« LE Théâtre, dit l’Abbé d’Aubignac, étant peu-à-peu & par dégré monté a sa dernière perfection, devint enfin l’image sensible & mouvante de toute la vie humaine. […] « La source de l’amour qu’on ressent pour lui se trouve peut être dans le goût qu’ont tous les hommes à contempler l’image des moindres actions de la vie. […] Il résulte de tout ceci qu’Opéra-Bouffon veut dire un Spectacle de choses communes, de pures frivolités ; une éspèce de Drame où l’esprit ne se montre guères, où l’oreille seule est enchantée par les sons de la Musique ; & enfin un lieu dans lequel s’assemblent en foule des Spectateurs plus avides de nouveautès passagères que du sublime & du vrai beau ; & plus curieux d’images basses & populaires que d’un Tableau noble & d’une vaste étendue. »** Quoique St Evremont n’en ait point voulu parler, il semble pourtant le définir assez, tel qu’il parait au prémier coup-d’œil, dans ce qu’il écrit au sujet de l’Opéra Sérieux.
Plus leurs Auteurs colorent ces vices d’une image de grandeur & de générosité, plus ils les rendent dangereux & capables d’entrer dans les ames les mieux nées ; & l’imitation de ces passions ne nous plaît que parce que le fond de notre corruption excite en même tems un mouvement tout semblable qui nous transforme en quelque sorte, & nous fait entrer dans la passion qui nous est représentée. […] Il sort plein de ces images si conformes à ses penchans, & de l’yvresse qu’elles lui causent.
Mais je ne pourrois presque que répéter sur ce point ce que j’ai dit plus haut sur l’effet de l’admiration, en parlant de celle qui est excitée par l’image des Vertus. […] C’est encore plus par la noblesse des pensées, par la hardiesse de l’expression, par la vivacité des images, par la variété des figures, & par la liberté des mouvements, que la Poësie s’éleve au-dessus du langage vulgaire, & qu’elle fait sur nous des impressions si sensibles. […] Enfin les expressions qui frappent dans la Tragédie, ne sont point des paroles froides, inanimées, & pour ainsi dire, des paroles mortes, qu’on n’apprenne que par le récit du Poëte, comme dans le Poëme Epique ; ce sont, pour suivre la même image, des paroles sensibles, animées, des paroles vivantes. […] Nous sommes à peu près comme un Juge, pour suivre la même image, qui se remercieroit sur son tribunal de n’avoir pas fait les injustices qu’il découvre & qu’il condamne. […] Je ne ferai que les indiquer ici pour tracer une image légere de ce que je voudrois voir exécuté par l’Auteur, à qui il en coutera moins pour achever l’Ouvrage, qu’à moi pour en former le premier trait.
l’image, l’attrait, la pâture de la sienne propre . […] 26 l’image de ses miséres, l’amorce & la nourriture de son feu .