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100. (1783) La vraie philosophie « La vraie philosophie » pp. 229-251

Les Comédiens, dit Tite-Live, liv. 39, ayant été appellés dans les premieres sociétés de Rome, perdirent les mœurs. […] Ils ne les effacent jamais de leur mémoire ; … ils y voient des Grands, des personnes élevées en dignité, des vieillards, &c. y applaudir ; ils s’imaginent que tout ce qu’on leur expose est à retenir ; … ils agissent en conséquence, lorsqu’ils jouissent de leur liberté, & les voilà corrompus dans le cœur & dans l’esprit pour le reste de leur vie ; … ils perdent leur innocence sans en connoître le prix ; & néanmoins les parens qui ignorent eux-mêmes combien cette perte est affreuse & irréparable, sont ensuite au désespoir, quand leurs enfans donnent dans des désordres si préjudiciables à leur fortune, & dont ils sont cause, & qui leur fera bien verser de trop justes larmes ! […] Aussi que de jeunes sujets en qui l’on avoit admiré les germes des talens les plus intéressans pour la patrie, ne sont devenus que des citoyens inutiles & dangereux, immolés à l’oisiveté & au libertinage ; que pour avoir été respirer imprudemment aux théatres cet air de frivolité & de corruption qui pervertit le jugement, & fait perdre le goût de toute espece d’application, C’est l’aveu que faisoit le Prince de Conty, en écrivant contre les spectacles. […] Avec quelle force Saint Charles Borromée n’exhorte-t-il pas les Princes & les Magistrats à chasser les Comédiens, les Baladins, les Joueurs de farces, & autres pestes publiques, comme gens perdus & corrupteurs des bonnes mœurs, & punir ceux qui les logent dans les hôtelleries ! […] Aussi depuis que les jeunes gens vont à leur école, ils perdent bientôt, comme leurs maîtresses, la probité & l’honneur.

101. (1709) Mandement de M. L’Evêque de Nîmes contre les Spectacles pp. 3-8

Nous avions espéré que ces plaisirs ayant perdu pour vous la grâce de la nouveauté, et vous, ayant perdu le goût de ces plaisirs, vous n’abuseriez plus de nôtre silence.

102. (1778) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre vingtieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. Suites des Mélanges. » pp. 68-117

Dépenses considérables, dissipation continelle de la jeunesse, qui devient toute comédienne, ne s’occupe que de ses jeux, néglige le travail & l’étude, s’en dégoûte pour le reste de sa vie, & ne goûte plus que ce qui la perd. […] Il sont perdre cette grace précieuse qu’ils auroient empêché d’acquérir. […] Erudition perdue : on entend en général tout spectacle sous le nom de théatre ; d’autant mieux que jamais on n’a fait battre des animaux sur la scène proprement dite. […] L’amour des femmes, cette mer si fameuse en naufrages, où se sont perdus & se perdent encore les plus grands hommes ; c’est pour lui le bonheur suprême, le seul bonheur où tout l’univers aspire, sur-tout la France ; & comme il regne souverainement sur la scène, il n’est pas surprenant que le théatre soit l’école de toutes les vertus. […] Il vaudroit mieux mille fois ne toucher jamais de pinceau que de perdre son ame, & en perdre une infinité d’autres.

103. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre V. Du Luxe des coëffures. » pp. 115-142

Les coëffures des hommes & des femmes en sont couvertes ; mais la matiere, ne s’en perd pas, au lieu que la poudre se perd tous les jours, soit en tombant, soit en peignant les cheveux ; je suis persuadé que quelques jours, on verra des actrices toutes dorées, & la poudre d’or mêlée aux diamans. […] La farine qui couvre les têtes des Officiers, des Magistrats, des Jurisconsultes françois, n’est pas moins ridicule ; ce ne fut que sous les Empereurs perdus de débauches, qui ne connoissoient point de décence que la poudre d’or fut connue. […] Mais personne n’y perd plus que les actrices, & leurs amans. […] Absalon y trouva son malheur, ses beaux cheveux le perdirent ; ce Prince meurtrier de son frere, révolté contre son pere, fuyoit après sa défaite, en passant sous un arbre ses cheveux s’embarrasserent dans les branches ; son cheval continua sa course, & le laissa suspendu par ses cheveux ; Joab l’y perça d’un coup de lance ; ce qui avoit fait ses délices fût le chatiment de ses crimes. […] Malgré sa haute sagesse jusqu’à devenir idolâtre, & à bâtir des Temples à leurs Dieux ; il fut imité dans cette extravagante toilette par les Empereurs Romains, très-propres à figurer avec les Pages & les Concubines d’un Prince perdu de débauche.

104. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE I. Préjugés légitimes contre le Théatre. » pp. 4-29

On lit dans le Mercure de mars 1765 une jolie Épître à la Doligni, jeune débutante, vertueuse, dit-on, mais au moment de perdre son innocence, qu’on exhorte à la conserver. […] Les jeunes gens s’y perdent par les leçons qu’on leur y donne, les pieges qu’on leur y tend, les essais qu’on leur fait faire. […] On ne sent le péché que quand il est commis, la grâce que quand elle est perdue. […] Celui qui connoît & avoue son mal, n’est pas sans ressource ; tout est perdu dans celui qui l’ignore ou le dissimule. […] C’est en sortant de là que les personnes distinguées oublient les bienséances, & le peuple sa rusticité, & emploient à se perdre les armes qu’ils y ont forgées.

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