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32. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome II « La criticomanie. » pp. 1-104

D’abord si l’on observe sans prévention le moyen dont l’auteur se sert pour réprimer l’avarice et l’usure, on voit avec peine qu’il met en spectacle, devant les enfants comme devant leurs parents, le fils d’un avare qui manque de respect à son père, qui l’insulte cent fois, tâche de lui attirer le mépris et la risée publique, le vole, le goguenarde et se rit de sa malédiction, de manière à mériter l’approbation des spectateurs ; on voit que la fille même manque à son père et s’en moque avec autant de succès dans cette pièce. […] Il en résulte, aux yeux de ces jeunes gens, qu’ils sont les esclaves d’un préjugé, que le précepte d’amour et de piété filiale n’est pas plus absolu ni plus respectable qu’un autre, qu’il est relatif ou conditionnel, qu’il n’oblige pas, qu’il est impraticable à l’égard d’un père avare, qu’il est permis, ordinaire, qu’il arrive nécessairement qu’un enfant méprise son père, le vole et se moque de lui quand son père est avare. […] Votre inflexible dureté lasse et rebute leur tendresse ; ils ont beau se souvenir que vous êtes leur père, si vous oubliez qu’ils sont vos enfants, le vice l’emportera sur la vertu, le mépris dont vous vous chargez étouffera le respect qu’ils vous doivent. […] Conseillés et agissant ainsi, les enfants ne seront pas plus forcés à voler leur père que leurs compagnons de malheur ne le sont à voler leurs concitoyens. […] On s’y faisait un point d’honneur de se bien acquitter de ses devoirs de chrétien, de citoyen, d’époux et de père.

33. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — XVII.  » pp. 471-473

C'est la source du plaisir que l'on prend à ces vers que M. de Corneille met en la bouche d'un Seigneur qui avait tué en duel celui qui avait outragé son père. […] Je l'ai vu, j'ai vengé mon honneur et mon père; Je le ferais encor, si j'avais à le faire. » C'est par la même corruption d'esprit qu'on entend sans peine ces horribles sentiments d'une personne qui veut se battre en duel contre son ami, parce qu'on le croyait auteur d'une chose dont il le jugeait lui-même innocent. […] Telle est de mon honneur l'impitoyable loi, Lorsqu'un ami l'arrête, il n'a d'yeux que pour soi, Et dans ses intérêts toujours inexorable Veut le sang le plus cher au défaut du coupable. » Personne aussi ne s'est jamais blessé de ces paroles barbares d'un père à un fils, à qui il donne charge de le venger.

34. (1675) Traité de la comédie « XVII.  » pp. 297-299

Et c'est de là que vient le plaisir que l'on prend à ces vers, qu'un grand Poète de ce temps met en la bouche d'un jeune homme après avoir tué en duel celui qui avait outragé son père. […] Je l'ai vu, j'ai vengé mon honneur et mon père. […] Telle est de mon honneur l'impitoyable loi, Lorsqu'un ami l'arrête, il n'a d'yeux que pour soi; Et dans ses intérêts toujours inexorable, Veut le sang le plus cher au défaut du coupable. » On écoute avec plaisir ces paroles barbares d'un père à un fils, à qui il donne charge de le venger.

35. (1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE III » pp. 42-76

Augustin ; mais on n’a rapporté de ces saints Pères que ce qui accommodait et on a supprimé ce qui condamnait : néanmoins on ne peut conclure rien autre chose de ces passages des saints Pères, sinon que les Poèmes dramatiques sont moins honteux que les Idolâtries des Spectacles des Païens. […] Qui est celui de vous tous qui m’écoutez maintenant, ajoute ce Père, qui me pourrait dire par cœur aucun Psaume, ou quelque autre partie de l’Ecriture, si je lui demandais ? […] Quel soin les pères et les mères ne doivent-ils donc pas avoir, de préserver leurs enfants de cette peste qui corrompt presque tout le monde ? […] Saint Cyprien en parlant des pères et des mères qui faisaient manger à leurs enfants des viandes offertes aux Idoles, fait dire aux enfants ces paroles étonnantes : Nos propres pères ont été nos parricides ; Et saint Augustin expliquant ce Passage, dit qu’encore que les enfants n’ayant point de part à cette action criminelle par leur volonté, ne mourussent pas réellement dans l’âme, néanmoins leurs pères ne laissaient pas d’être leurs homicides, parce que en tant qu’il dépendait d’eux, ils faisaient mourir spirituellement leurs âmes. […] Voilà Pères et Mères ce que vous devez inspirer de bonne heure à vos Enfants.

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