Je sens que je contredis ici les idées généralement adoptées touchant la nature de la Comédie ; c’est pourquoi je dois appuyer mon sentiment des raisons les plus solides. […] Je ne le pense pas : je crois qu’on aura une idée bien plus juste de l’avare & bien plus capable de faire impression, quand on se le représentera comme un homme qui se laisse mourir de faim, & qui refuse la nourriture nécessaire à ses enfans & à ses domestiques ; comme un homme qui ne donneroit pas un écu pour racheter la vie à son voisin ; comme un homme enfin en qui l’amour de l’argent éteint toute humanité ; qui quoique très-riche refuse de marier & de donner des états à ses enfans ; qui fait tort à la société en accumulant des richesses qui devroient circuler. […] Les portraits du ridicule des Mœurs, envisagés comme constituant l’essence de la Comédie, lui sont donc totalement étrangers, puisque le but de la Comédie étant d’inspirer de l’horreur pour le vice, si elle s’arrête plus sur le ridicule du vice, que sur le fond du vice, elle éloigne l’idée des dangers que le vice entraîne après lui, au-lieu que son devoir est de la rappeller à chaque instant.
Mais qu’ils prennent une idée plus juste de leur art, & ils trouveront encore abondamment de quoi exercer leurs plumes, quelque laborieux qu’ils soient. […] C’est précisément la haute idée que j’ai de cet excellent homme qui me l’a fait préférer à ses rivaux, & je crois que la preuve qui résultera de l’examen de ses ouvrages, en sera d’autant plus forte. […] Un misanthrope blâmera sans raison les défauts des hommes, & n’aura point d’idée juste des vertus contraires aux défauts qu’il censure ; sans cela même il ne seroit plus misanthrope ; & bien loin de fuir les hommes méchans, il resteroit parmi eux pour les faire rentrer dans le chemin de la vertu.
On y puise des idées de l’art, on se remplit du talent des Acteurs. […] Cette idée de la véritable grandeur, anime ceux qu’ils commettent aux différentes branches de l’administration. […] L’idée avantageuse qu’on leur donne d’eux-mêmes, rallentit l’ardeur de la mériter.
Je veux m’attacher plutôt a prouver que les Grecs & les Romains ont pu avoir une idée de notre Opéra-Bouffon. […] Ce qui me fait naître cètte idée singulière, est tout simple ; on voit du Chant tantôt grave & tantôt plaisant généralement dans toutes les Pièces Grecques.