Oui, dans le temps même que l’ennemi escaladait les murs, se répandait de tous côtés, et passait tout au fil de l’épée, on jouait la comédie : « Circumsonabant armis muros, et Carthaginensis insaniebat in circo, luxuriabat in theatro. » L’amphithéâtre était plein d’insensés à qui l’ensorcellement du plaisir ne laissait pas entendre le bruit affreux du sac de leur ville, les gémissements des mourants se confondaient avec les cris de joie et les chansons de ceux qui se jouaient au théâtre : « Confundebatur vox morientium, voxque Bacchantium ; vix discerni poterat plebis ejulatio quæ cadebat in bello, et sonus populi qui clamabat in circo. » N’était-ce pas, ajoute ce Père, forcer Dieu à exterminer un peuple pour qui il avait peut-être encore des sentiments de miséricorde ? […] Il faudrait, ajoute-t-il, pour représenter ce spectacle, les tragédies d’Echyle et de Sophocle, encore même ne pourraient-elles pas atteindre à l’excès de ces maux : « Quæ Carthaginenses passi sunt Æschilis et Sophoclis tragediis egerent, atque horum quoque linguam vinceret malorum magnitudo. » Cette ville si puissante, si riche, qui a longtemps disputé à Rome l’empire du monde, qui a mis Rome à deux doigts de sa perte, qu’à peine Rome a pu vaincre après trois grandes guerres, est aujourd’hui le jouet des barbares : « Illa a Romanis vix capta, quæ cum maxima Roma de principatu certaverat, eamque in summum discrimen deduxerat, modo facta est ludibrium barbarorum. » Ses célèbres Sénateurs, errants et fugitifs dans toute la terre, attendant pour vivre quelque aumône des gens charitables, arrachent les larmes des yeux, et présentent le plus triste tableau de l’instabilité des choses humaines : « Orbe toto errantes, vitam ex hospitalium manibus sustentantes, cient spectantibus lacrimas, et rerum humanarum instabilitatem declarant. » Cet Auteur ajoute que peu de temps auparavant, les habitants de Trèves, après avoir vu trois fois piller, saccager et brûler leur ville par les Francs, eurent la folie de demander des spectacles pour toute consolation et tout remède à leurs maux : « Quis æstimare hoc genus amentiæ possit qui excidio superfuerant quasi pro summo deletæ urbis remedio, circenses postulabant ?
s’explique en ces termes : « Quisquis delectatur in peccato mortali, peccat mortaliter præsertim in illis quæ sunt mala, non quia prohibita, sed quia essentialiter includunt turpitudinem, quales sunt omnina Comediæ nostri temporis ; ex Apost. ad Rom. 1. […] [NDE] Pauli Comitoli, Perusini, Societatis Jesu, Theologi, Responsa moralia in septem libros digesta, quibus, quæ in Christiani officii rationibus videntur ardua et difficilia enucleantur.
[NDA] Marc. 6. « Convenientes Apostoli ad Jesum, renunciaverunt ei omnia quæ egerant, et docuerant, et ait illis, venite seorsum in desertum locum, et requiescite pusillum. […] [NDA] Prov. 16. « Est via quæ videtur homini recta, et novissima ejus ducunt ad mortem. […] [NDA] Psalm. 55. « In me sunt Deus vota tua quæ reddam laudationes tibi : Quoniam eripuisti animam meam de morte, pedes meos a lapsu : Ut placeam coram Deo in lumine viventium. […] [NDA] Isa. 3. « Princeps quæ digna sunt principe loquetur.
Il entre dans le détail des différens fards & ornemens du luxe, & ne fait grace à aucun : Mulierum confessiones non audiantur quæ ornatæ veniunt, quæ fucis utuntur, quæ Levibus & vanis ornamentis comptæ accedunt.
Ce serait bien la fable de l’écrevisse qui reprochait à sa fille qu’elle allait à reculons : « Non licet Meretrici filiam exhæredare quæ vitam meretriciam ducit. » Le père, dans ces occasions, a droit de chasser son fils de sa maison. […] On ne peut prendre trop de précautions avec ces créatures : les termes de la loi leur font acheter chèrement cette grâce : « Mulieres quæ indignam honore conversationem imbecillitate sexus elegerint, ut minus honestam conditionem facilius derelinquant quæ scenicis ludis se immiscuerant, spreta mala conditione professionem inhonestam effugerunt, etc. » (L.
» Ne prononcez pas des obscénités, des folies, des bouffonneries, des paroles qui ne sont bonnes à rien : « Turpiloquium stultiloquium scurrilitas quæ ad rem non pertinet. […] « Scurrilitas quæ ad rem non pertinent.
