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65. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre VIII. Du Stile. » pp. 287-319

L’on a bien raison de dire, que le Français est rempli d’inconséquences, de contradictions, & qu’il serait fort difficile de peindre ses goûts & ses caprices : il ne veut que des Drames où l’esprit pétille à chaque instant ; à peine daigne-t-il faire grace à ceux qui ont beaucoup d’intrigue & peu de phrases joliment tournées ; & cependant il aime, il adore quelques Poèmes du Théâtre moderne, dont le stile a tant de rapport avec les personnages qu’on y voit agir. […] Les Poètes de notre Spectacle s’appliquent, sur-tout à peindre les mœurs des personnages qu’ils font agir ; donc ils ne doivent pas employer un stile recherché. […] A force de vouloir peindre la Nature, il donne dans le bas & dans des négligences de stile impardonnables. […] De tous ceux qui courent dans la carrière du Spectacle Moderne, il est le seul qui éxcelle à peindre la Nature dans sa vraie simplicité.

66. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre V. Le but des auteurs et des acteurs dramatiques est d’exciter toutes les passions, de rendre aimables et de faire aimer les plus criminelles. » pp. 51-75

S’il est mal peint, la pièce est mauvaise ; s’il est bien peint, il offusque tout ce qui l’accompagne. […] L’objet de la plupart des drames les plus estimés n’est-il pas de nous peindre sans cesse des intrigues amoureuses, des vices que l’on s’efforce de rendre aimables, des désordres faits pour séduire la jeunesse inconsidérée, des fourberies capables de suggérer mille moyens de mal faire ? […] » « Qui peut se dire à soi-même qu’il n’a contracté aucune tache en sortant d’un lieu où les deux sexes se rassemblent pour voir et être vus, et pour voir des spectacles consacrés aux dieux des nations, où on décrit leur histoire, où on peint leurs amours, où on représente leurs infamies sous des voiles qui en diminuent l’horreur et qui en augmentent le danger ?

67. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « REMARQUES. SUR LE LIVRE DE J.J. ROUSSEAU, CONTRE LES SPECTACLES. » pp. 21-65

« Quand il serait vrai qu’on ne peint au Théâtre que des passions légitimes, s’ensuit-il de là que les impressions en sont plus faibles, que les effets en sont moins dangereux ? […] Si la Pièce nous arrache des larmes, ou de pitié pour un innocent malheureux, ou de joie pour un opprimé qui triomphe ; si elle peint dignement quelque vertu ; si elle inspire de l’horreur pour quelque vice, elle aura les applaudissements qui lui sont dus ; les Acteurs jouiront de ceux qu’ils méritent ; le Spectateur lui-même s’applaudira d’avoir été sensible. […] Il se peint lui-même, s’écrierait ici le Lecteur indigné, s’il ne craignait de lui ressembler.

68. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — TROISIEME PARTIE. Des obstacles qui s’opposent parmi nous à la perfection de la Comédie. » pp. 57-75

Il y a donc encore aujourd’hui comme autrefois des caracteres à peindre ; il y a donc encore aujourd’hui d’utiles leçons à donner au genre humain. […] Il faut qu’elle sonde le cœur humain jusque dans ses replis les plus ténébreux, & que là, comme dans leurs sources elle étudie ces passions, qui font tant de ravage dans la Société, & qu’employant tout son art à les peindre d’après nature, elle montre sur la scène l’homme tel qu’il est, malgré ses déguisemens apparens.

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