On y forme les intrigues, on y étale les graces, on y parle le langage de la passion ; les loges sont leur vrai théatre. Et je ne sais quelle des deux actrices joue le mieux, quelle des deux piéces est la plus mauvaise ; la coquetterie ou le drame, le langage des yeux ou celui des personnages ; quel des deux rouges est le plus vif, quelle attitude est la plus indécente, & des conversations la plus licentieuse.
Ceux qui peuvent les lire dans notre Langue, ont-ils l’oreille assez Françoise, pour être frappés de toutes ces beautés de Langage & d’Harmonie, qui dépendent souvent de l’endroit où une expression est placée ? […] Enfin comme il étoit plus aisé de faire parler aux Passions tout autre langage que le leur, ont prit un style outré, & voici la troisiéme cause du désordre général. Les Poëtes s’imaginerent d’abord que pour donner de la grandeur à la Tragédie, il falloit lui faire parler un langage merveilleux. […] Nous lisons dans la Rhétorique d’Aristote, qu’ils ne disoient que des niaiseries dans un langage très-éloigné du langage ordinaire ; qu’ils sentirent enfin qu’il falloit rabaisser leur ton, pour dire des choses plus sensées, & parler à l’esprit, plutôt que de ne parler qu’aux oreilles. […] On sait combien ce stile devint commun en Italie, & combien celui du Pastor fido est opposé au langage des habitans de la campagne.
L’obscénité du Théâtre Anglais dans le langage. […] Non, si les plus lascifs animaux savaient parler, ils n’auraient pas un plus énorme langage que celui de notre Théâtre. […] s’il ne le croit pas, quelle rusticité de leur parler un langage qu’elles abhorrent ! […] » Merveilleux langage ! […] Où les mœurs sont corrompues, là le langage est dissolu….
Le langage de Moliere est très-souvent celui des Harangeres. […] C’étoit là le véritable esprit ou plutôt l’instinct naturel de Moliere ; il sentoit, saisisoit, & rendoit tous les divers tous de ce langage. […] C’étoit ce langage secret, ce pantomime intérieur, qui faisoit le mérite de Moliere, le talent de peindre en détail, de copier & de contrefaire. […] Ce seroit deux jolis catalogues, l’un de ses mauvais principes de morale, & l’autre de ses fautes de langage & de composition. […] Les Danois ayant fait la conquête de la grande Bretagne, y apporterent leur mytologie avec leurs idées & leur langage.
Ils y apprennent la décence du maintien, l’inflexion de la voix, le langage des yeux. […] La tragédie leur enseigne l’élévation du style, la noblesse des sentiments, la pureté du langage, la force, l’harmonie, le pathétique de l’expression. […] Le Comédien ne respire que la licence et le plaisir ; le Pasteur des âmes, et le défenseur de la veuve, se réservent la justice et la piété : le langage comique répand partout le sel de la satire, l’amertume de la malignité ; le langage évangélique ne fait couler que le lait et le miel de la charité : les regards, les paroles, les démarches annoncent la dissolution et la frivolité des acteurs et des spectateurs ; et d’un autre côté peignent le recueillement et la religion de l’orateur et de l’auditeur chrétien, l’équité, la fermeté, la sagesse de l’oracle des lois. […] Les amateurs du théâtre tiennent ce langage comme les autres, et en sentent la vérité ; mais sentent-ils la contradiction entre leur langage et leur conduite, leurs railleries et leur apologie ? […] langage, sujet, habit, mélange de sexe, caractère de rôles, rien n’échappe au prudent législateur : « Tragediarum et comediarum quas nisi latinas et rarissimas esse oportet argumentum sit latinum et pium, nec quidquam actibus interponatur quod non sit latinum et decorum, nec persona mulieris vel habitus interponatur » (Reg. rect. de ration. stud. n.