Ainsi c’est dire le tein de ma fille est si vif & d’un si beau rouge, qu’elle ressemble au pôt au rouge. […] Des troupes ambulances d’acteurs, dont tout est plein, & qui pour de l’argent font ce qu’on veut, suivent la biere du mort jusqu’au tombeau, & par une scene mouvente représentent en chemin sans s’arrêter ce qu’ils jugent à propos, analogue autant qu’ils peuvent à la nature de la fête & au caractere du défunt, des choses lugubres & tragiques, des traits graves pour les Magistrats, des mouvemens vifs pour la jeunesse, pésans pour un âge avancé, des exploits guerriers pour les Militaires.
On jouoit Psiché, je vous assure que M. étoit Psiché, enlevée comme elle dans un séjour enchanté, aussi surprise, aussi charmée qu’elle ; & la représentoit mieux à l’arrêt de mort de Psiché & la pompe funèbre qui ce suit ; elle pleura après s’être long-temps contrainte, l’honneur avoit combattu dans sa petite ame, mais enfin l’honneur qui n’est pas accoutumé à être le plus fort céda, & le mouchoir fut inondé de larmes, elle voulut s’en aller ou se cacher au fonds de la loge, elle s’imaginoit être déshonorée ; nous eûmes bien de la peine à la rassurer, je lui reprochai qu’elle étoit bien sensible : elle répondit, que ce n’étoit que la pitié ; mais quand les scènes de Psiché & de l’amour vinrent, elle ne le fut pas moins, & il n’étoit plus question de pitié, un air de joie douce & vive étoit peint sur son visage, & sa beauté n’y perdoit pas. […] Godeau ne le connoissoit pas, ou faisoit semblant de ne pas le connoître pour lui prodiguer avec plus de liberté les éloges les plus outrés qui lui attirèrent des satyres fort vives sur les talens littéraires ; on fut sur-tout choqué de ce qu’il traite l’Auteur de défenseur, très-zélé de la vérité, veritatis vindex acerrimus , & d’homme élevé dans le sein de l’ancienne théologie, avitæ theologiæ in sinu éducatus .
Blin de Sainmore, dans son Epître a la Reine, représente ainsi les bons pasteurs : Riches si vains, & vous Grands fastueux ; Dans vos Palais, vous ne pouvez comprendre, Que sous le chaume on vive plus heureux. […] Et cependant on fait de la Rosiere une vraie coquette, hypocrite & adroite qui cache la plus vive passion, par un air de gaieté, de fanfaronnade sur la vertu, de protestation d’indifférence, de mauvais traitemens affectés à son amant, des injures, des emportemens.
Il y a apparence que cette comédie a été faite en France & envoyée à Rome, Le Sacré Collége, qui, tout occupé de la grande affaire de l’élection d’un Pape, auroit dû la mépriser, comme il avoit méprisé les Gangagnellines, a paru y prendre le plus vif intérêt ; &, à la sollicitation de l’Eminence françoise, a agi avec la plus grande rigueur. […] Le décret par leur ordre fut exécuté par le gouverneur de Rome & ses Sbires, sur des soupçons donnés à leurs Eminences, qui n’ont point été prouvés : sujet d’un nouveau différent encore plus vifs.