Omnino prohibet hæc Sancta Synodus eos qui dicuntur mimos & eorum Spectacula, atque in Scena saltationes fieri : Si quis autem præsentem Canonem contempserit & se alicui eorum quæ sunt vetita dederit, si sit Clericus deponatur, si Laicus segregetur. […] Magis convenit lugere, quâm ad seurilitates & stultiloquia Histrionum obscenas joculationes & cæteras vanitates, quæ animum christianum à vigore suæ rectitudinis emollire solent, in cachinnos ora dissolvere : neque enim fas est hujusmodi Spectaculis fœdari.
In causa est, quòd iis quæ ibi siunt, studiosè attendunt.
Inspectio Spectaculorum vitiosa redditur, in quantum homo fit pronus ad vitia vel lasciviæ vel crudelitatis, per ea quæ ibi repræsentantur. […] » Pour les affiches des Comédies, il rapporte les paroles de saint Augustin, « Ecclesia multa tolerat quæ non probat.
Quæ vero pudica, quæ casta est, religionem doceat, non saltationem. » D. […] De restitutione eorum quæ in ludo per dolum, et violentiam acquiruntur. […] Quæ vero pudica, quæ casta est, religionem doceat, non saltationem. » D. […] « Phantasmata, umbræ, imagines quæ cito pereunt, et solvuntur. » D. […] De restitutione eorum quæ in ludo per dolum, et violentiam acquiruntur.
Si quis autem præsentem canonem contempserit, et se alicui eorum quæ sunt vetita dederit, si sit clericus, deponatur ; si laicus, segregetur37. » Un canon plus moderne, il est d’un concile qui se tint à Paris en 829, est conçu en ces termes : « Il convient mieux à des chrétiens de gémir sur leurs égarements passés, que de courir après les bouffonneries, les discours insensés, les plaisanteries obscènes des histrions.
Nam præter verborum licentiam, quibus obscœnitas omnis effunditur, exuuntur etiam vestibus populo flagitante meretrices, quæ tunc mimorum funguntur officio ; et in conspectu populi usque ad satietatem impudicorum luminum cum pudendis motibus detinentur.
12. il marque combien elles sont nouvelles, representationes quæ fiunt hodie. […] Il se plaint cependant qu’il commençoit à s’y glisser des abus, qu’on s’y donnoit bien des licences, qu’on y exposoit la vie en dansant sur la corde : Repræsentationes quæ fiunt hodie.
Verum animo satis hæc vestigia parva sagaci Sunt, per quæ possis cognoscere cætera tutè.
O præclaram emendatrium vitæ poeticam, quæ si flagitia non probaremus, nulla esset omnino !
Segniùs irritant animos demissa per aurem, Quàm quæ sunt oculis subjecta fidelibus…
Ratio loquitur, quæ scriptura conticuit : secum tantum unusquisque deliberet, & cum persona professionis suæ loquatur ; nihil nuquam indecorum geret.
Collet parle dans le même sens : « Comœdiorum actioni, quæ grave est peccatum, indubiè cooperantur (assistentes) ; tolle enim spectatores, sustuleris et actores ». […] Ad omnia autem quæ sunt utilia conversationi humanæ deputari possunt aliqua officia licita.
« Senatoris filia quæ corpore quæstum vel artem ludicram fecerit, aut Judicio publico damnata fuerit, impune libertino nubit ; nec enim honor ei servatur, quæ se in tantum scelus deduxit. » (L.
« o præclaram emendatricem vitæ », qui fait une Divinité de l’amour du vice et de l’auteur du crime, « quæ amorem flagitii et levitatis auctorem in conciliis Deorum collocat ». […] Ce grand homme vit avec tant de dégoût des objets si frivoles, qu’il félicite son ami, à qui il écrit, d’avoir préféré la tranquillité de la campagne, et la douceur de la lecture, aux fêtes bruyantes dont l’éclat frappe le peuple, mais ne peut plaire à un homme sage : « Lætor te animo valuisse ut ea quæ cæteri mirantur, neglexeris. » Dans le livre de la corruption de l’éloquence, que quelques-uns attribuent à Cicéron, et qui n’est pas indigne de lui, on assure que le théâtre est une des principales causes de cette corruption.
Etienne : « Infames esse eas personas dicimus quæ pro aliqua culpa notantur infamia, id est omnes quos ecclesiasticæ vel sæ uli leges infames pronuntiunt. » (C. 91. […] Dans l’Eglise latine, où le mariage est défendu au Clergé, ces lois subsistent encore plus sévères, puisqu’un homme qui aurait épousé une femme prostituée ou une Comédienne, ou leur fille (aux yeux des canons, comme aux yeux des lois, c’est la même chose), fût-il devenu veuf, ou fût-il séparé de sa femme, ne peut être admis aux ordres sacrés ni posséder des bénéfices : « Qui Meretricem duxit aut aliquam quæ sit mancipata spectaculis in consortio sacerdotali esse non potest. » Ce canon, pris du canon 17 des Apôtres, est rapporté par Yves de Chartres (P.
