Cet exemple est si beau, & la Lettre est, à tous égards, si digne d’être conservée, que nous la déposons toute entière dans ce Volume de nos Mémoires, dont elle fera l’honneur & l’agrément. […] L’Impression ayant donné quelque existence à de foibles productions auxquelles j’attache fort peu de valeur, je me crois obligé d’en publier une Edition très corrigée, où je ne conserverai rien qui ne puisse être soumis à la lumière de la Religion & à la sévérité de ses regards. […] Si la prétention de ce caractère, si répandue auiourd’hui, si maussade comme l’est toute prétention, & si gauche dans ceux qui l’ont malgré la nature & sans succès, n’étoit qu’un de ces ridicules qui ne sont que de la fatuité sans danger, ou de la sottise sans conséquence, je ne m’y serois plus arrêté ; l’objet du portrait ne vaudroit pas les frais des crayons : mais outre sa comique absurdité, cette prétention est de plus si contraire aux régles établies, à l’honnêteté publique, & au respect dû à la Raison, que je me suis cru obligé d’en conserver les traits & la censure, par l’intérêt que tout Citoyen qui pense doit prendre aux droits de la Vertu & de la Vérité.
On dira peut-être, ajoute ce Père, qu’une telle défense ne regarde que les pécheurs publics à qui l’on refusait les récréations les plus innocentes ; mais je vous assure que l’éloignement des spectacles est un préservatif indispensable à quiconque est jaloux de conserver son innocence. […] Leurs assertions font un ensemble d’un aussi grand poids que les canons, et dès qu’ils se réunissent en grand nombre sur une vérité doctrinale, on ne peut la démentir sans s’écarter des bornes de la doctrine chrétienne, dont ces grandes lumières ont conservé le précieux dépôt dans leurs ouvrages. […] Saint Augustin qui assista à ce concile en avait conservé tout l’esprit, lorsqu’il déclarait que les dons faits aux gens de théâtre ne sont point au rang des libéralités honnêtes : « Donare res suas histrionibus, vitium est immane, non virtus36. » Le concile de Trulle, ainsi nommé parce qu’il se tint dans le dôme du palais à Constantinople, l’an 692, s’explique en ces termes : « Le saint concile défend les farceurs et leurs spectacles, et les danses qui se font sur le théâtre.
En l’examinant donc sous son véritable point de vue, j’ai établi qu’elle était d’un grand secours pour consolider le bonheur public sous ce triple rapport, en ce que, en tempérant à l’égard des peuples l’autorité souveraine, elle la leur rendait respectable et chère ; en enchaînant l’injustice des passions, elle maintenait l’harmonie sociale ; en offrant aux malheureux de véritables consolations, et leur aidant à supporter les peines de la vie, elle conservait à l’Etat des Citoyens utiles. Jetant ensuite un coup-d’œil rapide sur les malheurs déplorables dont l’Etat un jour serait la victime, si par la perte ou le trépas des Orateurs chrétiens, que la Providence a su nous conserver au milieu des tempêtes, la religion venait à perdre son plus beau lustre et son dernier appui, j’en ai conclu que rien ne nous importait d’avantage que de rétablir, dans tout leur éclat, ces maisons illustres, où le savoir et la vertu formèrent autrefois ces saints Docteurs, qui depuis ont rempli l’Univers du bruit de leurs heureux succès, et ont fait de la France le berceau comme le séjour ordinaire de la véritable éloquence.
Un Auguste, un François I, un Médicis, un Louis XIV, viendront alors lui rendre son éclat : elle le conservera parmi nous tant que rien ne ternira notre Théâtre, & tant qu’il ne sera point en proie au mauvais goût. N’épargnons donc rien pour lui conserver la grandeur, le sublime que lui donna Corneille, l’élégance de Racine, le vrai comique de Molière, & la pureté des mœurs qui l’accompagne depuis long-tems. […] La Police aurait peine à conserver le bon ordre dans les Villes, si chaque Citoyen se trouvait désœuvré.
Tragédies à conserver sur le Théâtre de la Réformation. […] Ma première idée avait été de faire l’examen de presque toutes les Tragédies du Théâtre Français : je voulais les placer chacune dans des classes différentes ; en distinguant celles que je conserve telles qu’elles sont ; celles que je conserverais, si elles étaient corrigées ; enfin celles que je rejette.