Au surplus ; ce n’est pas seulement une irréligion, c’est encore une impolitesse extrême que de jurer sur un Théâtre public. […] Vous pouvez mettre cela en note marginale : quoique.… pour prévenir la critique, faites-le seulement avec un petit astérisque, et dites : Jéhu était jadis Cocher de Fiacre. […] condamne l’audace de Jocaste, qui semblait rejeter une faute sur l’Oracle ; quoique après tout elle n’en accusât pas Apollon, mais ses Ministres seulement.
Comment Ericie, après cinq ans seulement & demi de novitiat, peut-elle être chargée en seul de toutes les fonctions sacerdotales ? […] Ce ne sont pas seulement des portraits méprisans, des reproches amers, des invectives, des malédictions, des menaces, qui font horreur, qu’il fait vomir à la Vestale & à son amant contre le pere grand Pontife, on a encore l’audace de leur faire justifier leur insolence par des principes de morale aussi faux que scandaleux : L’injustice a brise tons les nœuds entre nous ; Sans doute l’amour seul à nos parens nous lie ; leurs bienfaits sont leurs droits.
Si, d’un autre côté, quelqu’un plus hardi voulait retrancher tout à fait l’épisode de Junie (dont en effet Racine n’avait pas besoin) en sorte qu’il ne fût point question d’amour dans cette Pièce, mais seulement de la politique de Néron, qui veut se défaire de Britannicus pour n’avoir point de concurrent à l’Empire ; le travail serait, à la verité, plus difficile ; mais aussi l’avantage en serait plus éclatant et plus sûr. […] Maxime, de son côté, aimera secrètement Æmilie comme il fait ; mais, sans laisser éclater de jalousie, il paraîtra seulement inquiet de l’intelligence qui est entre Cinna et Æmilie.
Je prie d’observer aussi que je ne me suis permis cette discussion tardive ou réchauffée sur cet auteur respectable, dont on ne peut lire les principaux ouvrages sans admiration, qu’enhardi par la pensée que malgré tout ce qui en a été dit, on pourra encore le discuter sous quelque rapport, même dans des siècles, comme nous le faisons tous les jours des anciens auteurs grecs et latins les plus fameux ; et me sentant d’ailleurs soutenu, quant au fond, par de grandes autorités, par celles de Labruyère, de Racine, du président de Lamoignon, de Bourdaloue, des savants de Port-Royal et d’autres, qui en ont parlé dans le même sens, qui ont combattu la comédie en question à sa naissance, et l’ont jugée dangereuse unanimement, par des présomptions, par des calculs de probabilité seulement, et sur qui j’ai donc l’avantage du temps, de plus longues observations, des faits, ou de raisons positives, en un mot, de l’expérience.
Si vous voulez que les Spectacles soient regardés comme une école de la vertu, & une occupation digne des honnêtes-gens, ôtez la tache qui flétrit, en France seulement ceux qui s’y consacrent par état.