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157. (1738) Sentimens de Monseigneur Jean Joseph Languet Evéque de Soissons, et de quelques autres Savans et Pieux Ecrivains de la Compagnie de Jesus, sur le faux bonheur et la vanité des plaisirs mondains. Premiere partie « Sentimens de quelques ecrivains De la Compagnie de Jesus, Touchant les Bals & Comedies. Premiere Partie. — Entretien troisieme. Le danger des Bals & Comedies découvert par l’Auteur des Sermons sur tous les sujets de la morale Chrétienne de la Compagnie de Jesus. » pp. 26-56

Paul, peut servir de resolution au cas de conscience que vous me proposez ; car je veux que le bal, la comedie, & les autres spectacles de cette nature, soient comptés entre les choses indifferentes, ou qu’ils passent pour tels à l’égard de ceux qui ne courent aucun hazard d’y commettre le peché ; si neanmoins par-là l’on donne occasion aux autres, qui n’ont pas la même force, ni une vertu à l’épreuve, de s’exposer au danger d’en commettre, ne devenez-vous pas coupable du scandale que vous leur donnez, & n’êtes-vous pas responsables des pechez qu’ils y feront ? […] Car pourquoy, dira-t-on, se seroit-on un point de conscience d’assister à ces spectacles, puisque les gens d’une vertu plus reguliere, & d’une probité plus reconnuë, ne font point de scrupule de s’y trouver ? […] Les personnes mondaines, sur qui l’on ne prend point exemple, ne sont coupables que de leurs propres pechez ; mais ceux qui ont quelque reputation de vertu, ou qui ont quelque rang, & quelque authorité, servent par leur exemple de pretexte aux autres, qui pechent sur leur compte, en s’authorisant de leur nom. […] Car je veux que les comedies, ausquelles je m’arrête plus particulierement, en parlant des spectacles, que les comedies, dis-je, de ce tems, soient plus honnêtes qu’elles n’ont jamais été, cependant, ceux qui examinent les choses de plus prés, & à qui les autres vertus chrétiennes ne sont pas moins cheres que l’honnêteté, trouvent étrange qu’on les appelle innocentes, vû que le plus honnêtes ne contiennent autre chose que des passions d’ambition, de jalousie, de vengeance, de fausse generosité, & des autres vices, qui étant colorez d’une idée de grandeur d’ame, entrent facilement dans l’esprit, & ruinent tous les principes du Christianisme. […] non, encore une fois ; car comme la plûpart des veritables vertus, qui sont celles de l’Evangile, n’y peuvent trouver de place, & que ce seroit un Heros d’un caractere bien nouveau, d’y representer un homme patient, humble, insensible aux injures, & en un mot, un veritable Chrétien ; on a substitué de fausses vertus, pour exprimer, & pour exciter ces sentimens que le monde appelle nobles & genereux ; le point d’honneur, pour lequel on expose sa vie dans un combat singulier, la passion de dominer, & de s’élever par toutes sortes de voyes, des fourberies, des trahisons, des perfidies, des amitiez qui engagent dans le crime pour servir un amy ; on y voit enfin couronner le vice, authoriser l’injustice par d’illustres exemples, & les maximes les plus contraires à la Religion, passer pour de grandes vertus, & pour des exploits signalez, sans quoy le Theâtre languiroit ; il faut donc pour l’animer, y representer des choses conformes au goût & aux inclinations des spectateurs.

158. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre IX. Sentiments de S. Cyprien et de quelques autres Pères. » pp. 175-201

» Ils émeuvent les sens, flattent les passions, ébranlent la plus grande vertu. […] La vraie volupté est celle que fait goûter la vertu ; elle n’est ni périssable ni passagère. […] Dieu ne mène à la félicité que par le travail de la vertu : le démon mène à la réprobation par le chemin du vice. […] Le jugement dernier approche ; préparez-vous-y par la pratique des vertus. […] Ce Saint, entre autres ouvrages, a fait un grand Traité de morale sous le titre de Parallèles, où il compare les vertus et les vices, le bien et le mal, et s’appuie d’une multitude de passages choisis des Pères.

159. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE III. Suite du Mariage. » pp. 55-79

Non : il n’a point de comédie à jouer ; la vertu n’est pas actrice. […] Je le plains d’être si étranger sur les terres de la vertu. […] Faut-il dire de quel côté se trouve la vertu & le vice, Dieu & le démon, le paradis & l’enfer ? […] L’éducation la plus sainte avoit depuis le berceau préparé le cœur du fils, les exemples de toutes les vertus avoient constamment appuyé les leçons du père. […] La religion & la vertu n’y entrent pour rien, & jamais ne s’en mêleront.

160. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE III. Théatre de S. Foix. » pp. 52-75

Socrate, disoit-on, étoit la sage-femme de la vertu ; c’est ici la sage-femme du crime. […] Il ne présente que la vertu, ou le crime puni. […] Cette piece est une satyre des hommes dans tous les états ; mais le fond de lubricité sur lequel est semée cette broderie légère, hardie & piquante, est un écueil pour la vertu. […] Il a raison : tout ce qui sent la vertu est si traînant & si triste ! […] Mais j’ose dire que l’air de pruderie & de décence dont on veut faire honneur au théatre, n’est qu’un piege pour surprendre les simples, & un libertinage qui se joue effrontément de la vertu, & en emprunte les apparences, pour lui porter les plus funestes coups.

161. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre III. De l’Indécence. » pp. 21-58

S’il daignait m’en croire, il rejetterait loin de lui tout ce qui peut blesser la délicatesse, & révolter la vertu scrupuleuse. […] Si nous haissons la vertu, nous en chérissons au moins l’apparence. […] Vaut-il mieux plaire à des gens livrés à toutes leurs passions, plutôt qu’à des cœurs toujours remplis de la vertu ? […] Les Pièces de Théâtre sur-tout doivent-être remplies de leçons de vertus, loin de rendre le vice aimable. […] Je me suis contenté de mettre sous les yeux des Lecteurs ce qui blesse la vertu la moins rigide.

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