Les mœurs sont en sûreté ; le Théâtre est honorable ; les Acteurs sont estimés autant qu’honnêtes. […] En raisonnant d’après l’expérience, je sais que le sage Spectacle de notre Capitale, produit depuis quelques années un bien réel, parmi les Ouvriers des Professions, qu’on nomme honnêtes : ceux qui le fréquentent sont les plus habiles, & en général, c’est d’eux que les Maîtres sont le plus contens.
Quelle mère, je ne dis pas chrétienne, mais tant soit peu honnête, n’aimerait pas mieux voir sa fille dans le tombeau que sur le théâtre ? […] S’il n’y a rien là que d’honnête, rien qu’il faille porter à la confession, hélas quel aveuglement faut-il qu’il y ait parmi les chrétiens !
Après quelques temps le Théâtre se corrigea : on substitua, à ces amours déréglés, des amours qui ne tendaient qu’au mariage : mais, tout bien considéré, ces amours (que l’on appelle honnêtes) ne sont pas moins de mauvais exemples que les autres ; ils sont toujours traités sur la scène, sans bienséance, et en dépit des engagements des parents, ou de la volonté des Tuteurs. […] Ces méthodes si scandaleuses dans les Italiens, aussi bien que dans les Français, jointes aux amours, soi-disant honnêtes, sont la base du Théâtre moderne, et en font en même temps tout le défectueux et tout l’indécent, malgré le préjugé du plus grand nombre des Spectateurs, qui croient le Théâtre de nos jours irréprochable.
Gresset publia le 14 de Mai 1759, pour réparer le scandale, qu’il avoit pu donner aux ames honnêtes & pieuses, en travaillant pour les spectacles. […] Il faudra donc que nous passions pour honnêtes, les impiétés & les infamies, dont sont pleines les Comédies de Moliere ? […] Peut on, Madame, désirer une composition plus honnête, & plus favorable à votre cause, & à celle des partisans du spectacle ? […] Tant il est vrai, que le Saint & l’honnête ne font pas fortune au Théatre. […] » Non, dit l’Auteur du Mimographe, ou idée d’une femme honnête.