6.) en ces termes : « La Cour avertie que plusieurs du peuple et gens de métier s’appliquent plutôt aux jeux des bateleurs et jongleurs qu’à leur travail, et y donnent deux grands blancs plutôt qu’à la boîte des pauvres, préférant leur mondaine curiosité à la charité divine, icelle Cour a défendu et défend à tous bateleurs, jongleurs, et autres semblables, de jouer dans cette ville de Paris, quelque jour que ce soit, sous peine du fouet et bannissement du royaume ; a défendu et défend au Prévôt de Paris et à ses Lieutenants civil et criminel, de bailler permission de jouer auxdits bateleurs ; défend pareillement à tous les hauts Justiciers de cette ville, et à leurs Officiers, de bailler aucune permission de jouer, quelque jour que ce soit, sous peine de dix marcs d’argent, et autre amende arbitraire. » Il y a de pareils arrêts du 6 octobre 1584, du 10 décembre 1588.
Il suffit d’avoir lu l’Evangile, pour être convaincu que la Comédie ne peut pas s’accorder avec les maximes de ce Livre divin. 3°.
Mais c’est, dit-on, la vieillesse ou la jeunesse de Corneille et de Molière, on y trouve des traits de génie, des étincelles de leur feu divin ; car on divinise à bon marché dans les loges. […] On a beau les enchasser dans des vers harmonieux et des mots sonores, la dégradation de la majesté divine, l’avilissement de la majesté royale, la rage du suicide loin d’être grandeur d’âme, ne sont qu’un délire ; tout est plein de ces radotages.
Les Spectateurs y cherchent le plaisir et la volupté ; non celle qui réjouit l’esprit ; et touche l’entendement par la connaissance des choses excellentes divines et humaines : mais celle qui se reçoit par les sens, les chatouille, et leur agrée, et par eux émeut aussi ensuite les facultés internes, et se glisse dedans l’âme. […] Nous maintenons que cela est contraire à la Majesté de la Religion, et injurieux au sacré Ministère institué de Dieu pour édifier notre foi : et qu’il n’est loisible de détourner la parole de Dieu de son droit usage, pour la faire servir aux jeux et aux plaisirs des sens : puisqu’en l’Eglise de Dieu, toutes choses doivent être rapportées à la modestie et vraie piété, afin que l’âme soit portée à la Religion, et à la contemplation respectueuse des choses divines. […] Cyprien, étant enquis par Eucratius, si un bateleur qui avait été nourri en la Religion Chrétienne, et avait fait métier d’enseigner aux jeunes hommes la manière de contrefaire la femme, changeant le sexe par son art, combien que lui-même eût cessé de servir au Théâtre, devait être privé de la communion de l’Eglise ; répondit53, « qu’il n’était pas convenable à la majesté Divine, ni à la discipline Evangélique, que l’honnêteté de l’Eglise, fût souillée, par une si orde contagion. » Tout ce que nous venons de dire, est aussi remarqué par Patrice au second livre de sa République. « Les Anciens Romains, dit-il, ont haï tous les acteurs de Comédies, et tous ceux qui exerçaient ces arts de jouer sur le Théâtre ; et par lois expresses, ont défendu qu’aucun de telles gens s’assît ès premiers quatorze ordres : Et chez Cicéron, Scipion le témoigne par ces mots. […] Es divines Instit. livre 6. chap. 20.
Voilà ce qu’on nous dit dès l’âge le plus tendre, et ce que nous apprenons dans nos premières lectures ; or cet avis d’une source divine et pure que tant d’exemples malheureusement justifient et rappellent continuellement à tout le monde, et que, d’ailleurs, on peut souvent renouveler par cette méthode calme qui réveille l’attention sans réveiller les passions et les porter à confondre l’apparence avec la réalité ; cet avis, dis-je, était suffisant à cet égard, et rendait inutiles les leçons magiques et inflammatoires du théâtre.