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2. (1777) Des Spectacles « Des Spectacles. » pp. 75-92

Et l’on veut qu’une vertu naissante, ou, pour mieux dire, que des gens sans vertu, la plupart même déjà vaincus par les ennemis qu’ils vont chercher, soient dans ces assemblées sans danger. […] Ainsi vivent ces âmes innocentes et vertueuses, tandis que ce qu’il y a de plus faible parmi les Chrétiens, croit pouvoir assister tous les jours sans périls, à ces spectacles profanes ; c’est-à-dire, s’exposer sans défense à tous les traits empoisonnés des ennemis de notre salut, et se précipiter sans armes dans le plus redoutable de leurs retranchements. […] La curiosité met-elle en sûreté ceux qu’elle porte jusques dans les retranchements des ennemis ? […] Mais qu’il est à craindre, Seigneur, que cette prétendue insensibilité ne soit l’effet d’une conscience apprivoisée avec le crime, et le fruit d’une funeste captivité ; on laisse en paix un ennemi quand on le voit dans les fers. […] L’ennemi du salut est trop malin et trop rusé pour décrier les spectacles, en faisant trop de bruit.

3. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre II. Est-il du bien de l’Etat que les Militaires aillent à la Comédie ? » pp. 20-34

Les habitants, au lieu de garder leur ville, ne s’occupaient que des spectacles ; les ennemis en profitèrent, y entrèrent sans résistance, la pillèrent, la brûlèrent, et en firent mourir un grand nombre. […] Cet Officier devait être à la tête de sa compagnie, veiller sur ses soldats, se trouver à un rendez-vous, se combiner avec des détachements ; il ne paraît pas, le temps favorable passe, l’ordre n’est pas exécuté, l’ennemi échappe, on est battu. […] On attribue les malheurs d’une guerre à la faiblesse des troupes, au défaut des vivres, à la supériorité de l’ennemi ; on se trompe, absorbé dans l’ivresse des spectacles, étudie-t-on son métier, songe-t-on à son devoir ? […] Le Maréchal de Saxe avait aussi peu de délicatesse : non seulement il souffrait que les Officiers jouassent des rôles, mais il avait une troupe de Comédiens qui le suivait et campait avec lui ; il la prêtait même au Général ennemi. […] L’ennemi peut se fier à la corruption des mœurs : sans combat et avec combat elle répond de la défaite.

4. (1646) Science du chrétien « Des comédies. » pp. 638-643

a Saint Chrysostome, en l’Homélie 8. qu’il a fait de la Pénitence, décrit fort bien le sixième ennemi de notre chasteté, lorsque parlant des comédies sales et déshonnêtes, il les appelle la boutique commune de l’impudicité, l’école publique de l’incontinence, la chaire pestilente, un théâtre de toute impureté, un hôpital rempli de toute sorte de maladies contagieuses. […] Donnez-moi maintenant des armes pour combattre ce dernier ennemi. […] Si vous tenez ferme dans cette volonté, je vous assure déjà de la victoire sur ce sixième ennemi : mais ce n’est pas assez, il faut qu’un cœur Chrétien soit le vainqueur de tout ce qui peut attaquer sa chasteté.

5. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre II. Charles XII. » pp. 32-44

C harles XII & Auguste II, ces deux célebres ennemis, qui ont joué des rôles si extraordinaires sur la scène du monde, croient d’un caractere tout opposé. […] Il est inutile de dire qu’un tel homme n’aimoit point le Théatre : il en étoit l’ennemi juré. […] Charles en fut instruit, & dit froidement : Je n’envie à mon ennemi, ni ses plaisirs, ni ses victoires. […] Le Czar Pierre, son rival & son ennemi, homme aussi singulier, mais dans un autre genre, jouoit de son côté de véritables farces. […] Contens de remercier Dieu de leurs victoires, & d’en recueillir les fruits pour le bien de leurs Etats, les Princes chrétiens n’ont jamais été dans l’usage d’étaler l’orgueil & le faste, & d’insulter leurs ennemis vaincus, surtout les Rois leurs confreres, par des pompeux triomphes, comme les anciens Romains-Pierre ne connoissoit pas cette modération, & n’étoit pas fait pour cette sorte de grandeur.

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