C’est dans les mœurs, dans une éducation dure et sévère, dans une conscience pure et ferme, que germe la valeur et le courage7 ; le meilleur Chrétien, disoit le grand Gustave, est toujours le meilleur soldat ; et le plus mauvais de tous sera toujours celui qui, élevé dans le mépris de tous les devoirs religieux, moraux et civils, a cédé durant la flexibilité des premières années au sentiment des plaisirs sensuels, qui a dû s’en pénétrer, s’en nourrir pour en rendre l’expression avec vérité. […] Il lui faut plus d’une espèce d’étourdissement pour assurer l’heureux oubli de ses fatigues et de ses peines, et rendre à son ame diversement agitée le calme nécessaire à des opérations sages et utiles. […] Ces monstres pour abâtardir le peuple et le rendre insensible à ses maux, l’énivroient par la continuité et l’appareil des spectacles ; et l’aspect d’un mime en faveur faisoit oublier des monceaux de victimes que la cruauté immoloit tous les jours aux yeux du public…. […] Rien ne rend l’homme dur et insensible comme les impressions de luxure ; mettant sa félicité dans cette jouissance brutale, il ne voit plus dans ses semblables que des machines propres à la faire naître. — Quand le peuple romain fut rassasié de spectacles mimiques, il lui fallut des gladiateurs ; il n’y avoit plus que le sang humain et l’aspect des cadavres mutilés qui pût lui donner un plaisir sûr. — Néron, Caligula, Héliogabale n’étoient des monstres de férocité que parce qu’ils étoient des monstres d’incontinence. […] Querelle sanglante dans celui de Clermont-Ferrand, 1 Août 1780, p. 575, etc. etc.… Si les temples du Dieu vivant avoient en si peu d’années causé tant de ravages parmi les hommes ; si le fer, le feu, l’enfoncement des pavés ou la chute des voûtes y avoit fait périr à diverses reprises quelques-uns de ces Chrétiens lestes qui vont aux grandes fêtes entendre la dernière et la plus courte Messe, on les fermeroit, on les détruiroit : les plus dévots craindroient d’y entrer ; tous se croiroient dispensés de s’y rendre.
C’en est un encore, quoique moins grand, de prêter des habits pour se masquer ; on se rend responsable de toutes les suites du déguisement, qui peuvent être très-considérables, & qui le sont ordinairement. […] Il voulut vous rendre chers à la postérité, il daigna prendre soin lui-même de votre triomphe, & vous triomphâtes (on vous donna deux arbres). […] Ce ne sont que les péchés graves contre la religion, les mœurs, &c. qui rendent abominable : Non induatur mulier veste virili, nec vir veste fœminea ; abominabilis enim est coram Deo qui facit hæc. […] L’ordre de la providence fut toujours de distinguer les espèces, les sexes & les individus par des traits qui les rendissent reconnoissables. […] Il s’en fut à la fripperie changer d’habit, & sut le lendemain que la servante étoit bien malade à cause d’une visite que le diable lui avoit rendue, & qu’on disoit dans le quartier que le diable avoit emporté M.
Voudroit-on encore faire un dernier effort pour soutenir le Théâtre, & prétendre que la nécessité où nous sommes de prendre quelque délassement le rend permis ?
C’est un homme en faveur, un homme essentiel : sa politique habile aux passions des grands, a su se rendre utile. […] Rosalie est encore un effet très-stérile ; mais un jour sa beauté pourroit le rendre utile. […] La passion rend aveugle. […] L’autre danse est expressive, celle qui rend le sentiment. […] Dans l’orgueil que lui inspirent des applaudissemens, elle a confondu l’art de rendre les pièces, avec le génie qui les crée, avec le talent, peut-être non moins rare, de les apprécier.
C’est ce qui m’a porté à vous dresser ce discours, pour vous auertir de vostre deuoir, afin qu’vne salutaire instruction découure vos manquements, & remedie aux blesseures de vos ames, qui n’estants pas soignées ne guariroient pas facilement ; car plus on flatte vn mal plus on le rend incurable : Et le vice n’est iamais plus insolent que lors qu’on l’authorise ; & qu’on excuse sa malice au lieu de la chastier. […] On nourrit auec delicatesse les lyõs, les tygres, & les leopards, pour les rendre plus habiles à déchirer les hommes ; & les cruels maistres qui ont le soin de ces animaux, & qui les dressent pour le plaisir des Spectateurs, les animent au carnage par mille artifices, & taschent de les mettre dans le comble d’inhumanité, qui peut-estre leur auoit esté denié par la nature. […] Passons à ces Comediens qui remplissent la scene d’impuretez & d’ordures ; sans mentir, i’ay honte d’estre icyleur accusateur, & la bien-seance de ma profession me défend de rapporter tous leurs discours, leurs abominations, & leur adresse à bien ioüer toutes sortes de personnages, on y commet mille ordures, on y apprend les intrigues dans les amours, les détours & subtilitez des amants dans leurs poursuittes, les finesses des adulteres pour abuser, le peu de resistance des femmes pour ne l’estre pas, les lasciuetez, les petits discours, les rendez vous, les messages, toutes ces momeries authorisées de l’agreement des impudiques, & ce qui m’estonne le plus, de la presence des plus affairez, des peres de famille, qui quittent froidement leur mesnage pour se treuuer au Spectacle, pour y folastrer, pour y faire les gaillards, & pour y donner à connaistre qu’ils n’ont pas encor esteint les feux de la ieunesse, bien qu’ils ne soient la plus-part que des souches à demi pourries, des stupides, & des hommes pour beaucoup de raisons, sans pudeur & sans honnesteté : Mais ce qui est plus admirable, c’est d’y voir toutes les conditions extremement maltraitées dans les discours, & de n’y voir personne qui en témoigne du ressentiment, qui ne se treuue au Spectacle, & qui ce semble ne tiene à gloire d’y estre ioüé par des insolents. […] Les Chrestiens sont criminels s’ils ne les fuyent, il les faut abhorer, puisque tant d’impietés & de superstitions, & tout ce superbe équipage des spectacles seruent seulement à rendre l’idolatrie plus pompeuse & mieux suiuie.