Le Stile de notre Tragédie ne doit point paroître Poëtique aux Peuples accoutumés au Stile enflé de ces Poëtes, qui s’écartant de la Nature, cherchent un Langage extraordinaire. […] Homere admirable par tant de raisons, me le paroît sur tout, par cette dignité qu’il a répandue dans sa Poësie : le Sujet de l’Iliade dans lequel il trouve parmi ses Personnages Paris, Helene, & Venus, lui fournissoit bien des occasions de parler d’amour ; au lieu que le Siége de Jérusalem n’en présentoit naturellement aucune au Tasse. […] Ce n’est pas seulement quand il chante la guerre, qu’il ne songe point à parler d’amour ; il n’y paroît pas songer d’avantage dans le Poëme où il a à dépeindre les Amans de Penelope, la Cour d’Antinous, le Palais de Circé, & la grotte de Calypso : cette grotte dans l’Odyssée est bien différente de ce qu’elle est dans notre Telemaque. […] Ces Ouvrages sont si anciens, tant les ténebres avoient duré, qu’on ne peut découvrir d’une maniere certaine, chez quel Peuple, & dans quelle Langue parurent d’abord les Amadis. […] Soit que cet Ouvrage soit parfait, comme le dit Riccoboni, soit qu’il soit seulement, comme le dit M. de Voltaire, le plus approchant de la perfection, un consentement unanime me paroît le mettre à la tête de toutes les Tragédies modernes : il nous procure donc l’avantage d’établir sans contestation notre supériorité sur nos Voisins.
Parmi les Modernes j’estime infiniment Vida, de Crémone, Poète, et Evêque d’Albe : Ces deux qualités paraissent assez mal assorties ; il a composé sur la poétique trois petits livres en vers, à l’imitation d’Horace. […] Un acte est une partie de l’action, qui paraît interrompue sur le Théâtre, mais laquelle ne laisse pas de se continuer derrière le Théâtre, où les personnages agissent toujours, et quelquefois même plus vivement. […] Un Auteur se rendrait ridicule, s’il faisait paraître Pompée sur la scène, s’applaudissant d’avoir vaincu César à la bataille de Pharsale : Cette contrariété choquerait l’Auditeur, persuadé de la défaite de Pompée. […] C’est en quoi le Poète fait paraître son génie, lorsqu’il produit dans les esprits, les mêmes effets par de simples récits, que par des spectacles réels. […] Les qualités naturelles, comme la condition, l’age, la fortune, la nation doivent faire agir, et parler diversement les personnes, qui paraissent sur la scène.
En un mot, il paraît s’être fait un genre de l’indécence ; ses dernières Pièces sur-tout me confirment dans cette idée. […] Il me paraît à propos de rapporter quelques endroits indécens des Pièces du nouveau genre. […] Ma sœur, il me paraît que le jeu vous amuse. […] Dorlis me paraît un éffronté petit coquin. […] L’Aveugle de Palmire, la Clochette, & une foule d’autres Poèmes qui paraissent tous les jours, en sont une preuve.
Il sort pour toujours de cette carrière enchanteresse, il prend pour témoin & pour arbitre de son engagement un des plus saints Evêques, qui aient paru dans l’Eglise de France. […] J’ai tout lieu d’espérer que ce sujet, s’il doit être de quelque utilité, y parviendra bien plus sûrement sous cette forme nouvelle, que s’il n’eût paru que sur la Scène, cette prétendue école des Mœurs où l’Amour-propre ne vient reconnoître que les torts d’autrui, & où les vérités morales, le plus lumineusement présentées, n’ont que le stérile mérite d’étonner un instant le désœuvrement & la frivolité, sans arriver jamais à corriger les vices, & sans parvenir à réprimer la manie des faux airs dans tous les genres, & les ridicules de tous les rangs. […] Si quelqu’un de ceux qui veulent bien s’intéresser à moi, est tenté de condamner le parti que j’ai pris de ne plus paroître dans cette carrière, qu’avant de me désapprouver il accorde un regard aux principes qui m’ont déterminé.
Il vous semble que les Auteurs qui ne peuvent faire tenir le même langage à leurs Héros, feraient mieux de les choisir dans un Pays où l’on ne les ait pas tant mis en œuvre ; et vous dites qu’un Grand-homme de notre France dont la Vie serait pleine de belles Actions, et qu’on ferait parler comme naturellement les honnêtes Gens y parlent, ferait pour le moins autant de plaisir à voir, que des Héros dont les Noms paraissent tout usés à force de les entendre répéter. […] Faites-moy la grâce, Madame, de ne point trembler pour eux : je les satisfis l’Année suivante ; et comme la Princesse de Cléves n’avait paru que deux ou trois fois on s’en souvint si peu un an après que sous le nom de Germanicus elle eut un succès considérable. […] Maintenant, je l’avoue, on ne voit rien de moi Qui paraisse à mes yeux digne de ton emploi.