques Critiques de réputation qui ont eu de l’indulgence pour Moliere, que ces vices qu’il a corrigés fussent autre chose que des maniéres extérieures d’agir & de converser dans le monde. […] Mais quand Moliere auroit été innocent jusqu’alors n’auroit-il pas cessé de l’être dès qu’il eut la présomption de croire que Dieu vouloit bien se servir de lui pour corriger un vice répandu par toute l’Eglise, & dont la réformation n’est peut-être pas même reservée à des Conciles entiers ?
On prêche aux hommes la vertu en pure perte : mais le vice n’a pas besoin de Prédicateur, il est lui-même son Evangéliste, s’il m’est permis de parler ainsi. […] Vous avez trop de piété, Monsieur, pour vouloir en dédire Saint Augustin : mais s’il m’était permis de me citer, profane que je suis, après une autorité sacrée, j’oserais vous rappeler une tirade de ma Satire, où j’ai fait voir qu’on ne va point à la Comédie pour se rendre plus vertueux ; qu’on y va seulement dans la vue d’un délassement agréable ; qu’au contraire notre orgueil se rend quelquefois plus fier par le plaisir malin que nous sentons à détourner sur le prochain la peinture des vices qui sont représentés dans les Comédies ; qu’enfin tout le fruit qu’on en retire, c’est d’apprendre le secret d’être vicieux, sans passer pour ridicule.