et lorsque les Comédiens avaient prononcé quelque blasphème, c’était alors que l’on y riait de tout son cœur. ». […] Or est-il qu’en lisant les Comédies d’aujourd’hui, nous ne nous sentons excités à rien de contraire à la pudeur, qu’elles ne sont propres qu’à faire rire, et incapables de laisser dans l’esprit de ces idées fâcheuses dont Salvien ne pouvait se débarrasser. […] Vous m’avez dit vingt fois vous-même, que les Comédiens étaient fort circonspects sur cette matière, et qu’ils ne voulaient pas souffrir, quand ils acceptaient une Pièce qu’il y eut rien d’indécent ou de libre, pas même une équivoque, ni la moindre parole sous laquelle on put cacher du poison ; comme de fait on n’en trouve point dans les Comédies qu’on imprime, ce qui prouve de soi que cette première condition se garde exactement dans nos Comédies, où l’on ne se sert point de ces paroles déshonnêtes ou impies, que l’Apôtre saint Paul, et après lui saint Chrysostome, nous ordonne de fuir, lorsqu’il nous exhorte, « de dire ni écouter avec plaisir ces sortes de paroles folles et impudentes, qui bien loin de nous devoir exciter à rire, ont de quoi nous obliger à pleurer ».
Mais s’il est ainsi, comme il est vraisemblable, que l’homme d’entendement ne se laisse jamais vaincre d’un plaisir ridicule, et borne celui qu’il prend et donne aux autres, comme s’il s’était imposé lui-même la loi pour entretenir ceux qu’il veut réjouir, de propos, aussi décent que délectables ; c’est en quoi le docte est reconnu de l’ignorant ; l’un pour toute fin n’a que le ris, et ne se soucie de quel prix il l’achète : et l’autre n’en veut séparer 1’honnêteté.
On riait en entendant Molière et Arlequin.
« L’on croit s’assembler au Spectacle, et c’est là que chacun s’isole : c’est là qu’on va oublier ses amis, ses voisins, ses proches, pour s’intéresser à des fables, pour pleurer les malheurs des morts, ou rire aux dépens des vivants.