On dirait que mon attachement le fatigue… A ce mot, la vanité se révolte, ma fierté s’éveille, & je me sens prête à rougir de mes larmes.
Ce qu’on y veut, c’en est le mal : ce qu’on y appelle les belles passions, sontf la honte de la nature raisonnable : l’empire d’une fragile et fausse beauté et cette tyrannie qu’on y étale sous les plus belles couleurs flatte la vanité d’un sexe, dégrade la dignité de l’autre, et asservit l’un et l’autre au règne des sens.
Ce soin même que prennent les auteurs des pièces de théâtre, de couvrir leurs mensonges de l’apparence de vérité, afin qu’elles puissent être agréables rend témoignage à ce que j’avance, et prouve invinciblement que l’esprit de l’homme est créé pour la vérité ; mais cet attachement prodigieux à des fictions et à des chimères, fait voir d’autre part qu’il est devenu plus vain que la vanité, puisqu’il préfère l’image à la réalité, des mets en peinture à une viande solide, et qu’il consume misérablement ses forces et sa vigueur à poursuivre des fantômes, et courir après l’ombre de la grandeur. […] Ainsi il fait un exercice continuel d’ambition, de vanité, de fausse tendresse, de vengeance, tout est en combustion chez lui, sans qu’il en sente seulement la fumée parce qu’il en est dehors, l’appareil de son supplice y est tout dressé par le déchaînement des passions sans qu’il l’aperçoive, tout occupé qu’il est de ces aventures imaginaires qui font des plaies très réelles et très profondes dans son âme, il ne voit pas les précipices que ses ennemis lui creusent, et les chaînes qu’ils lui forgent, je pleurais, dit saint Augustin dans les Confessions, une Reine Didon qui s’était tuée par un violent transport de son amour, et je ne pleurais pas mon âme, ô mon Dieu, à qui je donnais la mort, en m’éloignant de vous sa vraie vie, par l’attachement déréglé à ces fictions dangereuses. […] , la nudité, les gestes, les airs lascifs des comédiens et comédiennes qui soit contraire à la modestie, supposé que les personnes qui y assistent ne puissent inspirer l’esprit du monde et de la vanité qui éclate dans leur parure, leurs actions, et tout leur maintien extérieur, supposé que tout ce qui s’y passe, les vers tendres et passionnés, les habits, le marcher, les machines, les chants, les regards, les mouvements du corps, la symphonie, les intrigues amoureuses ; enfin que tout n’y soit pas plein de poison, et semé de pièges, vous devez pourtant vous abstenir d’y aller, (je parle toujours avec saint Chrysostome) car ce n’est pas à des Chrétiens à passer le temps dans la joie, aux Disciples d’un Dieu homme qui n’a jamais pris sur la terre le moindre divertissement, à qui le rire a été inconnu, qui a donné au contraire sa malédiction à ceux qui rient, que l’Athlète qui étant dans la lice tout prêt d’en venir aux mains avec son adversaire, quitte le soin de le combattre pour prêter l’oreille à des folies, le démon nous attaque et tourne de tous côtés pour nous dévorer, il n’y a rien qu’il ne tente pour surprendre, il grince des dents, il rugit, il jette feu et flamme, et vous vous arrêtez tranquillement à ouïr ces extravagances, pensez-vous que ce soit par là que vous le surmonterez ?
Mézeray sur l’année 1577 rapporte qu’« Henri III avait appris de Catherine de Médicis, sa mère, à faire d’excessives dépenses, et à montrer sa somptuosité dans des pompes et des vanités qui avaient quelque air de grandeur. […] Avec ses amis et ses égaux on peut être simple et modeste ; on est ici trop mêlé avec le beau monde, pour se renfermer dans la médiocrité de sa fortune et de son état ; on rougirait de la différence, on n’épargne rien pour lutter avec eux, on goûte aisément ce qui flatte, et on se livre au luxe et à la vanité. […] Les amateurs du théâtre se distinguent aisément ; leur style, leur souris malin et caustique, leur air, leurs démarches, leur dissipation, leur licence et leur libertinage, leur mollesse et leur luxe, leur parure et leur vanité, tout les décèle.
que le dérèglement des femmes est la suite ordinaire des mariages mal assortis où la vanité a présidé ; dans Le Bourgeois gentilhomme ? […] Le plus sûr moyen de vaincre les passions, est de les combattre par la vanité ; qu’on accorde des distinctions aux Comédiennes sages, et ce sera, j’ose le prédire, l’ordre de l’état le plus sévère dans ses mœurs. […] Je ne sais si je me trompe, mais il me semble que l’éloignement où nous tenons les femmes de tout ce qui peut les éclairer et leur élever l’âme, est bien capable, en mettant leur vanité à la gêne, de flatter leur amour-propre. […] Leurs peines viennent ordinairement du cœur, les nôtres n’ont souvent pour principe que la vanité et l’ambition. […] J’en dis autant des lois somptuaires, dont il est toujours facile de maintenir l’exécution dans un petit Etat : d’ailleurs la vanité même ne sera guère intéressée à les violer, parce qu’elles obligent également tous les Citoyens, et qu’à Genève les hommes ne sont jugés ni par les richesses, ni par les habits.