L’adultere, l’inceste, la perfidie : combien de paroles équivoques, de discours obscénes s’y font entendre ? […] On dira que je ne rends pas assez de justice à la délicatesse de notre siécle ; on veut de la décence dans le maintien & dans les discours : la Scéne Françoise est aujourd’hui très-châtiée, on n’y souffre plus rien qui soit capable d’allarmer les oreilles chastes.
Avant que d'entrer en matière, je suis obligé de remarquer deux choses pour faciliter l'intelligence de tout mon discours : l'une que le Théâtre ne signifie pas proprement comme nous l'entendons aujourd'hui, l'échafaud où paraissent les Acteurs des Comédies et Tragédies, mais un grand lieu composé de plusieurs bâtiments, galeries, promenoirs, et sièges pour les Spectateurs, au milieu duquel était un espace vide, où l'on donnait divers spectacles, comme de Gladiateurs, d'Athlètes et autres, selon le différent usage des Villes et des Provinces, où l'on dressait l'échafaud composé de plusieurs parties, que nous appellons maintenant comme d'un nom propre, le Théâtre ; et là se faisaient plusieurs Jeux, de musique, de danse, de Poésie, et plusieurs autres combats que l'on a souvent compris tous ensemble sous le nom de Jeux Scéniques ou de Théâtre. […] C'est pourquoi dans ce discours, aux choses qui concerneront conjointement la Comédie et la Tragédie, les Comédiens et les Tragédiens, je ne me servirai bien souvent que du premier nom ; ce que je dis afin que l'on ne s'imagine pas que je veuille mettre autant de différence entre les Acteurs de ces deux sortes d'ouvrages, comme il y en avait entre eux et ceux qui s'appliquaient aux autres Jeux de Théâtre ou de scène, qui n'avaient presque rien de commun avec ces premiers.
Car j’avoue que ce n’est ni un de mes amis, ni une personne de qualité, ni une espèce de défi (discours d’Auteurs si rebattus dans les Préfaces) qui m’ont engagé à ce travail. […] Enfin j’ai ajouté certaines liaisons du discours, dont l’Anglais peut se passer, et que nous autres nous jugeons nécessaires.
On ne sera peut-être pas fâché, de trouver ici le discours remarquable que ce Philosophe leur tient à ce sujet. […] Le Poète comique, qui marcherait par le chemin si rebattu et si dangereux de la Comédie de nos jours, ressemblerait, sans doute, à ce Médecin pernicieux : comme lui il apporterait, à une nombreuse assemblée de malades, au lieu d’un remède capable de les guérir en corrigeant leurs vices, il leur apporterait, dis-je, la mort, en les entraînant dans de nouveaux excès par ses discours et par ses actions.
Ne dites point des Romans, comme des théâtres, que les discours y sont honnêtes, et qu’il ne s’y rencontre aucune parole lascive ; car ces discours ne laissent pas de porter l’impureté dans le cœur ; ce sont des brûlots qui les enflamment, sous prétexte de les venir soulager.