Ce livre bon dans le fond, n’a pas eu tout le succès qu’on s’étoit promis, les questions qu’il traite après l’article de la beauté, sont trop sérieuses, trop savantes, trop dégoutantes pour des femmes & des petits maîtres, qui n’aspirent point au degré de Docteur ; ce qui le fait rentrer dans la foule des livres de médecine, qui n’ont rien d’amusant pour des gens frivoles. […] Le premier mari de Poppée, Crispinus, Chevalier Romain, homme simple & modeste, n’aimoit point le luxe & le faste, Poppée s’en dégouta, & s’en sépara pour épouser le jeune Othon ; petit, assez mal fait, mais petit maître élégant & libertin en petit maître ; il dépensa un bien immense en habits, en meubles, en équipages, en festins, en jeux, en fêtes ; il mourut accablé de dettes ; mais quelle femme peut tenir contre l’élegance & la dépense ? […] Ce petit maître se rasoit tous les jours, & se couvroit le visage avec du pain mouillé, comme nos Dames avec de la chair crue, il avoit des savonettes de toutes especes ; faciem quotidiè rasitare, & pane madido linire . […] Ils auroient beau s’autoriser du grand nom d’un Empereur, l’effeminé Othon ne fait que les rendre méprisables comme lui ; ainsi nos petits maîtres ont beau citer le grand monde, & même les actrices, qui sont le prototype des graces, ils n’en méritent qu’un plus grand mépris, en suivant un modele si décrié par tout où l’on respecte la vertu.
de Mortfontaine pensent bien différemment ; celui-ci établit une rente de cent vingt livres, & laisse la liberté du choix ; l’autre se trouve grévé par l’énorme dépense d’un ruban, d’une bague & de quelques roses, & veut disposer en maître du choix. […] Ce drame, fort inférieur à celui de Favart, l’ami, le maître, le modele du Marquis, & bien plus indécent, a comme lui métamorphosé les Salenciennes en actrices. […] Le Sieur Denré & les deux pieces qui rendent le Seigneur maître du choix sont bien éloignés de cette obligation, la concurrence de l’Intendant, du Seigneur & de leur préposé fait rire. […] Il ne faut pas devenir le tyran des enfans, par un excès de rigueur : mais en général la legereté, la facilité, l’amour du plaisir, la vanité, sur-tout dans le sexe rendent absolument nécessaire la vigilance des parens & des maîtres, la suite du danger, l’éloignement des moindres libertés, si on veut conserver le trésor de l’innocence. […] Le repos sur les eaux peut renaître : mais il se perd sans retour dans un cœur dont l’amour est le maître.
Ceux-ci doivent-ils moins au maître qu’ils adorent que les Payens ne devoient à ceux qu’ils adoroient ? […] c’est à elle seule à faire le procès, si le mari sauvage, ou trop régulier, ou trop économe, ne veut pas fournir au jeu, à la toilette, aux parties de plaisir ; s’il n’approuve la dissipation, l’amour du monde, le bal, le spectacle, la compagnie ; si maître chez lui, il ne veut pas souscrire à l’indépendance & recevoir le joug de la domination ; la seule inconstance, la diversité des goûts, la gêne bourgeoise de l’uion conjugale, l’ennui de l’uniformité, le ton du jour, &c. suffisent pour autoriser le divorce au tribunal de Thalie, & sous peine du ridicule l’arrêt souverain en est porté, & exécuté par provision. […] Le théatre n’inspire que des intentions corrompues : ambition, cupidité dans les parens, pour qui toutes les vertus sont dans le coffre fort, j’ai cent mille vertus en louis bien comptés, ou qui trouve tout le mérite dans de vieux titres de noblesse, sans penser que c’est être un sot d’épouser son maître : légèreté, débauche, intrigue, passion, dans les jeunes gens ; on s’en va au bal, à la comédie, à la promenade, enchanté des graces, du son de la voix, des beaux yeux, de la danse, &c. […] Toute l’intrigue consiste dans un domestique qui vole son maître, & est loué & récompensé par le fils qui veut avoir de l’argent pour fournir à sa passion (c’est la même intrigue des Fourberies de Scapin & de cent autres comédies). […] allez au théatre, prenez au hasard, vous ne vous méprendrez pas ; ou menez-y la vôtre, elle sera bien-tôt formée de main de maître.
Il est des Chevaux qui ont plus de part que ceux qui les montent au succez d’une Course : qui courent si uniment qu’ils dirigent le Cavalier : qui sont si fort en echole, qu’ils en sçavent autant que leurs Maîtres : & qui enfin, connoissent leur carriere, & pour ainsi dire le droit du Jeu.