Ce Prince a pourtant peu gagné dans l’empire de la philosophie à ses courtisans près qui l’élevent au troisieme ciel ; son crédit est médiocre parmi les sages ses confreres ; la médiocrité de ses talens littéraires & de ses vertus morales feroient peu d’honneur au parti. […] C’est à ces vertus héroïques que fait allusion le Monarque Prussien, dans les vers injurieux qu’il composa contre les Princes Allemands, du nombre desquels il n’excepta pas l’Electeur d’Hanovre. […] Cette morale, cette discipline militaire que suivent dans le monde tous les philosophes célibataires, véritablement Sans-souci, pour la religion & pour les mœurs, ce seroit la matiere d’une vraie farce de la foire, où le soldat & le Monarque figureroient admirablement, si la religion & la vertu permettoient de rire de ces honteux excès. […] Toutes les vertus ne sont qu’apparentes, & n’ont que l’intérêt pour principe. […] Vous ne savez pas que ce philosophe est écouté à Paris comme un oracle, qui ne parle que de mes talens & de mes vertus, & soutient que je suis un héros.
S’ il est quelque chose parmi nous qui puisse estre comparée aux triomphes Romains, & remplir en quelque façon les idées qui nous en restent, ce sont sans doute les Entrées que les bonnes Villes font à leurs Souuerains ; la depense, la magnificence, & la foule du peuple & des aclamations r’appellent dans le souvenir, & representent assez fortement ces anciennes & fastueuses Pompes dont on recompensoit les Vertus & les Succez des grands Hommes.
Il s’agit maintenant, sur notre Théâtre Français particulièrement, d’exciter à la vertu, d’inspirer l’horreur du vice, & d’exposer les ridicules : ceux qui l’occupent, sont les organes des premiers génies, & des hommes les plus célèbres de la Nation ; Corneille, Racine, Molière, Renard, monsieur de Voltaire, &c. leur fonction exige pour y exceller, de la figure, de la dignité, de la voix, de la mémoire, du geste, de la sensibilité, de l’intelligence, de la connaissance des mœurs & des caractères, en un mot, un grand nombre de qualités, que la nature réunit si rarement, dans une même personne, qu’on compte plus de grands Auteurs que de grands Comédiens.
; parce qu’ils vont le recueillant indifféremment des sources bonnes et mauvaises, aux dépens de tout et même de la vertu, si le plaisir le demande.