Mais qu’il avoue en même temps que saint Cyprien en condamnant des Spectacles qui n’avaient rien de la superstition et de la licence des Gentils, à cause de la vaine pompe qui les accompagnait, il a aussi condamné les Opéras et les Comédies d’aujourd’hui, où l’on emprunte du siècle tout ce qu’il a de plus vain et de plus pompeux pour éblouir les Spectateurs. […] Mais si Sa Majesté a assisté autrefois aux Spectacles, elle a pu avoir des raisons de politique qui ne sont pas du ressort du Docteur ni du mien : et ça a été peut-être avec la confiance que sa présence imprimerait assez de respect, tant aux Acteurs qu’aux Spectateurs, pour les contenir les uns et les autres dans les termes de la modestie. […] Mais on lui a fait assez voir la faiblesse de ses preuves ; et on lui soutient encore avec les plus habiles gens et les meilleurs connaisseurs, que dans les Comédies mêmes que l’on joue aujourd’hui, il reste toujours quelque chose de la première corruption des Spectacles ; qu’on y étale encore tout ce que le monde a de plus vain et de plus pompeux, qu’on y fait toute sorte d’efforts pour enchanter les yeux et les oreilles ; et qu’on n’y épargne rien de tout ce qui peut séduire le cœur par le remuement des passions, dont on fait jouer souvent les ressorts les plus fins sous de belles apparences de vertus : en sorte qu’un Comédien croirait avoir perdu son temps s’il n’avait causé quelque émotion et fait quelque brèche au cœur de ses Spectateurs ; et que les Spectateurs de même croiraient avoir perdu leur argent s’ils sortaient de la Comédie aussi froids qu’ils y sont entrés. […] Comme si une belle femme n’était belle et n’allait à l’Eglise que pour exciter la passion d’un libertin, de même qu’une Comédienne n’est Comédienne, et ne monte sur le Théâtre que pour donner du plaisir à ses Spectateurs : comme si des Histoires muettes et qui racontent des événements d’une manière simple et naturelle, faisaient la même impression que des discours et des actions animées, qui expriment les passions avec toute la véhémence et tout l’art imaginable : et comme si l’Ecriture sainte enfin n’avait été dictée du Saint Esprit que pour induire et jeter les hommes dans l’erreur, de même qu’on ne compose des Comédies que pour les transporter dans le plaisir. […] Mais ce qui est encore de plus surprenant, c’est qu’en cela même ils contribueront à la gloire de Dieu, en procurant un agréable repos à leurs Spectateurs, dans un temps où ils doivent en se reposant imiter son exemple.
Ses influences sur les Spectateurs, a, 23-26, 264. […] Leurs effets sur les Spectateurs, a, 43-46. […] Ce qui y attire le plus grand nombre des Spectateurs, 424. […] Ils sont un nouveau moyen de corruption pour un pays déjà corrompu, a, 597 Spectateurs. […] Ce qui y attire la plupart des Spectateurs, 27.
Réponse maligne qui peut faire entendre qu’elle n’a pas réussi, parce que l’acteur & le spectateur n’ont point de mœurs . […] Le concours des magistrats, qui, en sortant de l’audience, alloient en foule à la comédie, remplissoient les loges comme ils avoient rempli la grand’-chambre ; la multitude des spectateurs, outre la comédie ordinaire qui jouoit tous les jours & les premiers jours gratis, on avoit dressé à Toulouse quatre théatres aux quatre coins de la place royale, où l’on jouoit du matin au soir pour le public. […] On voit dans les écoles de peinture ce qu’on appelle modele ; c’est-à-dire, une femme qui, pour de l’argent, se prostitue sans pudeur (selon l’expression de Tertullien) aux regards des maîtres & des éleves, & de tous les spectateurs qui peuvent s’y trouver, dans l’état le plus infâme, & dans toutes sortes d’attitudes, afin qu’on apprenne à les dessiner & à les peindre, comme dans les théatres d’anatomie on étale les corps qu’on disseque. […] Il n’y a point de spectateur qui en revienne innocent ; au contraire, il forme l’habitude de s’occuper des objets que l’imagination a saisi & que le crayon s’est efforcé de rendre, il sera tenté, & se croira autorisé de peindre des nudités. […] Est-il vraisemblable que ce prince decouvre sa favorite à tant de spectateurs, qu’il veuille tant de témoins de son portrait, & qu’au milieu de cette foule Apelles fasse en un instant cet ouvrage ?
De tout cela il ne reste dans l’esprit des spectateurs que de la pitié pour le Prince imbécile qui manque la couronne, de l’estime pour le courage du Vizir qu’on plaint d’être le jouet de deux enfants, et de la haine pour le Sultan qui fait mourir les rebelles. […] L’imagination, également remplie de carnage, dont on vient de voir le tableau, rend le spectateur cruel, féroce, rebelle, indépendant ; il verrait de sang froid les séditions et les meurtres, il y prendrait part, et malheur à l’autorité souveraine, si jamais des calamités publiques la rendaient faible ou douteuse ; elle trouverait dans le peuple dramatique des ennemis secrètement armés contre elle par leur goût. […] Une femme furieuse trahit lâchement le secret de son amant, pour le perdre, et le Consul emploie bassement la coquetterie de sa propre fille, pour pénétrer Catilina, comme les Philistins se servirent de la Courtisane Dalila pour découvrir le secret de Samson : tant la corruption des Auteurs, des Acteurs, des spectateurs, impose la nécessité de mêler l’amour partout, fût-il le plus inutile, le plus faux dans le fait, le plus abominable dans ses intentions et ses démarches, opposé même au caractère des personnages. […] , les personnages récitants peuvent, par le fond des choses, et surtout par la véhémence de la déclamation, faire sur le plus grand nombre des spectateurs des impressions contraires au repos des Etats monarchiques. » Belle excuse ! […] Du moins Joas, un enfant de huit ans, n’est que le spectateur du meurtre de sa mère, qu’un grand Prêtre, son Gouverneur, exécute sans le consulter, s’en faisant un devoir de religion.