Les enfers puniront rigoureusement les filles qui se fardent : Illis sub terrâ venient mala multo puellis, quæ mentita suas vertit inepta comes. […] Le sculpteur, dit-il, prend un morceau de bois, son ciseau le travaille avec soin, & ensuite il le polit & l’enlumine, le peignant en rouge avec du vermillon, comme les femmes se peignent le visage, & par son art il en couvre avec adresse, les taches, en remplit les creux & les rides comme les femmes remplissent les creux qu’a laissé la petite vérole, les rides que l’âge, l’infirmité, le fard lui-même ont répandu : Perliniens faciem rubricam omnem maculam quæ in ipsâ est operiens.
Les donations entre mari et femme sont défendues, dans la crainte qu’abusant de l’amour et de l’empire qu’ils auraient pris l’un sur l’autre, ils ne se dépouillassent de leurs biens par des libéralités indiscrètes ; à plus forte raison sont-elles prohibées à des femmes de mauvaise vie qui en sont indignes, et mille fois plus avides et plus séduisantes : « Hæc ratio fortius militat in impudicis quæ solent esse blandiores et rapaciores, nec debent esse melioris conditionis quam uxor legitima », dit Dumoulin. […] Sur quoi Godefroy fait cette réflexion : « Quoique éloignée du théâtre, ses vices font voir qu’elle est toujours Comédienne de cœur ; car Comédienne et prostituée, dit cet Auteur, sont deux choses très voisines et très liées » : « Proxime confines cohærent meretrix et scenica. » On ne tient aucun compte des promesses de chasteté qu’on ne tient que par force, « quæ votum castitatis infregit, minuit, elusit ».
Non tamen hic prohibetur , dit la Glose, repræsentare præsepe Domini, Herodem, Magos, & qualiter Rachel plorabat filios suos, & cætera quæ tangunt festivitates illas, de quibus hic fit mentio ; cùm talia potiùs inducant homines ad compunctionem, quàm ad lasciviam vel voluptatem, sicut in Pascha, Sepulchrum, Domini, & alia repræsentantur ad devotionem excitandam, & quod hoc possit fieri.
Et afin qu’on sache que je n’en parle pas ignoramment et à vue de paysn, comme on dit, je vous veux montrer comme saint Thomas d’Aquin embrassant la défense de la comédie a prononcé l’arrêt sévère mais très juste dû à nos ennemis, en son livre au titre Du Jeu, quest. 22, en ces paroles : « Ludus est necessarius ad conservationem et conversationem vitæ humanæ ; ad omnia autem quæ sunt conversationi humanæ necessaria deputari possunt aliqua officia licita : et ideo etiam officium histrionum quod ordinatur ad solatium hominibus exhibendum, non est secundum se infame aut illicitum ; nec sunt in statu peccati dummodo moderate ludo utantur.
HISTOIREDES OUVRAGES Pour & contre les Théatres Publics. Il parut sur la fin du dernier siecle un Livre intitulé : Histoire & Abrégé des Ouvrages Latins, Italiens & François, pour & contre la Comédie & l’Opéra, Orléans, 1697. Cet Ouvrage, qui a pour Auteur M. Lalouette, est dogmatique & historique. On y trouve dans la partie dogmatique un exposé de la Doctrine de l’Ecriture sainte, des Conciles & des Peres de l’Eglise sur la Comédie.
Egli scrive. « Iocandit genus secundum Tullium dicitur esse liberale, petulans flagitiosum, obscenum ; quando scilicet utitur aliquis causa ludi turpibus verbis, vel factis, vel etiam his, quæ vergunt in proximi nocum entum ; quæ de se sunt peccata mortalia : et sic patet, quod excessus in ludo est peccatum mortale. […] Tommaso, il quale scrive, che l’ufficio Istrionico è illecito, quando si serve di nocumenti al prossimo. « His quæ vergunt in proximi nocumentum. […] Non est vero peccatum mortale interesse Comedii ob solam delectationem in verbis, quæ ob solam vanam curiositatem audiuntur. […] Nilo dice. « Mulieris aspectus sagitta veneno illica, quæ scrit animam, et venenum immittit; et quo diutius manet, eo magis vulnus computrescit. […] E Lattanzio. « ætas, quæ scenari, ac regi debit, ad vitia, et peccata craditur ».
