[frontispice] INSTRUCTIONS sur les principales vérités de la religion et sur les principaux devoirs du christianisme Adressées par Monseigneur l'Illustrissime et Révérendissime Évêque, Comte de Toul, Prince du Saint Empire, au Clergé Séculier et aux Fideles de son Diocese, A Rouen, Chez la Veuve de Pierre Dumesnil Imprimeur Libraire, rue de la Chaîne.
puisqu’ils donnent lieu au vray zele de se ranimer en les combattant, & de faire triompher la vérité de l’erreur. […] C’est donc en vertu de sa mission & par le pur amour de la vérité, que je vais approfondir un sujet, qui jusques icy n’a esté traité qu’incidemment dans la Chaire. […] Affermissez-vous dans ses maximes saintes, & vous confirmerez la vérité que je vous prêche. […] Suivons-les, mes Freres, dans toutes ces erreurs, & servons-nous des lumiéres de la vérité, pour les détromper, s’il nous est possible ; laissant aux attraits tout-puissans de la grace la force de les toucher. […] Et nous voyons dans l’Evangile, qu’il imposoit silence au démon, qui le reconnoissoit pour Fils de Dieu, parce qu’il n’appartient pas au pere du mensonge de dire la vérité, & qu’il ne se sert même de la vérité, que pour se donner le credit d’établir l’erreur.
Quelques-uns voudraient que la présence des spectateurs fût essentiellement liée à la pièce, dans la vérité, comme dans la représentation ; mais il y a peu de Tragédie, qui ait cette exactitude ; cela était bon du temps de ces Rois populaires, qui paraissaient si souvent dans les places publiques. […] Ce n’est point un paradoxe, que le Poète doit avoir plus d’égard pour la vraisemblance, que pour la vérité trop exacte, et trop scrupuleuse. Cette maxime est incontestable : Une fausseté accompagnée de vraisemblance, et qui ne choque point la droite raison, est préférable à une vérité incroyable. […] La reconnaissance est aussi l’un des plus grands agréments de la Tragédie, et qui cause le plus de plaisir, lorsque l’esprit, trompé par l’équivoque d’un nom supposé, ou par quelque obscurité embarrassante, vient à lever ce voile, ou à développer cet embarras, qui lui cachait la vérité. […] Si la disposition du sujet, ou la vérité de l’Histoire ne permet pas au Poète de récompenser la vertu, il y faut suppléer en quelque manière par les louanges, que quelques personnages considérables de la Tragédie donnent publiquement aux actions vertueuses, qui demeurent sans récompense.
Rien n’est au-dessus de la vérité. […] Il y avoue à la vérité, que par la faute des Acteurs, des Auteurs, & des Spectateurs, le Théâtre n’est pas irreprochable ; mais il conclut, qu’il pourroit être propre à former les mœurs, & c’est, sans doute, la décision la plus favorable qui fût permise à un homme de son état. […] Un Comédien, est un Académicien, qui, sans se mêler d’enseigner les grands préceptes réservés à la Chaire de Vérité, peut, comme tous les autres Membres des Académies, prétendre à inspirer la politesse & l’honneur. […] On dira seulement, au sujet de la Morale qui y est répandue, que l’on ne croit pas qu’il y ait au monde une personne assez simple, ou environnée de gens assez simples, pour prendre des Chansons pour des vérités, que quand Quinault a dit : Est-on sage Dans le bel âge, Est-on sage De n’aimer pas ? […] Il y a encore une autre espece de Piéces, dont, à la vérité, le plus grand mérite semble être la Satyre & les Equivoques ; mais, comme elles ne paroissent pas ordinairement sur des Théâtres reglés, tout ce que l’on peut dire est que, quand elles existent, les Censeurs doivent redoubler leur attention pour les corriger.
Les libelles sur toute sorte d’objets font gémir la presse, ils se débitent rapidement, ils font la fortune des Lioraires, on se les arrache ; il y a trente ans qu’aux dépens de la religion, de la décence, de la vérité, il se débite régulierement chaque semaine dans toute la France, au vû & au sû de tout le monde, une gazette dont la malignité fait tous les frais, tout le succès & tout le mérite. […] Les gens sages, à la vérité, méprisent ces traits de malignité ; mais ils font des plaies profondes à la plûpart des hommes. […] Je ne parle que de la médisance, qui ne découvre que des vérités cachées à ceux qui l’entendent. […] méchanceté réfléchie, inexcusable, contre laquelle réclament la droiture & la vérité. Que sera-ce, si par les exagérations, les soupçons, les tours captieux, le ton de certitude, on fait glisser la calomnie jusques dans les vérités même que l’on débite ?