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388. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre I. De la Pudeur. » pp. 4-35

Elle augmente leur beauté, elle en est la fleur, elle sert d’excuse à la laideur, elle est le charme des yeux, l’attrait des cœurs, la caution des vertus, l’union & la paix des familles, la sureté des mœurs, le charme du plaisir, sans elle l’amour seroit sans gloire, c’est sur elle que se prennent les plus flateuses conquêtes, elle met le prix aux faveurs, elle est si nécessaire au plaisir qu’il en faudroit conserver dans le temps même destiné à la perdre ; c’est une coquetterie rafinée, une espece d’enchere que les belles mettent à leurs appas, une maniere d’augmenter les charmes en les cachant. […] Il y a quelque chose d’outré & d’alambiqué dans plusieurs de ces idées, mais dans le fonds il est très-vrai que la pudeur, si nécessaire à la sureté des mœurs, & à la gloire d’une femme, l’est encore aux charmes ce la société. […] Chez les Romains, quand les mœurs furent entierement corrompues, le peuple demandoit à la fin du spectacle, comme la petite piéce, que les actrices se deshabillassent : Nudentur Mimæ. […] Elles ne depareroient pas moins la scene, qu’elles blesseroient les mœurs.

389. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. De la Dédicace de la Statue de Voltaire. » pp. 71-94

La voilà donc la grande Pythonisse, vêtue de blanc, pour marquer la pureté de ses mœurs ; car depuis la défunte Daphné, Apollon n’aime que les vierges ; aussi les muses font-elles appellées les chastes sœurs ; pere des poëtes, aussi chastes qu’elles ; la voilà l’intime amie de Voltaire, l’héroïne de toutes les pieces, qui a rempli de son nom tous les théatres, depuis Rouen jusqu’à Vienne, à Varsovie, à Petesbourg & au Palais de délices ; qui a fait résonner tous les échos, de sa voix mélodieuse, qui a allumé tant de passions, fait composer tant de vers, fait tourner ; la tête à l’Avocat Huerne, qui voit à ses pieds toutes les autres actrices, comme un grand chêne porte sa tête chenue au-dessus des nuages, & daigne à peine régarder les petits arbrisseaux qui croissent au tour de lui ; qui a formé pour le théatre sa chere fille, la charmante Hus, vestale comme elle ; en un mot, & c’est tout dire, ce mot renferme tous les éloges ; la voilà l’incomparable Clairon, qui à pas lents, & d’une démarche majestueuse, d’un air de reine, accompagnée des graces, des jeux, des ris, des talens, s’avance vers la statue du Dieu Voltaire. […] Les adorateurs de Voltaire ne traiteroient pas mieux, s’ils en étoient les maîtres, ces sacriléges grenouilles, qui, du milieu de leur sange, croassent stupidement contre lui, & assurément un Ange ne viendroit pas éteindre les flames ; il manquoit cependant à cette pompeuse solemnité, des députés de l’Académie : ce qui est d’autant plus singulier, que Voltaire est un des quarante, & qu’on l’a laissé dans sa place d’Académicien, quoique le Roi lui ait ôté celle de son Historiographe, sans s’embarrasser de sa réligion & de ses mœurs, qui n’illustre pas l’Académie ; mais ce corps illustre, qui ; quoiqu’à demi Episcopal, aime & protége assez le théatre, à l’exception de l’Archevêque de Sens, M. […] Son grand crédit auprès de Venus & d’Uranie, forme un portrait plus vrai qu’honorable, des sentimens & des mœurs du poëte.

390. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre VII. Troisieme suite du Fard. » pp. 171-194

Tel le précieux des romans dont il fait une très-bonne critique, pour se moquer du grand Cyrus, de Pharamond, de Clelie, &c. qui sont passés de mode, pour faire place à des historiettes licencieuses, contre la Réligion & les mœurs. […] L’auteur se promet un grand fruit de son livre ; c’est qu’il sera utile au théatre, en enseignant aux comédiens le vrai costume de tous les tems, ce qui contribuera à rendre l’illusion plus parfaite, bien inestimable pour l’Etat, les mœurs & la Réligion. […] Saint Augustin est bien sévere, il appelle le fard une espece d’adultere, il prétend que les maris eux-mêmes n’en veulent point, qu’une femme ne doit se parer que pour plaire à son mari ; que le véritable ornement ce sont les bonnes mœurs, sur-tout pour des chrétiens ; il ne permet pas même qu’on y emploie l’or, il condamne jusqu’aux pendans d’oreilles.

391. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre treizieme « Réflexions morales, politiques, historiques,et littéraires, sur le théatre. — Chapitre VI.  » pp. 193-217

On doit ces métamorphoses au théatre, où il est ordinaire d’en prendre mutuellement les habits, la parure, les mœurs, les sentimens, les manieres, les foiblesses & les vices, comme le rouge & les rubans, ce que si communement on emprunte de lui dans le monde. […] Tertullien de Pallio tient le même langage, & appelle effeminés les hommes qui portent ces robes longues & flottantes sans ceinture, comme celles des femmes, dont ils imitent les mœurs en prenant leurs habits. […] Celle-ci est encore plus embarrassante dans les fonctions, plus indécente à l’Eglise, plus fastueuse & par conséquent plus opposée à l’esprit & aux mœurs du Clergé.

392. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE V. Des Pièces tirées de l’Ecriture sainte. » pp. 96-119

Mais indépendamment de ces raisons générales de sagesse, ceux-mêmesj qui voudraient le plus accorder à tout le monde la lecture des Ecritures, doivent convenir qu’elle n’est pas faite pour le théâtre ; que c’est la défigurer, l’avilir, la déshonorer ; que bien loin d’en faire la nourriture de l’âme fidèle, on en fait l’amusement de la frivolité, souvent du vice et de l’impiété ; qu’au lieu de servir à la sanctification des fêtes, elle en devient la profanation ; que les Pères, en conseillant cette lecture aux âmes bien disposées, n’ont jamais entendu qu’on dût la livrer au parterre, la couper en actes, la cisailler en scènes, la travestir en comédies, la faire jouer par des hommes et des femmes sans mœurs, avec des habits, des gestes, des discours pleins de mollesse et de dissolution. […] C’était toujours un mal de moins ; si les mœurs étaient exposées, la religion était respectée. […] Enfin les mœurs y courent le plus grand risque.

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