Que de nouvelles carrieres il a ouvertes ! […] Aucun délassement ne conviendroit mieux à la dignité des Princes, des Ambassadeurs, des Officiers généraux, même des Rois ; ce seroit non-seulement varier & multiplier, mais perfectionner, ennoblir, élever, étendre la grande école du Théatre par la création d’un nouveau genre heureux & fécond. […] Mais dans ces nouveaux drames il n’y aura point les trois unités. […] Dans cette crise les mœurs & les manieres anciennes contrastoient avec les lumieres nouvelles ; le caractère national, formé par des siecles de barbarie, cessoit de s’assortir avec l’esprit nouveau qui se répandoit. […] Il n’y a de nouveau que d’en avoir une publique, plus vaste, mieux fournie, & de lui avoir donné un nom Anglois.
N’auroit-il pas dû travailler à tarir cette source empoisonnée qui renforce les maximes du vice, & donne au poison un nouveau dégré d’activité ? […] Plusieurs, qui traitent ce nouveau drame de sermon, aiment mieux rire avec Moliere que pleurer avec la Chaussée. […] La scène n’a rien acquis de nouveau ; ce fut son plus beau regne : elle n’a fait depuis que répandre davantage sa corruption. […] On pourroit faire de tous ces drames anciens & nouveaux, aussi bien que de tous ceux de Moliere, des analyses & des résultats de morale à la Chamfort. […] Vous qui frédonnez un air nouveau dans les fonctions les plus sérieuses, une scene, une action indécente vous convient mieux.
Gresset est encore dans l’âge des succès : il a réussi dans l’Art Dramatique au point de disputer du rang avec les premiers Maîtres de la Scène : il faisoit espérer de nouveaux plaisirs à la Capitale, on l’y attendoit, on l’y desiroit ; on se plaignoit de la Province qui captivoit trop ces talents supérieurs. […] Pour mes nouvelles Comédies (dont deux ont été lues, Monsieur, par vous seul) ne me les demandez plus ; le sacrifice en est fait, & c’étoit sacrifier bien peu de chose. […] Au moment où j’écris, un Corps Céleste, nouveau à nos regards, est descendu sur l’Horison ; mais ce spectacle, également frappant pour les Esprits éclairés & pour le Vulgaire, amuse seulement la frivole curiosité, quand il doit élever nos réflexions.
Nos poëtes au contraire itrirent les bêtes féroces, justifient leur rage, leur enseignent à nous dévorer, détruisent les murailles des villes, les vrais fondemens de la soclété humaines, les bonnes mœurs : voilà les nouveaux poëtes, les interprêtes des dieux. […] Du cœur naissent les mauvaises pensées, les discours scandaleux, les écrits licentieux ; mais l’homme de bien tire de son trésor des choses anciennes & nouvelles : c’est l’Evangile. […] Tout le monde fait les conseils qu’il donne aux nouveaux maris, de ne pas laisser aller leurs femmes à l’Opéra.
Les Romains suivirent d’abord l’exemple des Grecs jusqu’au règne d’Auguste : il parut alors deux hommes extraordinaires qui créèrent un nouveau genre, & le portèrent au plus haut degré de perfection. […] Tout ce que la Poésie, la Musique, la Danse, les Machines peuvent fournir de plus brillant, fut épuisé dans ce Spectacle superbe : la description qui en parut, étonna l’Europe, & piqua l’émulation de quelques hommes à talens, qui profitèrent de ces nouvelles lumières, pour donner de nouveaux plaisirs à leur Nation.