Il le souffre, il lui applaudit, il le caresse, lui prend les mains, l’appelle son fils. […] Le Brutus de Voltaire eût-il souffert que ses enfans maudissent les Dieux & la République ? […] Chez un peuple policé & chrétien de pareilles horreurs devroient-elles être souffertes ? […] Mais le Magistrat qui souffre qu’on les expose sur la scene, qu’on en frappe les yeux & les oreilles des citoyens, qui ne craint pas la funeste impression que cet affreux langage laisse enfin dans leur esprit & leur cœur, ce Magistrat est-il plus sage ? Est-il rien de moins sage que de souffrir un danger évident, d’ébranler la religion, & de corrompre les mœurs ?
a « Les Momeries & Bastelleries ne seront point souffertes ? […] Et les Magistrats Chrêtiens exhortez de ne les souffrir, dautant que cela entretient la curiosité, & apporte de la dépense & perte de temps. […] On y voit un vieillard, qui aïant quitté toute la honte avec ses cheveux qu’il a fait couper, se ceint d’une ceinture, s’expose à toutes sortes d’insultes, & est prest à tout dire, à tout faire & à tout souffrir. » Je ne dois pas omettre ici ce que Jean Loüis Vivez dit des mascaradesb : Voici ses termes. […] C’est en ces occasions que les yeux se trouvent aussi libres que les mains ; qu’on se sert de paroles équivoques & à double entente ; que la foule des assistans excuse quantité de choses que la pudeur ne pourroit souffrir ailleurs. […] L’Orateur Demosthéne invectivant contre les gens de la suite de Philippe Roi de Macédoine devant le peuple d’Athenes, ne leur fait point de plus grand reproche que de dire, qu’après avoir bien bû, ils ne firent nul scrupule de danser, & qu’ils chasserent de leur compagnie les personnes de probité qui y estoient, parce qu’elles ne pouvoient souffrir la danse.
L’esprit s’y apprivoise peu à peu ; on apprend à la souffrir, à en parler, & l’ame s’y laisse aller. […] Si nous avions l’idée de l’amour dans sa naturelle difformité, nous ne pourrions en souffrir la laideur. […] Si dans les Comedies & les Romans on ne parloit de la vengeance que comme d’une action basse, & si l’on n’y traitoit que de gens insensez, ceux qui se battent en duel, les mouvemens de ceux qui font de pareilles lectures, ou qui assistent à de pareils spectacles, quand ils se trouvent offensez, seroient beaucoup moins vifs qu’ils ne le sont : car ce qui les rend violens, & ce qui les porte à la vengeance, c’est la fausse opinion que donnent les Comedies & les Romans, qu’il y a de la lâcheté à souffrir une injure.
le défaut de modération dans le mouvement du corps, et les agitations indiscrètes et excessives, ne soient contraires à la raison, et par conséquent à la vertu, qui ne souffre rien de déréglé.
Et qu’il vaut mieux souffrir d’être au nombre des foux. […] Vous souffrez que la vôtre aille leste & pimpante, Vous souffrez qu’elle coure, aime l’oisiveté, Et soit des damoiseaux fleurée en liberté ; Et si vous l’épousez, vous serez complaisant Jusques à lui laisser & mouches & rubans, A courir tous les bals & les lieux d’assemblée ? […] La Bejard avoit l’ame grande ; elle assuroit qu’à l’exception de Moliere (c’est toûjours Baile), elle n’avoit souffert que des gens de qualité ; & la seule instruction qu’elle donnoit à sa fille, c’étoit de soûtenir sa noblesse, & de ne s’abandonner aussi qu’à des gens de qualité, à l’exception de Moliere. […] Ayez toûjours un grand respect pour votre mère, souvenez-vous de tout ce qu’elle a souffert & risqué pour vous, en vous portant dans son sein (discours de nourrice !).