Mais dès que vous aurez fait ce pas, Saint Chrysostome retombera sur vous avec une étrange force, en vous disant : C’est pour vous qu’un chrétien se fait bouffonHom. 6. in Matth.
Elle sait qu'elle marche au milieu de mille ennemis et de mille pièges, et qu'elle y marche sans lumière et sans force; parce qu'elle ne voit que ténèbres dans son entendement, que faiblesse dans sa volonté, que révolte dans ses sens.
Elle sait qu'elle marche au milieu de ses ennemis et de mille pièges, et qu'elle y marche sans lumière et sans force, parce qu'elle ne voit que ténèbres dans son entendement, que faiblesse dans sa volonté, que révolte dans ses sens.
Voilà, selon moi, le modèle le plus parfait que l’on puisse donner de la force de la passion, dont j’ai tant de fois parlé. […] Je conviens que le Poète pouvait se dispenser de mettre dans la bouche de Pauline le mot d’amour, qui force Polyeucte à lui faire la réponse que nous venons de voir ; mais on ne doit pas oublier qu’elle est Payenne ; elle a recours, pour persuader son mari, aux plus fortes armes dont elle pouvait faire usage : si Pauline avait été Chrétienne, Corneille ne lui aurait pas fait tenir un pareil langage ; ou, s’il l’eût fait, on aurait pu, avec justice, le lui reprocher. […] Racine savait très bien ce qui convenait à la Tragédie ; et, je le répète encore, s’il n’eût pas craint de révolter le Public, en critiquant le goût général de son siècle, il aurait dit ; « que les tendresses et les jalousies des Amants ne sauraient trouver que fort peu de place parmi le majestueux, l’intéressant et le lugubre d’une action tragique. » Racine savait et sentait à merveille cette vérité ; mais, par malheur pour le Théâtre moderne, non seulement il n’eut pas la force de la déclarer dans la Préface de sa Thébaïde ; il n’osa pas même la pratiquer, si ce n’est dans Esther et dans Athalie : il se livra, malgré ses lumières, à la corruption générale de ses prédécesseurs et de ses contemporains : il ne se contenta pas même de mettre de l’amour dans toutes ses autres Tragédies ; il fit aussi, de cette malheureuse passion, la base de tous les sujets tragiques qu’il a traités. […] Je n’ai rien à dire non plus contre l’amour de Plisthène et de Théodamie ; c’est plutôt l’effet d’une sympathie naturelle, qu’une véritable passion ; puisqu’il se trouve à la fin qu’ils sont frère et sœur : cependant cet amour a servi infiniment à l’Auteur, que je trouve très louable de l’avoir imaginé, et encore plus d’en avoir sû faire un si bon usage : car, outre qu’il n’offre rien qui blesse la bienséance la plus austère, les deux Amants sont d’ailleurs occupés de motifs trop importants pour s’amuser à filer des Scènes de tendresse ; aussi l’Auteur les a-t-il évitées avec grand soin, et ne s’est servi de l’amour que pour donner plus de force à la compassion de Plisthène, qui sans cela ne devrait s’intéresser que médiocrement à la vie du père de Théodamie, ne sachant pas qu’il fût aussi le sien.