On peut ajouter fort convenablement à cette prohibition les paroles d’Innocent III.
Innocent XI. fit démolir à Rome le premier Théatre public. Innocent XII. […] « Comment donc êtes-vous innocent, puisque vous êtes coupable du crime des autres ? […] croyez-vous être innocent, si vous fournissez… à une créature impudique, les moyens d’entretenir son mauvais commerce ? […] On ne peut, sans une injustice scandaleuse, refuser l’absolution, pour des actions indifférentes, & innocentes en toutes leurs circonstances.
Et partant bien que ie sçache asseurerement, que si vous fleurissez beaucoup dans la foy & dans la pieté, vous n’estes pas moins austeres & Reguliers en vos mœurs ; & que vos actions ne desmentent en rien vostre creance ; ie sçay aussi que le siecle est remply d’esprits libertins, qui estans engagés dans le vice luy donnent beaucoup d’autorité pour le faire aymer, & ne voulants pas estre seuls dans l’erreur, taschẽt non seulemẽt d’y attirer les autres par leurs persuasions ingenieuses, mais empruntẽt encor la faueur de l’Escriture Saincte pour l’accõmoder à leurs sentimẽts ; nous voulãt faire croire qu’elle appreuue les crimes & les diuertissemẽs impies des spectacles puis que (disent-ils) n’ont rien qu’vn innocent plaisir, & qu’ils seruent à delasser nos esprits abbatus des continuelles occupations ; car l’impudence du siecle a si fort alteré la vigueur de la discipline Ecclesiastique, & l’a renduë si languissante & eneruée par les desbordements, que les vicieux ne se mettent plus en peine de treu-a des excuses aux vices les voyants appuyées du consentement public. […] Céte place abominable fume du sang des hommes ; on y épuise les veines de l’innocente victime qu’on sacrifie au plaisir public, on voit sõ sang nager dãs les coupes & les vaisseaux, & on l’offre encor tout chaud à l’idole qui y preside pour le desalterer. […] Au moins les femmes que la misere du viure, & leur malheur reduisent à se prostituer, ont quelque espece d’hõnesteté dans vne extreme infamie ; leur abandonnement est en secret, leurs crimes sont voilez des tenebres, leurs corps se donnent aux débauches dans des lieux retirez : & bien qu’elles ayent vendu leur honte, & que leurs visages ayent quitté céte innocente pudeur qui leur estoit si auantageuse, elles rougissent à tous moments d’apprehension d’estre veuës.
Il serait inutile et impossible de faire l'histoire et d'épuiser le détail des folies humaines dans les divertissements ; nous ne parlerons que d'une espèce qui s'était répandue dans toute la France pendant les siècles d'ignorance, et s'était glissée jusques dans les Eglises et dans l'Office divin, et par les plus indécentes profanations avait porté dans le sanctuaire l'abomination de la désolation, sous une infinité de noms bizarres, la Fête des Fous, la Fête de l'Ane, les Innocents, la Mère folle, l'Abbé et les Moines de Liesse, l'Evêque des Imbéciles, le Pape des Fats, le Roi des Sots, le Prince de Plaisance. […] L'Eglise a toujours condamné avec indignation ces profanes extravagances ; elle a enfin réussi à les bannir du lieu saint, il n'en reste que quelques légers vestiges dans les processions de la ville d'Aix, dans quelques Communautés de filles, où le jour des Innocents les Pensionnaires sont les maîtresses, dans plusieurs paroisses de campagne, où le jour du Patron on fait des cérémonies singulières, surtout dans les folies du carnaval, dans les bals et les comédies ; ce que l'Eglise n'a jamais pu abolir, non plus que les vices qui les produisent, et les crimes qu'ils font commettre. […] François de Sales dans ses ouvrages, l'Ecriture même, quoique fort rarement, se permirent des railleries innocentes.