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92. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre I. Est-il à propos que la Noblesse fréquente la Comédie ? » pp. 3-19

Louis XIV introduisit cette mode, ou plutôt le Cardinal Mazarin, qui voulait, en l’amusant par les jeux et les plaisirs, le tenir en tutelle, et demeurer toujours maître, lui inspira ce goût. […] Bourdelot, son Médecin, homme d’esprit, mais grand pyrrhonien, la jeta dans le goût des comédies, et la dégoûta des affaires et des sciences. » Cette Reine étant venue en France, ne manqua pas d’aller à la comédie, et s’y tint fort indécemment. […] Les Comédiens y prennent des airs de grandeur, un ton de fierté, un goût de luxe, un esprit de profusion ruineux et ridicule. […] Les Comédiennes sont à peu près comme les poupées qu’on fait circuler pour donner le modèle et le goût des modes aux Dames et aux coiffeuses. […] [NDE] Autrefois, le verbe passer pouvait se conjuguer avec "avoir" : ce goût n’est passé...

93. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE V. Des Comédiens. » pp. 156-210

Un homme laborieux n’a point de goût plus vif que celui du travail ; un paresseux, un libertin, trouvent toujours des raisons pour ne rien faire. […] Maintenir et perfectionner le goût quand l’honnêteté est perdue, c’est rendre encore un service. Le goût peut subsister très bien avec l’honnêteté, et ne remplirait pas sa place ; mais, en supposant l’honnêteté perdue, c’est faire encore un très grand bien, que de nous conserver le goût. […] Voilà sans doute un moyen très efficace pour inspirer le goût de la pudeur et de la modestie aux femmes de Théâtre. […] Le vin dont vous faites si bien l’apologie n’était pas plus du goût de Lycurgue que vos Cercles particuliers.

94. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [C] » pp. 391-398

Sophocle, heureusement né pour ce genre de Poésie, avec un grand fond de génie, un goût délicat, une facilité merveilleuse pour l’expression, réduisit la Muse Tragique aux règles de la décence & du vrai ; elle apprit à se contenter d’une démarche noble & assurée, sans orgueil, sans faste, sans cette fierté gigantesque qui est au-dela de ce qu’on appelle héroïque ; il fut intéresser le cœur dans toute l’action, travailla les vers avec soin ; en un mot, il s’éleva par son génie & par son travail, au point que ses Ouvrages sont devenus l’exemple du beau & le modèle des règles. […] Corneille avait cependant connu ce genre, & sembla ne vouloir pas y donner son attache : mais Racine, né avec la délicatesse des passions, un goût exquis, nourri de la lecture des beaux modèles de la Grèce, accommoda la Tragédie, aux mœurs de son siècle & de son Pays. […] Mais nos Poètes ont poussé trop loin la complaisance pour le goût de leur siècle ; ou, pour mieux dire, ils ont eux-mêmes fomenté ce goût avec trop de lâcheté.

95. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre premier. Origine des Spectacles. » pp. 1-14

Il voulait que l’on traitât comme des esclaves et des personnes infâmes les comédiens et tous ceux qui servaient à divertir le peuple aux dépens des mœursf. » Les Romains portèrent dans les provinces qu’ils conquirent le goût qu’ils avaient pour les spectacles. […] Ils pouvaient d’autant moins y prendre goût, qu’ils n’entendaient ni la langue latine ni la romaine rustique, qui étaient les seules en usage dans le pays. […] Lorsque les grands seigneurs ne furent plus que des courtisans, que le plaisir et l’ambition fixèrent à Paris, on vit cette capitale surchargée d’une multitude de citoyens désœuvrés, dont on crut devoir occuper le loisir, selon le goût du temps, par des représentations pieuses qui furent l’enfance et le bégaiement de nos tragédies, de nos opéras et de nos comédies. […] Les enfants sans souci s’étaient aperçus que ce n’était pas en jouant des moralités, ou en ne représentant que les mystères de la religion, qu’ils amusaient le peuple ; ils y joignirent des farces assorties au goût corrompu du temps : ce qui attira contre eux un arrêt du parlement qui les supprima en 1584.

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