Pourquoi se refuser ce que se permet tout le monde ? […] L’usure énorme qu’on prête au père, & qui n’est pas dans les mœurs ordinaires, est un grand mal sans doute ; mais l’énorme prodigalité du fils, qui pour contenter sa passion, emprunte de toutes mains, à tout prix, est un mal plus grand & plus commun, qu’on excuse pourtant sous prétexte de l’extrémité où le réduit l’avarice du père, ce qui ne l’autoriseroit pas, quand il seroit vrai, & ce qui est démenti par la piece même, où le père fournit décemment le nécessaire à ses enfans, & ne leur refuse que le superflu qu’ils voudroient pour leur vanité & leur débauche. […] Demandez si j’ai tort à tous les parens à qui les folles passions de leurs enfans causent les plus vives inquiétudes, le déshonneur, la ruine de leurs maisons ; à ces enfans eux-mêmes, lorsque leur passion rallentie ils voient l’abyme où ils se sont jetés, & sont ensuite plus délicats & plus attentifs sur le sort de leur famille, & plus fermes à refuser ce qu’ils avoient recherché avec le plus d’ardeur. […] Je sais qu’il est quelquefois des parens bizarres qui s’opposent à des mariages convenables ; mais pour un père de déraisonnable, il est cent enfans insensés ; pour un mariage mal à propos refusé, il en est cent follement contractés par les enfans.
Icilius Triompha de cette sorte, & par les seuls suffrages du Peuple, apres avoir esté refusé par le Senat. […] La seconde regarde le nombre de ceux qui ont joüy du Triomphe, & de ceux qui l’ont refusé. […] Mais s’il y a lieu de s’estonner voyant l’indifference que les derniers Empereurs ont eu pour de si grands honeurs, & qu’ils ayent laissé abolir une si glorieuse coûtume de recompenser la Vertu ; il n’y a pas moyen de n’estre pas surpris de voir des Ames assez fieres ou assez bizares pour refuser un si glorieux prix de leurs merites & de leurs belles actiõs quand la Iustice & la reconnoissance répondoient soigneusement & si plainement au merite. […] Fulvius Flaccus refusa le Triomphe que le Senat luy avoit accordé.
Missionnaire, qui refusa de choisir, disant qu’« il ne convenait ni à sa profession de Ministre du vrai Dieu, ni à la sainteté de la religion qu’il prêchait, d’assister à la comédie ». […] On en fut scandalisé, la plupart des femmes et des filles, élevées dans des principes de religion, refusèrent des rôles, et ne voulurent pas y assister, surtout celles de la Confrérie de la Sainte Famille, établie à la paroisse, qui sont en fort grand nombre, et les plus distinguées. […] Celui-ci donna un mandement pour défendre la comédie, et fit prêcher contre, et refuser l’absolution.
Le péché est encore plus grand pour les personnes qui font profession de vertu, parce que les mondains s'autorisent de leur régularité apparente, et croient se pouvoir permettre des plaisirs que les gens de bien ne se refusent pas. » D.
Je ne m’étendrai donc pas sur les deux sujets indiqués dans le titre du présent chapitre ; mais je crois devoir faire sentir ici, que les dangers de la profession de comédien, ne peuvent justifier les rigueurs de certains prêtres fanatiques, qui par ignorance des lois ecclésiastiques, et au mépris des lois séculières, prétendraient avoir le droit d’anathématiser la profession théâtrale, et refuser aux acteurs, les prières de l’église, et la sépulture en terre sainte.