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383. (1667) Traité de la comédie « Préface » pp. 452-454

On ne se contente pas de suivre le vice, on veut encore qu'il soit honoré et qu'il ne soit pas flétri par le nom honteux de vice, qui trouble toujours un peu les plaisirs que l'on y prend, par l'horreur qui l'accompagne.

384. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre treizieme « Réflexions morales, politiques, historiques,et littéraires, sur le théatre. — Chapitre II.  » pp. 36-74

L’épouse du Cantique le dit innocemment à son mari, dont le mariage rend les plaisirs légitimes : Dabo tibi ubera mea. […] Amour des richesses, concupiscence des yeux ; amour du plaisir, concupiscence de la chair ; orgueil de la vie, concupiscence de l’esprit : triste suite du péché originel, principe funeste du péché actuel & de la damnation. […] La Sagesse se venge, elle change ses graces en serpens, ses plaisirs en remords ; la beauté rendoit comme stupide, par l’ivresse de l’admiration & de l’amour ; elle pétrifie par la douleur, la frayeur & le désespoir. […] Celui qui a su vaincre l’amour du plaisir, trionphera aisément des autres ennemis : ce sera par la vue de la laideur du vice, de sa honte & de ses remords. […] On ne s’arrête que par force & par lassitude de plaisir : Postquàm epulis Bacchoque modum lassata voluptas imposuit.

385. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre IV. Christine de Suede. » pp. 111-153

Ce Bourdelot, espèce de bouffon & d’Arlequin, qui avoit toute sa confiance & gouvernoit les affaires de ses plaisirs, lui donnoit la comédie, & dirigeoit les Comédiens ; il étoit Ecclésiastique & Médecin, & disoit avoir un bref du Pape qui lui permettoit d’exercer la Médecine, il en avoit sans doute un autre qui lui permettoit aussi de jouer la comédie quoiqu’ecclésiastique. […] Quel mari pour une Actrice accoutumée à l’indépendance, & à tous les plaisirs ! […] Le penchant d’un sexe pour l’autre est naturel à tout le monde, mais ce penchant a pour objet de s’en faire aimer & de goûter les plaisirs que la nature a attaché à leur union. […] Son écolière voulut lui élever un superbe mausolée, le faire ensévelir dans le tombeau des Rois ; mais le tourbillon de ses plaisirs emporta ces grands projets comme une planette autour de son trône. […] Comment sans ce secours se soutenir sur la trône ou les plaisirs assiégent, où les tentations attaquent en soule, où les occasions les plus délicates s’offrent à tout moment ?

386. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre I. De la Pudeur. » pp. 4-35

Elle augmente leur beauté, elle en est la fleur, elle sert d’excuse à la laideur, elle est le charme des yeux, l’attrait des cœurs, la caution des vertus, l’union & la paix des familles, la sureté des mœurs, le charme du plaisir, sans elle l’amour seroit sans gloire, c’est sur elle que se prennent les plus flateuses conquêtes, elle met le prix aux faveurs, elle est si nécessaire au plaisir qu’il en faudroit conserver dans le temps même destiné à la perdre ; c’est une coquetterie rafinée, une espece d’enchere que les belles mettent à leurs appas, une maniere d’augmenter les charmes en les cachant. […] il se l’arrache à lui-même, & se prive du plus doux plaisir de la société, en perdant la pudeur. […] Avant cette création on étoit inondé de mauvaises piéces, que d’insipides écrivains avoient l’audace de présenter sous le bon plaisir des actrices, sans avoir consulté des personnes judicieuses versées dans la science profonde du dramatique. […] Le cœur s’épanouit & respire un air de plaisir & de liberté ; telle une femme parée s’empare des sens, & fait glisser la volupté. […] Elle est à elle-même le censeur le plus minutieux & le plus inexorable ; mais aussi quand ce chef-d’œuvre de l’art, du goût & de la mode, est sorti de ses mains, qu’elle applaudit à son travail, qu’elle se complait en elle-même, qu’elle se contemple avec plaisir dans son miroir, quels transports !

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