La parole est souvent une expression faible & lente ; mais il faut bien se résoudre à faire passer par les oreilles, ce qu’on ne peut offrir aux yeux.
On se laisse prendre par un gand, par un colier, un bracelet, un pendant d’oreille, une jarretiere, la ceinture de Venus, &c. […] En marchant, sur-tout en dansant, on entend à chaque pas un petit carrillon très-harmonieux, comme un tambour de Basque, qui enchante l’oreille des amans. […] Ce n’est pas assez d’enbrillanter leurs habits, d’en émailler leur tête, d’en charger leurs oreilles, où, selon Martial, elles portent des terres entieres (le prix, la valeur des terres), il faut encore en couvrir leurs souliers. […] C’est le plus beau diamant des bracelets, des coliers, des pendans d’oreille, le plus beau cadran d’une montre, la plus piquante figure d’un éventail, la plus jolie frisure d’une boucle, d’une tresse de cheveux, le plus doux parfum d’une tabattiere & d’une cassolette.
Le feu impur perce jusques dans les déserts ; sa chaleur se fait sentir dans les retraites les plus profondes ; & eux nouveaux prodiges, au milieu de la licence du Spectacle, ouvrant leurs oreilles & leurs yeux à des paroles, à des objets qui blessent la pudeur, n’en reçoivent pas la moindre impression !
C'est donc ainsi que les Chrétiens ont fulminé contre les Jeux Scéniques et contre tous les Mimes et Bateleurs qui n'y paraissaient que pour faire les divertissements du peuple, par des actions et des paroles dignes de la plus grande sévérité des Lois, et qu'ils ont empêché que la sainteté des Chrétiens ne fut souillée par la communication de ces impudences, dont le poison se pouvait aisément glisser dans l'âme par les yeux et par les oreilles : ils n'ont pas traité de la même sorte la représentation des Poèmes Dramatiques, et je ne trouve que fort peu d'endroits qui témoignent ce qu'ils en ont pensé « Comœdiae et Tragœdiae horum meliora Poemata. » Tertull. de Spect.
Mais ils donnent lieu à un morceau de Musique délicieux pour les oreilles des Amateurs.