Non, les sacrilèges et la fureur d’Hérode ne furent pas si funestes à Jean que le poison de la danse : « Plus nocuisse saltationis illecebram, quam sacrilegi furoris amentiam. » Fuyez donc la danse, si vous voulez être chaste, au jugement même des sages païens ; elle ne peut être que le fruit de l’ivresse ou de la folie : « Juxta sapientiam sæcularem, saltationis temulentia auctor est aut dementia. » Voilà, mères Chrétiennes, de quoi vous devez garantir vos filles ; apprenez-leur la religion, et non la danse ; il n’appartient qu’à la fille d’une adultère d’être une danseuse : « Videtis quid docere, quid dedocere filias debeatis ; saltet sed adultera filia, quæ vero casta est, filias suas doceat castitatem, non saltationem. » Il cite une foule d’exemples de saintes Vierges qui ont mieux aimé souffrir la mort, et même se la donner, que de perdre la virginité.
Ce n’est pas se réjouir dans le Seigneur d’en faire une matière d’amusement ; le véritable objet de la joie Chrétienne, c’est le souvenir de ses miséricordes, la vue de ses bienfaits, l’espérance de la félicité éternelle : « Lætatus sum in his quæ dicta sunt mihi, in domum Domini ibimus. » Ce n’est pas, il est vrai, un langage à tenir aux Comédiens ; ils le prendraient pour un délire. […] Ils ne croyaient pas convenable que des Actrices portassent des vêtements si opposés à leur profession, ce n’eût été sans doute que pour s’en moquer, peut-être pour se déguiser et n’être pas connues, et par là ouvrir une porte au crime, dont la honte eût rejailli sur les honnêtes filles, dont elles auraient profané la robe : « Mimæ, quæ ludibrio corporis sui quæstum faciant, habitu virginum non utantur. » On fait souvent dans le monde un parallèle malin de la conduite équivoque et des manières mondaines de quelques Prédicateurs, avec la divine parole qu’ils annoncent.
Membræ quæ verecundiæ gratiâ celat, cur in tabulâ nudas & aspicis, & non pateris abesse à conspectu liberorum ? […] Les Poëtes même Payens ne l’approuvoient pas ; ils en ont une idée bien différente : Osculæ qui sumpsit, si non & cætera sumpsit, hæc quoque quæ sumpsit, perdere dignus erat.
Le passage suivant, tiré d’un ancien auteur latin très-souvent cité, confirme bien mon opinion sur les effets irritants de l’action théâtrale : Segniùs irritant animos demissa per aurem Quam quæ sunt oculis subjecta fidelibus.
Aliud animæ damnum, inutilia quæ ad nihil conducunt, tempus dilapidatur, &c.
Jean Chrysostome, 38e homélie sur le chap. 11 de Matth], « Cuncta enim simpliciter quæ ibi fiunt sunt turpissima. […] Cyprien, Des Spectacles]. « Haec etiamsi non essent simulacris dicara, obeunda tamen et spectanda non essent Christianis fidelibus, quæ etsi non haberent crimen, habent in se et maximam et parum congruentem fidelibus vanitatem. […] [Carlo Borromeo, Instructiones praedicationis verbi Dei] « Spectacula, ludos, ludicrasque res id generis, quæ ab ethnicorum moribus originem ducunt, disciplinaeque Christianæ adversantur, perpetuo detestabitur, execrabitur ; demonstrabit incommoda, publicasque aerumnas inde in populum Christianum dimanare...
Quæcumque vera, quæ pudica, hœc cogitate, hæc agite. […] Exempla fiunt quæ esse jam facinora destiterunt. […] Ne tantum peccata fugiamus, sed ea etiam quæ videntur indifferentia, quæ paulatim in hoc pertrahunt.
Oculorum præstigiatrices, animarum corruptrices, quæ turpium voluptatum movent incendia.
Ce sont des aventuriers qui n’ont ni feu ni lieu, ne peuvent être membres d’aucun corps, et ne doivent être admis dans aucune assemblée ni civile ni religieuse ; ils n’ont que la tolérance, on leur laisse faire et dire des folies ; voilà leur état : « Qua porro ignominia, Mimi et Histriones Juliani funus ducebant, probrisque ac ludibriis a scena petitis incusabant, nihil non facientes et dicentes quæ hujusmodi homines qui petulantiam pro arbitrio perpetratre consueverant. » Greg.
C’est bien là le cas de l’Evangile : Væ vobis qui ridetis quæ plorabitis, beati qui lugent.
Plaute dans un Prologue, fait défendre par Mercure, de la part de Jupiter, toutes les brigues, parce que, dit-il, pour un Comédien comme pour un Grand homme, la Loi est la même ; c’est par le mérite & non par la cabale qu’il faut triompher : Eadem Histrioni sit lex, quæ summo viro : Virtute ambire oportet, non favoribus.
O præclaram emendatricem vitæ Poeticam, quæ si flagitia non probaremus, nulla esset omninò !
« Non est ambitiosa, non quærit quæ sua sunt, non irritatur, non cogitat malum.